La journaliste Sarah-Maude Lefebvre, qui publie assez souvent des articles sur le mouvement étudiant dans le Journal de Montréal, a annoncé que plusieurs parents « refusent d’envoyer leurs enfants dans des établissements affiliés à l’ASSÉ ». L'article, comme de nombreuses autres oeuvres de Mme Lefebvre, est tout à fait biaisé, bien entendu. Il ne traite que d'un cas: celui de M. Éric Bordeleau, qui affirme toutefois qu'il laissera son fils choisir son cégep.
Tout d'abord, si vous êtes un-e jeune, et que vos parents essaient de vous imposer des choix, je ne peux vous conseiller qu'une chose: éloignez-vous d'eux! Partez le plus loin possible! Et refusez surtout de ressentir de la culpabilité.
Ensuite, j'aimerais faire part de ma propre expérience dans la FECQ/FEUQ/FAÉCUM. Nous savons déjà que ces trois associations sont très proches (la FAÉCUM est d'ailleurs membre de la FEUQ). Par exemple, Julie Bouchard et Jonathan Plamondon, deux des superstars de la grève de 2005, ont tous deux passé à la FAÉCUM après leur cégep approfondissant pendant leur mandat (comme si c'était possible) la culture du secret. La FAÉCUM prétend d'ailleurs actuellement faire preuve de transparence: elle est en campagne de hausse de cotisation. Eh bien, les temps changent! Pour connaître des détails du budget et des propositions de congrès, quand j'étais au bacc, il a fallu aller aussi loin que voler des documents[1]. De plus, quand je passais alors à côté des Conseils Centraux (qui se déroulaient dans l'alvéole de la cafétéria, au Pavillon Jean-Brillant), eh bien c'était le branle-bas de combat. Il ne fallait surtout pas que j'entende ou que je vois quoi que ce soit.
Un jour, (ça devait être vers 2007 ou 2008), nous avons appris que Jean Charest donnait un déjeûner-conférence à HEC-Montréal[2]. Nous (les associations étudiantes d'histoire, de socio et d'anthropo, une poignée de personnes de l'ASSÉ, entre autres) avons donc décidé de manifester devant le pavillon principal de l'école d'administration. Pas de chance: la FAÉCUM avait aussi décidé d'organiser un rassemblement! La FAÉCUM, constituée alors presque uniquement d'hommes aux gros bras, a essayé par tous les moyens de tout gâcher. Nous voulions entrer; elle nous a dit de rester dehors, à grands renforts d'intimidation. Je n'étais pas fort sur la désobéissance, et si je suis finalement entré, c'est parce que plusieurs y sont parvenu-e-s avant moi.
Nous sommes donc entré-e-s massivement. La FAÉCUM a suivi. Nous avons contourné le seul garde de sécurité, puis nous avons abouti devant la cafétéria chic de HEC, où se déroulait le déjeûner. Nous n'avons pas pu faire irruption dans la salle: au même moment, les gorilles de la FAÉCUM nous bloquaient le chemin. Ils étaient si gros que je ne pouvais même pas voir par-dessus leur épaule. Tout ce que je voyais, c'était des flashs: les journalistes prenaient des photos des crétins de la FAÉCUM qui tentaient de nous contenir. J'ai alors réussi à me frayer un peu un chemin (pas très agressivement) avec une pancarte qui disait: « Nous aurons la gratuité, ou vous aurez la guerre ». Au même moment, un-e photographe du Devoir a pointé son appareil sur moi. N'appréciant pas trop ça, un des mini-flics des fédés m'a envoyé son épaule dans la face. Le lendemain, en première page du Devoir, c'est cette photo qu'on pouvait voir: un clown qui jongle, des boeufs style FTQ qui bloquent le chemin, et moi dans un coin qui perd l'équilibre avec ma pancarte. Ce ne sont pas les militant-e-s de l'ASSÉ qui m'ont bousculé ce jour-là.
Des histoires comme celle-là, j'en ai vécu plusieurs, et j'en ai entendu des dizaines. En temps de tension, on parle de bousculade, d'exclusions très anti-démocratiques (par exemple, on peut demander à un-e candidat-e de ne pas se présenter au Bureau Exécutif parce que le/la candidat-e a un frère/une soeur qui est contre la FAÉCUM[3]), d'intimidation, etc. En temps de paix, les dépenses sont ridiculement exagérées, et comme d'hab' on a pas accès aux chiffres. Le pire c'est que quand des membres entrent en masse dans les bureaux de la FAÉCUM pour avoir accès à des documents auxquels illes ont droit, elle joue à la victime. Pas fort. J'ai même entendu dire que la FAÉCUM saoûlait les délégué-e-s des associations-membres pendant les congrès dans l'espoir que le lendemain, la gueule de bois leur enlèverait toute combativité. J'ai entendu dire que ça MARCHAIT.
J'ai passé mon cégep dans la FECQ et ce ne fut guère mieux. Et en plus ce fut pendant la grève de 2005, dont tout le monde parlait jusqu'à l'année passée, et dont personne ne parlera plus jamais. Les assemblées générales semblaient très démocratiques (croyez-moi, j'étais directeur du scrutin, même si ça ne plaisait pas à tout le monde), mais je me suis bien rendu compte, avec cynisme, que c'était au bout du compte l'exécutif de la FECQ qui décidait quand la grève devait commencer, et quand la grève devait finir. Je n'ai été là-dedans qu'un pion manipulable et je le regrette amèrement. Merci à deux étudiant-e-s aux pieds nus de me l'avoir fait comprendre.
Le camp de formation de la FECQ avait à lui seul coûté une fortune. J'ose pas imaginer combien coûtaient les congrès. Et il y avait des ateliers réservés à l'élite du mouvement étudiant desquels les membres ordinaires étaient exclu-e-s. Leur gestion du conflit à venir était tellement opaque que le merveilleux atelier sur le Plan d'Action ne m'avait foutrement rien appris, à part que toutes les actions étaient secrètes. Le règne du huis-clos. Ça ne s'est pas arrangé après la grève, puisque des exécutant-e-s sont allé-e-s jusqu'à renverser des décisions prises en congrès, à l'intérieur d'une instance officieuse et douteuse surnommée « Lavage de Linge Sale en Famille », ou LLSF, pour les initié-e-s. La FECQ, ça a toujours été une tyrannie à la FTQ-Construction. La FEUQ est pareille, voire pire. Récemment, on « apprenait » que l'irréprochable Martine Desjardins exerçait une pression sur les associations membres pour que celles-ci revoient leurs revendications à la baisse. Disons qu'on est loin du fameux « commander en obéissant » du Subcomandante Marcos.
Il y a des trucs moches à l'ASSÉ aussi. Il y a eu des histoires glauques sur lesquelles je ne reviendrai pas pour l'instant. Mais d'une manière générale, je me suis toujours senti moins méprisé, plus écouté, et en meilleure sécurité avec l'ASSÉ qu'avec les fédés. Et cela, indépendamment de ma plus grande proximité idéologique avec elle. Quand j'étais avec la FECQ et que je voulais ressusciter la PEN (La Presse Étudiante Nationale), je n'aimais pas vraiment l'ASSÉ. J'étais idéologiquement confortable avec ce que la FECQ disait. Mais personnellement, je me sentais comme une sous-merde qui n'avait accès à rien. Pas d'infos, pas de décisions, pas de budget, et il fallait toujours tout payer. C'est vrai, il y avait beaucoup de partys. Mais c'était à peu près tout le temps dégueulasse et plein de vomi. Vous n'avez qu'à taper "initiations UdeM" sur Google, vous allez en apprendre de belles sur la culture de pas mal d'institutions qui font pas la grève. Et le phénomène n'est pas grossi par la lentille des médias. C'est mille fois pire en vrai. L'UQAM, à côté de l'UdeM ou de McGill, c'est un cloître, quoiqu'en disent les bourgeois-es excité-e-s. Aux parents: vous pensez qu'un cégep ou qu'une université asséenne va transformer votre progéniture chérie en barbares dissipé-e-s? Vous avez rien vu, crisse. Faites-vous en donc pas avec ça et laissez les jeunes respirer.
Si j'étais actuellement un-e étudiant-e et que je me magasinais un cégep, je ne choisirais pas selon l'affiliation comme Éliane Laberge le suggère. En revanche, je ne me réjouirais pas non plus d'avoir à passer plusieurs années dans une institution affiliée à la FECQ. Si j'aboutissais dans un tel cégep, je militerais contre. Pas le choix.
Mise à jour (17/04/2013- 14h18): L'intoxication médiatique se poursuit chez Radio-X Montréal. L'attitude est paternaliste à l'extrême. Heureusement, personne ne les écoute.
_________________________
[1] Je ne suis pas l'auteur de ce vol, mais j'aurais bien voulu.
[2] Je sais que ça sonne bizarre, mais apparemment il faut réellement dire "à" HEC, l'acronyme signifiant (c'est sous-entendu) l'École des Hautes Études Commerciales, et non Hautes Études Commerciales. Je me suis fait reprendre à quelques reprises. Mais dites donc ce que vous voulez.
[3] J'invente même pas ça. Mais chuuuut. C'est un secret.
lundi 15 avril 2013
samedi 13 avril 2013
Occupation des bureaux d'Agnès Maltais et manif de soutien
Hier matin, une dizaine de militant-e-s lié-e-s à l'OPDS ont réussi à investir les bureaux de la ministre Maltais. Illes ont occupé le site pendant environ quatorze heures, avant de quitter volontairement vers une heure du matin. En soirée, sur les réseaux sociaux, d'autres militant-e-s ont décidé d'organiser une manifestation spontanée en soutien aux occupant-e-s.
Quand je suis arrivé sur les lieux (vers 20h45) nous devions être une trentaine. Pendant le rassemblement, nous avons seulement vu cinq ou six policiers, qui sont repartis aussi rapidement qu'ils étaient apparus. L'évènement a été couvert modérément par deux grands médias, à ma connaissance: Le Devoir et Radio-Canada, qui a envoyé un caméraman sur les lieux. Ce dernier est remonté dans sa voiture avec quelques images, après quelques minutes seulement. J'ai entendu dire que CUTV était aussi passée par là, un peu plus tôt, mais qu'elle était repartie couvrir les casseroles ressuscitées.
Les occupant-e-s ont connu plusieurs problèmes: deux personnes, qui ne se sentaient pas particulièrement bien, ont dû partir en cours d'occupation. De plus, les militant-e-s n'avaient pas amené suffisamment de nourriture, et la manifestation de soutien n'a pu procéder au ravitaillement[1], malgré l'héroïque tentative d'incursion aidée par notre fameuse diversion réalisée avec l'aide d'une poubelle, notamment.
À un certain moment, alors que nous faisions le piquet devant les portes de la Tour de la Bourse depuis plusieurs heures déjà, étonné-e-s de voir personne, j'ai entendu quelqu'un faire cette constatation: « Illes ont été invisibilisé-e-s. » Et c'est vrai. « Si ça avait été des étudiant-e-s, là-dedans, la police et les médias auraient débarqué en quelques minutes » a fait remarquer un-e autre.
La nuit dernière, c'était le désert[2].
Assez peu de gens appuient les nouvelles réformes de Mme Maltais, ou du moins beaucoup y sont opposé-e-s. Mais au fond de nous-mêmes, qu'est-ce qu'on s'en câlisse, collectivement, du sort des plus pauvres. Ce monde-là ne vaut même pas assez pour qu'on fasse un spectacle de leur arrestation. Les médias l'ont au contraire bien montré: illes méritent juste qu'on les ignore.
_________________________
[1] Un agent de sécurité a expliqué qu'il se ferait renvoyer s'il permettait qu'on apporte de la nourriture, qu'il avait des enfants à nourrir et blablabla. Il faut vraiment pas croire en ce qu'on fait pour sortir des arguments de même. Je trouve ça triste.
[2] Je ne veux surtout pas reprocher aux militant-e-s d'être resté-e-s chez eux. Il faisait mauvais, plusieurs l'ont su assez tard en lisant un statut Facebook, d'autres l'ont juste pas su. En plus, c'était vendredi. Une rumeur (je n'ai aucune idée de sa véracité) dit que quand on vous arrête un vendredi, il y a des chances pour que vous passiez la fin de semaine en-dedans.
Quand je suis arrivé sur les lieux (vers 20h45) nous devions être une trentaine. Pendant le rassemblement, nous avons seulement vu cinq ou six policiers, qui sont repartis aussi rapidement qu'ils étaient apparus. L'évènement a été couvert modérément par deux grands médias, à ma connaissance: Le Devoir et Radio-Canada, qui a envoyé un caméraman sur les lieux. Ce dernier est remonté dans sa voiture avec quelques images, après quelques minutes seulement. J'ai entendu dire que CUTV était aussi passée par là, un peu plus tôt, mais qu'elle était repartie couvrir les casseroles ressuscitées.
Les occupant-e-s ont connu plusieurs problèmes: deux personnes, qui ne se sentaient pas particulièrement bien, ont dû partir en cours d'occupation. De plus, les militant-e-s n'avaient pas amené suffisamment de nourriture, et la manifestation de soutien n'a pu procéder au ravitaillement[1], malgré l'héroïque tentative d'incursion aidée par notre fameuse diversion réalisée avec l'aide d'une poubelle, notamment.
À un certain moment, alors que nous faisions le piquet devant les portes de la Tour de la Bourse depuis plusieurs heures déjà, étonné-e-s de voir personne, j'ai entendu quelqu'un faire cette constatation: « Illes ont été invisibilisé-e-s. » Et c'est vrai. « Si ça avait été des étudiant-e-s, là-dedans, la police et les médias auraient débarqué en quelques minutes » a fait remarquer un-e autre.
La nuit dernière, c'était le désert[2].
Assez peu de gens appuient les nouvelles réformes de Mme Maltais, ou du moins beaucoup y sont opposé-e-s. Mais au fond de nous-mêmes, qu'est-ce qu'on s'en câlisse, collectivement, du sort des plus pauvres. Ce monde-là ne vaut même pas assez pour qu'on fasse un spectacle de leur arrestation. Les médias l'ont au contraire bien montré: illes méritent juste qu'on les ignore.
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[1] Un agent de sécurité a expliqué qu'il se ferait renvoyer s'il permettait qu'on apporte de la nourriture, qu'il avait des enfants à nourrir et blablabla. Il faut vraiment pas croire en ce qu'on fait pour sortir des arguments de même. Je trouve ça triste.
[2] Je ne veux surtout pas reprocher aux militant-e-s d'être resté-e-s chez eux. Il faisait mauvais, plusieurs l'ont su assez tard en lisant un statut Facebook, d'autres l'ont juste pas su. En plus, c'était vendredi. Une rumeur (je n'ai aucune idée de sa véracité) dit que quand on vous arrête un vendredi, il y a des chances pour que vous passiez la fin de semaine en-dedans.
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vendredi 5 avril 2013
Votre travail ne sert à rien.
Bon. Blogger trouve que mes commentaires sont trop longs. J'ai donc décidé de répondre à un commentaire en publiant un nouveau billet.
***
Si vous travaillez et que vous vous êtes posé-e des questions sérieuses sur votre travail, il y a de bonnes chances pour que vous vous soyez rendu-e compte, avec le temps, qu'une énorme partie de vos tâches ne riment à rien. Vous avez certainement également aussi déjà remarqué que des collègues ou des patron-ne-s étaient tout simplement des nuisances et que l'entièreté de leur oeuvre était contre-productive. Peut-être même que vous avez déjà travaillé dans une entreprise ou pour un organisme dont l'activité était tout simplement nuisible pour le "bien commun".
Eh bien, sans entrer dans la rédaction d'un article compliqué avec des statistiques et des calculs - je le ferai une autre fois, si j'ai le temps - je pense qu'une grande partie de notre activité économique est ainsi: elle est inutile et ne se traduit pas en amélioration de notre jouissance quotidienne.
Malgré les promesses de la technologie, nous travaillons toujours des dizaines d'heures par semaine, et si les horaires n'ont pas tant changé, le stress, lui, a augmenté dans de nombreux secteurs (comme si c'était possible) et dans à peu près tous les milieux de vie. Et maintenant en plus, les retraites sont menacées comme jamais.
J'en ai déjà parlé sur ce blogue: rien de ce qui se passe n'est logique. Une usine qui ferme, ce devrait normalement être une bonne nouvelle: puisque le travail est achevé! Mais non, tout le monde pleure, et on décide parfois de la garder en vie artificiellement pour ne pas perdre des emplois.
Ça ne fonctionne pas, entre autres choses parce que notre économie est basée sur la croissance, sur l'activité, plutôt que sur la nécessité et le plaisir. Vous connaissez l'histoire du trou de Keynes? J'ai pas mal l'impression que de créer une nouvelle version nulle du I-Phone toutes les années, c'est pas mal équivalent à creuser un trou pour en remplir un autre.
Tenez, je vous renvoie à un lien de droite. Lisez la partie sur les "limites". Et vous allez comprendre en même temps comment il se fait que Bastiat, cet économiste de la droite pure, a pu me rendre encore plus fainéant.
On valorise la culture de l'effort, et ça donne ce que ça donne. Quand bien même que vous seriez payé avec l'argent volé à des orphelin-e-s pour noyer des chatons à la douzaine, vous vaudrez toujours mieux qu'un-e chômeur/euse ou qu'un-e assisté-e social-e. Notre système de valeurs fera que quand vous rentrerez chez vous, avec votre hostie de boîte à lunch en métal et votre cravate, vous vous direz, fier/fière d'être un-e "contributeur/trice": "Une autre journée de travail accomplie avec sens du devoir et du respect de la chose bien faite."
Mais peut-être que vous avez déjà fait ce genre de constatation, et je m'en excuse si je m'étends là-dessus pour rien.
Je pourrais emprunter le vocabulaire des gestionnaires et vous parler de productivité, d'efficacité, etc. Mais ce n'est pas vraiment dans mes schémas de pensée. Je pense plutôt que chaque heure de travail gaspillée peut se compter en perte de jouissance. Face à cela, je vois deux solutions - mais il en existe sûrement plusieurs autres. Soit on rend le travail (inutile) jouissif (et donc ce ne sera plus du "travail"), soit on réduit le travail (utile) à un strict minimum. Je propose déjà quelques pistes pour y arriver:
- venir à bout de l'obsolescence programmée;
- remplir les villes de potagers et de vergers;
- fermer la plupart des agences de pub;
- fermer le gouvernement;
- détruire toutes les armes.
À partir de là, je pense qu'on peut organiser une société sans plus perdre la moitié de notre temps à galérer pour rien. Comment « organiser » cette société? Eh bien je sais pas, de diverses façons selon les goûts du moment, selon les désirs des individus et groupes desquels elle sera formée, je m'en câlisse! Tant que je resterai libre.
***
Si vous travaillez et que vous vous êtes posé-e des questions sérieuses sur votre travail, il y a de bonnes chances pour que vous vous soyez rendu-e compte, avec le temps, qu'une énorme partie de vos tâches ne riment à rien. Vous avez certainement également aussi déjà remarqué que des collègues ou des patron-ne-s étaient tout simplement des nuisances et que l'entièreté de leur oeuvre était contre-productive. Peut-être même que vous avez déjà travaillé dans une entreprise ou pour un organisme dont l'activité était tout simplement nuisible pour le "bien commun".
Eh bien, sans entrer dans la rédaction d'un article compliqué avec des statistiques et des calculs - je le ferai une autre fois, si j'ai le temps - je pense qu'une grande partie de notre activité économique est ainsi: elle est inutile et ne se traduit pas en amélioration de notre jouissance quotidienne.
Malgré les promesses de la technologie, nous travaillons toujours des dizaines d'heures par semaine, et si les horaires n'ont pas tant changé, le stress, lui, a augmenté dans de nombreux secteurs (comme si c'était possible) et dans à peu près tous les milieux de vie. Et maintenant en plus, les retraites sont menacées comme jamais.
J'en ai déjà parlé sur ce blogue: rien de ce qui se passe n'est logique. Une usine qui ferme, ce devrait normalement être une bonne nouvelle: puisque le travail est achevé! Mais non, tout le monde pleure, et on décide parfois de la garder en vie artificiellement pour ne pas perdre des emplois.
Ça ne fonctionne pas, entre autres choses parce que notre économie est basée sur la croissance, sur l'activité, plutôt que sur la nécessité et le plaisir. Vous connaissez l'histoire du trou de Keynes? J'ai pas mal l'impression que de créer une nouvelle version nulle du I-Phone toutes les années, c'est pas mal équivalent à creuser un trou pour en remplir un autre.
Tenez, je vous renvoie à un lien de droite. Lisez la partie sur les "limites". Et vous allez comprendre en même temps comment il se fait que Bastiat, cet économiste de la droite pure, a pu me rendre encore plus fainéant.
On valorise la culture de l'effort, et ça donne ce que ça donne. Quand bien même que vous seriez payé avec l'argent volé à des orphelin-e-s pour noyer des chatons à la douzaine, vous vaudrez toujours mieux qu'un-e chômeur/euse ou qu'un-e assisté-e social-e. Notre système de valeurs fera que quand vous rentrerez chez vous, avec votre hostie de boîte à lunch en métal et votre cravate, vous vous direz, fier/fière d'être un-e "contributeur/trice": "Une autre journée de travail accomplie avec sens du devoir et du respect de la chose bien faite."
Mais peut-être que vous avez déjà fait ce genre de constatation, et je m'en excuse si je m'étends là-dessus pour rien.
Je pourrais emprunter le vocabulaire des gestionnaires et vous parler de productivité, d'efficacité, etc. Mais ce n'est pas vraiment dans mes schémas de pensée. Je pense plutôt que chaque heure de travail gaspillée peut se compter en perte de jouissance. Face à cela, je vois deux solutions - mais il en existe sûrement plusieurs autres. Soit on rend le travail (inutile) jouissif (et donc ce ne sera plus du "travail"), soit on réduit le travail (utile) à un strict minimum. Je propose déjà quelques pistes pour y arriver:
- venir à bout de l'obsolescence programmée;
- remplir les villes de potagers et de vergers;
- fermer la plupart des agences de pub;
- fermer le gouvernement;
- détruire toutes les armes.
À partir de là, je pense qu'on peut organiser une société sans plus perdre la moitié de notre temps à galérer pour rien. Comment « organiser » cette société? Eh bien je sais pas, de diverses façons selon les goûts du moment, selon les désirs des individus et groupes desquels elle sera formée, je m'en câlisse! Tant que je resterai libre.
jeudi 4 avril 2013
Une horizontalité du haut vers le bas.
Ça m'exaspère un peu d'entendre parler ces jours-ci du prétendu rôle héroïque ou névralgique des auteurs de l'essai De l'école à la rue[1], qu'on entend depuis un moment sur toutes les tribunes, particulièrement à Radio-Canada. Et malgré leurs précisions et leurs professions de foi remplies d'humilité[2], mon impression est que les auteurs se sont autoproclamés Grands Timoniers du Printemps Érable. La préface du livre est la plus évocatrice et la plus ridicule dans sa glorification du travail des archontes de l'ASSÉ. Le reste: des lieux communs, pour la plupart, et beaucoup d'interprétations peu rigoureuses[3]. Mais je passe rapidement sur la critique du livre en question. Je préfère vous renvoyer à un commentaire féministe de l'ouvrage, écrit par plusieurs militantes: j'appuie celui-ci en grande partie et je vous encourage à le lire sur jesuisféministe.com ou sur le blogue de Pwel. J'appuie aussi l'action qui a été posée par ces mêmes militantes le jour du lancement, le 22 mars dernier. Il paraît que ça a mis Écosociété en furie que des femmes se présentent avec une bannière et des tracts critiques. Tant mieux.
Sans écarter nécessairement le discours tenu par les auteurs de De l'école à la Rue, je vais me concentrer sur ce que je perçois de l'argumentation qui accompagne les commentaires généraux sur la militance et le rôle prétendument central de quelques individus dans le mouvement de contestation du Printemps 2012.
Parce que ce qui m'énerve vraiment, c'est l'incapacité de plusieurs à se rendre compte de leur propre impuissance, de leur profonde insignifiance dans un mouvement qui les dépasse.
Je ne remets pas totalement en question l'importance de la militance et de la « tactique » dans la mobilisation. Mais le fait est que oui, il y a eu de la spontanéité dans le mouvement du printemps dernier, et une grande multiplicité. Cinquante ans après la fin du règne de la « peur multiforme »: la révolte multiforme.
La grève ne s'est de plus pas tant construite sur des années de mobilisation, sur du tractage massif, sur des kiosques dans tous les cégeps, que sur la base de la réaction face au grand choc que constituait le fameux 1625$, et ensuite le projet de loi 78. Ça, je n'en démordrai pas. Il est vrai que je n'ai assisté à aucun congrès de la CLASSE et que j'ai pour ainsi dire été pratiquement invisible pendant tout le printemps 2012 (malgré mon activité réelle et quotidienne). Je n'ai représenté personne, j'ai foxé mes AG, j'ai eu un comportement atypique, erratique, voire désagréable et particulièrement indépendant pour un activiste ordinaire. Mais cela ne me donne pas un très gros handicap en tant qu'observateur, je le crois fermement.
Peut-être, ça oui, que la CLASSE a surfé sur une vague. Mais sous-entendre que ses stratèges sont responsables de la mobilisation initiale, c'est d'une grande naïveté et d'une arrogance sans bornes. Suggérer, seulement, que quelqu'un avait le contrôle sur ce qui s'est passé est également d'une grande inconscience. Et affirmer ensuite que la base a dépassé le sommet (on parle «d'appropriation du discours» dans De l'école à la rue[4]) ne parvient pas à nuancer les exagérations courantes à ce sujet. Les choses ne se contrôlent pas; elles arrivent, un point c'est tout, et au milieu de l'immense tas de participations individuelles, la CLASSE et son conseil exécutif n'étaient qu'une pièce de l'engrenage.
J'entendais souvent des militant-e-s, en 2012, faire référence à l'échec de la grève de 2007, et avertir le troupeau contre des erreurs stratégiques qui auraient pu nous être fatales et qui nous ont supposément coûté un printemps hâtif, voilà cinq ans. Ben oui, pourquoi on a perdu nos votes de grève en 2007 déjà?
Parce que la hausse était pas assez élevée. Parce qu'on était pas en crise économique. Parce que la réponse de l'État n'a pas été aussi ridiculement radicale. Parce. que. le. contexte.
En histoire sociale et culturelle, le rôle des grands hommes politiques, comme se plaît à les appeler Mathieu Bock-Côté, est dilué. Ce n'est pas pour rien: si on se rend compte que dans certaines circonstances, des leaders musclé-e-s parviennent par eux-mêmes à influencer le cours de l'histoire, il n'en reste pas moins que les sociétés humaines constituent un fleuve impossible à harnacher convenablement. Les gens sont guidés par les normes, par leur personnalité, leur expérience individuelle, ce qu'ils perçoivent comme leurs intérêts immédiats, et caetera, bien plus que par une discussion avec un-e mobbeur/mobbeuse, par un discours enflammé, ou par la beauté d'un sex-symbol. Et cela est d'autant plus vrai à cette époque d'éclatement des médias et des influences, maintenant qu'on n'a plus les yeux rivés vers le discours unique de la télé ou de la propagande universelle de l'Église. En un éclair, une rumeur née à Montréal se répand à Chicoutimi. Un embryon d'idée n'a plus besoin de passer par les canaux ordinaires et la hiérarchie avant d'être approfondie et mise en pratique. Avec les avantages et les désavantages que ça porte.
Je me doute aussi des raisons qui ont motivé le fait de tant parler de tactiques (ou plutôt de tacticiens) et si peu de logistique, un élément qui est pourtant de loin plus important à mon sens. Ce choix de vocabulaire n'est pas innocent. J'y vois, entre autres choses, une dichotomie malsaine liée aux rôles genrés: les tactiques ou, exprimons-nous plus clairement, la supervision est traditionnellement un rôle masculin, alors que la logistique est davantage associée aux femmes, et c'est le cas à l'ASSÉ depuis une éternité, malgré ses positions féministes. Je ne pense pas être le premier à le dire. On ignore l'importance de la logistique comme on sous-estime l'importance d'autres secteurs traditionnellement associés aux femmes, comme les soins infirmiers, au profit des secteurs d'encadrement.
Bien franchement d'ailleurs, les tactiques je m'en crisse. Ces dernières changent selon le contexte, et quelque soit la force de la directive, elles peuvent être défiées ou mal appliquées, même à l'insu des dirigeant-e-s. Mais quand tu veux trouver un autobus pour te rendre à Victoriaville, il y a toujours un prix, un nombre de kilomètres, et un numéro de téléphone pour la réservation.
La grève, ce n'était pas Austerlitz ou Waterloo. Les contestataires ont pour la plupart avancé dans une confusion totale, par essai-erreur - et cela d'ailleurs ne me déplaisait pas. Il y avait bien un squelette, une structure avec trois ou quatre membres, avec cinq doigts ordinaires et symétriques sur chaque main qui décidait des dates des grandes manifs: mais cette image aux rayons-X était une illusion. Dans la chair du mouvement, il y avait réellement cent mille yeux, dix mille tentacules.
Nous passerons des décennies à extrapoler (modérément quand même, étant donné que le recul risque fort de nous permettre de relativiser l'importance historique du printemps dernier) sur les causes et conséquences de 2012, à soupeser l'importance ou l'insignifiance de certains facteurs, et surtout à ne rien y comprendre. Parce qu'il n'y avait pas de petit Napoléon, de régiments en ordre de bataille et scrupuleusement obéissants, et encore moins de colline à partir de laquelle on pouvait tout observer. Chacun, chacune a fait des choix tactiques. Chacun, chacune a possédé le potentiel d'un facteur déterminant.
________________
[1] J'ai terminé la lecture, mais je devrais m'attarder davantage sur certains passages, je l'admets.
[2] Je me souviens de les avoir entendu spécifier que non, le livre ne visait pas à mettre des individus de l'avant, et que non, l'objectif n'était pas de créer une Bible de la contestation.
[3] Par exemple, on pense que c'est « l'incapacité à pouvoir rivaliser avec les arguments des représentantes et des représentants du mouvement étudiant » qui est la cause principale du déclin du MÉSRQ (p. 159). C'est à la fois présomptueux et peu probable qu'un ou deux débats télévisés aient pu à ce point provoquer l'impopularité des carrés verts.
[4] p. 138.
Sans écarter nécessairement le discours tenu par les auteurs de De l'école à la Rue, je vais me concentrer sur ce que je perçois de l'argumentation qui accompagne les commentaires généraux sur la militance et le rôle prétendument central de quelques individus dans le mouvement de contestation du Printemps 2012.
Parce que ce qui m'énerve vraiment, c'est l'incapacité de plusieurs à se rendre compte de leur propre impuissance, de leur profonde insignifiance dans un mouvement qui les dépasse.
Je ne remets pas totalement en question l'importance de la militance et de la « tactique » dans la mobilisation. Mais le fait est que oui, il y a eu de la spontanéité dans le mouvement du printemps dernier, et une grande multiplicité. Cinquante ans après la fin du règne de la « peur multiforme »: la révolte multiforme.
La grève ne s'est de plus pas tant construite sur des années de mobilisation, sur du tractage massif, sur des kiosques dans tous les cégeps, que sur la base de la réaction face au grand choc que constituait le fameux 1625$, et ensuite le projet de loi 78. Ça, je n'en démordrai pas. Il est vrai que je n'ai assisté à aucun congrès de la CLASSE et que j'ai pour ainsi dire été pratiquement invisible pendant tout le printemps 2012 (malgré mon activité réelle et quotidienne). Je n'ai représenté personne, j'ai foxé mes AG, j'ai eu un comportement atypique, erratique, voire désagréable et particulièrement indépendant pour un activiste ordinaire. Mais cela ne me donne pas un très gros handicap en tant qu'observateur, je le crois fermement.
Peut-être, ça oui, que la CLASSE a surfé sur une vague. Mais sous-entendre que ses stratèges sont responsables de la mobilisation initiale, c'est d'une grande naïveté et d'une arrogance sans bornes. Suggérer, seulement, que quelqu'un avait le contrôle sur ce qui s'est passé est également d'une grande inconscience. Et affirmer ensuite que la base a dépassé le sommet (on parle «d'appropriation du discours» dans De l'école à la rue[4]) ne parvient pas à nuancer les exagérations courantes à ce sujet. Les choses ne se contrôlent pas; elles arrivent, un point c'est tout, et au milieu de l'immense tas de participations individuelles, la CLASSE et son conseil exécutif n'étaient qu'une pièce de l'engrenage.
J'entendais souvent des militant-e-s, en 2012, faire référence à l'échec de la grève de 2007, et avertir le troupeau contre des erreurs stratégiques qui auraient pu nous être fatales et qui nous ont supposément coûté un printemps hâtif, voilà cinq ans. Ben oui, pourquoi on a perdu nos votes de grève en 2007 déjà?
Parce que la hausse était pas assez élevée. Parce qu'on était pas en crise économique. Parce que la réponse de l'État n'a pas été aussi ridiculement radicale. Parce. que. le. contexte.
En histoire sociale et culturelle, le rôle des grands hommes politiques, comme se plaît à les appeler Mathieu Bock-Côté, est dilué. Ce n'est pas pour rien: si on se rend compte que dans certaines circonstances, des leaders musclé-e-s parviennent par eux-mêmes à influencer le cours de l'histoire, il n'en reste pas moins que les sociétés humaines constituent un fleuve impossible à harnacher convenablement. Les gens sont guidés par les normes, par leur personnalité, leur expérience individuelle, ce qu'ils perçoivent comme leurs intérêts immédiats, et caetera, bien plus que par une discussion avec un-e mobbeur/mobbeuse, par un discours enflammé, ou par la beauté d'un sex-symbol. Et cela est d'autant plus vrai à cette époque d'éclatement des médias et des influences, maintenant qu'on n'a plus les yeux rivés vers le discours unique de la télé ou de la propagande universelle de l'Église. En un éclair, une rumeur née à Montréal se répand à Chicoutimi. Un embryon d'idée n'a plus besoin de passer par les canaux ordinaires et la hiérarchie avant d'être approfondie et mise en pratique. Avec les avantages et les désavantages que ça porte.
Je me doute aussi des raisons qui ont motivé le fait de tant parler de tactiques (ou plutôt de tacticiens) et si peu de logistique, un élément qui est pourtant de loin plus important à mon sens. Ce choix de vocabulaire n'est pas innocent. J'y vois, entre autres choses, une dichotomie malsaine liée aux rôles genrés: les tactiques ou, exprimons-nous plus clairement, la supervision est traditionnellement un rôle masculin, alors que la logistique est davantage associée aux femmes, et c'est le cas à l'ASSÉ depuis une éternité, malgré ses positions féministes. Je ne pense pas être le premier à le dire. On ignore l'importance de la logistique comme on sous-estime l'importance d'autres secteurs traditionnellement associés aux femmes, comme les soins infirmiers, au profit des secteurs d'encadrement.
Bien franchement d'ailleurs, les tactiques je m'en crisse. Ces dernières changent selon le contexte, et quelque soit la force de la directive, elles peuvent être défiées ou mal appliquées, même à l'insu des dirigeant-e-s. Mais quand tu veux trouver un autobus pour te rendre à Victoriaville, il y a toujours un prix, un nombre de kilomètres, et un numéro de téléphone pour la réservation.
La grève, ce n'était pas Austerlitz ou Waterloo. Les contestataires ont pour la plupart avancé dans une confusion totale, par essai-erreur - et cela d'ailleurs ne me déplaisait pas. Il y avait bien un squelette, une structure avec trois ou quatre membres, avec cinq doigts ordinaires et symétriques sur chaque main qui décidait des dates des grandes manifs: mais cette image aux rayons-X était une illusion. Dans la chair du mouvement, il y avait réellement cent mille yeux, dix mille tentacules.
Nous passerons des décennies à extrapoler (modérément quand même, étant donné que le recul risque fort de nous permettre de relativiser l'importance historique du printemps dernier) sur les causes et conséquences de 2012, à soupeser l'importance ou l'insignifiance de certains facteurs, et surtout à ne rien y comprendre. Parce qu'il n'y avait pas de petit Napoléon, de régiments en ordre de bataille et scrupuleusement obéissants, et encore moins de colline à partir de laquelle on pouvait tout observer. Chacun, chacune a fait des choix tactiques. Chacun, chacune a possédé le potentiel d'un facteur déterminant.
________________
[1] J'ai terminé la lecture, mais je devrais m'attarder davantage sur certains passages, je l'admets.
[2] Je me souviens de les avoir entendu spécifier que non, le livre ne visait pas à mettre des individus de l'avant, et que non, l'objectif n'était pas de créer une Bible de la contestation.
[3] Par exemple, on pense que c'est « l'incapacité à pouvoir rivaliser avec les arguments des représentantes et des représentants du mouvement étudiant » qui est la cause principale du déclin du MÉSRQ (p. 159). C'est à la fois présomptueux et peu probable qu'un ou deux débats télévisés aient pu à ce point provoquer l'impopularité des carrés verts.
[4] p. 138.
Libellules :
gauche,
grève étudiante,
Que-sont-mes-amis-devenus
jeudi 28 mars 2013
Alex Hundert est sorti!
Après avoir passé des mois en prison et des semaines au trou, Alex Hundert est enfin dehors.
Vous pouvez lire des détails sur son blogue, qui raconte l'oppression subie par lui et ses co-détenus pendant son incarcération.
Mort à la prison!
Vous pouvez lire des détails sur son blogue, qui raconte l'oppression subie par lui et ses co-détenus pendant son incarcération.
Mort à la prison!
samedi 23 mars 2013
Sur certains « droits ».
On nous rappelle maintenant assez souvent un droit prétendument inaliénable de libre-circulation (en voiture en plein centre-ville de Montréal), qu'on oppose au droit d'assemblée pacifique, qui lui est garanti directement par la Charte.
Or, la principale cause de bouchons de circulation restera toujours (et même en cas de manifestation) la présence d'un trop grand nombre de voitures sur la route. En bref, les automobilistes violent eux-mêmes leur sacro-saint "droit de circuler librement". Sans l'irresponsabilité de plusieurs, qui utilisent le centre-ville comme une autoroute pour absolument aucune bonne raison, il n'y aurait jamais, jamais de bouchon monstre.
J'en ai assez d'entendre cet argument de gros lard stupide. Comme le disait une publicité il y a pas longtemps: « You are not stuck in traffic. You are traffic. »
Et puis d'ailleurs, je dois traverser la rue Jarry et le Boulevard Crémazie plusieurs fois par semaine. Le bouton d'un des feux de piétons est brisé et j'ai toutes les misères du monde à traverser. Quand notre mobilité réelle (à pieds!) est réduite à cause d'automobilistes agressifs et de structures défaillantes, je pense qu'on peut vraiment parler d'un viol de liberté. La voiture, c'est pas un droit, c'est un privilège dont l'abus est pratiquement généralisé. En revanche, il me semble qu'il n'y a pas de liberté plus intuitive et importante que celle de pouvoir marcher d'un point à un autre en toute sécurité.
Franchement, le délire liberticide de plusieurs me rappelle celui du père de Perceval dans Kaamelott.
***
Selon un article assez mauvais de l'Agence QMI, le SPVM, en violant la liberté de manifester, dit répondre en fait aux demandes du public. Quel public, ça on saura jamais, mais on se doute bien que c'est surtout la communauté des affaires.
Eh bien voilà ce qu'un autre public vous demande, chers flics: patrouillez donc avec vos guns dans le cul.
Or, la principale cause de bouchons de circulation restera toujours (et même en cas de manifestation) la présence d'un trop grand nombre de voitures sur la route. En bref, les automobilistes violent eux-mêmes leur sacro-saint "droit de circuler librement". Sans l'irresponsabilité de plusieurs, qui utilisent le centre-ville comme une autoroute pour absolument aucune bonne raison, il n'y aurait jamais, jamais de bouchon monstre.
J'en ai assez d'entendre cet argument de gros lard stupide. Comme le disait une publicité il y a pas longtemps: « You are not stuck in traffic. You are traffic. »
Et puis d'ailleurs, je dois traverser la rue Jarry et le Boulevard Crémazie plusieurs fois par semaine. Le bouton d'un des feux de piétons est brisé et j'ai toutes les misères du monde à traverser. Quand notre mobilité réelle (à pieds!) est réduite à cause d'automobilistes agressifs et de structures défaillantes, je pense qu'on peut vraiment parler d'un viol de liberté. La voiture, c'est pas un droit, c'est un privilège dont l'abus est pratiquement généralisé. En revanche, il me semble qu'il n'y a pas de liberté plus intuitive et importante que celle de pouvoir marcher d'un point à un autre en toute sécurité.
Franchement, le délire liberticide de plusieurs me rappelle celui du père de Perceval dans Kaamelott.
Selon un article assez mauvais de l'Agence QMI, le SPVM, en violant la liberté de manifester, dit répondre en fait aux demandes du public. Quel public, ça on saura jamais, mais on se doute bien que c'est surtout la communauté des affaires.
Eh bien voilà ce qu'un autre public vous demande, chers flics: patrouillez donc avec vos guns dans le cul.
Il y a encore du positif.
En me rendant au Cabaret anarchiste, ce soir, j'ai remarqué, comme nos camarades de la Pointe Libertaire, que des antiautoritaires quelconques avaient frappé un grand coup en dressant une bannière en solidarité avec les évadé-e-s de prison. C'est en même temps un très joli message aux mononcles néo-pétainistes qui nous gouvernent: vous aurez beau marginaliser, criminaliser les rebelles, les empêcher de faire quoi que ce soit publiquement, nos quartiers porteront toujours la signature de la contestation.
Et par ailleurs, le cabaret, qui s'est déroulé cette fois-ci à La Belle Époque, un espace politiquement engagé sur la rue Wellington, fut vraiment formidable. Bravo à tous les participant-e-s!
Et par ailleurs, le cabaret, qui s'est déroulé cette fois-ci à La Belle Époque, un espace politiquement engagé sur la rue Wellington, fut vraiment formidable. Bravo à tous les participant-e-s!
22 mars - Nos vies sont minables
Je me souviens de l'immense fête désordonnée du 22 mars 2012. Il y avait plus de jouissance que de colère ce jour-là. Une preuve sans doute que le plaisir est un moyen de pression parmi tant d'autres. J'ai fait plusieurs grèves étudiantes, mais celle de 2012 est la seule pendant laquelle j'ai refusé de faire autre chose que de m'amuser, et je crois pas avoir mal fait, ni avoir été le seul. Les gens se sont mis tous nus, ils ont organisé des assemblées de quartier, et c'est pas faux non plus de dire que les voisin-e-s ont commencé à se parler.
Les observateurs/trices ont appelé cette ça une crise sociale.
Maintenant, les autorités font tout pour écraser ce qui reste de créativité et de contestation. En ajoutant les arrestations de ce soir, on en arrive à peut-être un total de 500 (je dois cette estimation à une gentille personne) depuis le Sommet sur l'Enculation. On mesure depuis l'étendue de notre défaite. Il y a des mécanismes plus imposants que le seul PLQ qui se sont mis en marche pour nous vaincre ; une vague réellement mondiale de conservatisme et d'autoritarisme, et un facteur souvent mis de côté, qui est la perte de légitimité des pouvoirs civils face au pouvoir policier (exemple: Marc Parent vs Guy Hébert). Nous reviendrons peut-être là-dessus prochainement.
Ce soir, le mouvement a été écrasé comme jamais. Il n'y avait aucun prétexte pour arrêter tout ce monde-là. Et pourtant, ça ne fera pas scandale. La police a attendu patiemment d'avoir la légitimité et l'assentiment - ou du moins, l'indifférence - de la population avant d'appliquer "à la lettre" le règlement municipal P-6, qui interdit pratiquement toute manifestation non-autorisée préalablement. Ces arrestations, elles sont carrément souhaitées par une masse de crétin-e-s. Les faiseurs/euses d'opinion tout d'abord, qui relaient entre autres les plaintes des pauvres "commerçant-e-s" (on parle ici des propriétaires des grands hôtels) quand illes n'appellent pas directement à la violence[1], et une bonne partie des braves et honnêtes payeurs/euses de taxes, à qui c'est déjà arrivé au moins une fois d'être pogné-e-s dix minutes dans le trafic ou qui haïssent d'une haine de larbin tout ce qui pousse à gauche d'Éric Duhaime.
Mais ce n'est pas tout: le SPVM ne s'est pas contenté de prendre des manifestant-e-s en souricière, arrêtant gratuitement des gens absolument sans aucune agressivité. Il a nettoyé les rues environnantes, forçant des gens à rentrer dans des commerces, bloquant des portes et séquestrant quasiment des citoyen-ne-s épouvanté-e-s. Il a déclaré tout être humain persona non grata dans les rues d'une partie du centre-ville. Et cela, sans provocation ni méfait. Dans l'indifférence.
Notre défaite la plus manifeste, c'est celle-là. Je regarde l'avant-2012, et je me rends compte qu'on avait plus de droits à cette époque qu'aujourd'hui. Nous l'aurons payée cher, cette période de bourgeonnement que le gouvernement a qualifiée de crise.
Je suis triste et déjà nostalgique de cette ère qui n'a duré que quelques mois et pendant laquelle je me suis senti en même temps libre et menacé. Je la compare à l'épouvantable grisaille de 2013. Nous marchons à nouveau en rang, et gare à celui ou celle dont le jupon trop floconneux dépasserait! Le gouvernement parlait de crise. Eh bien moi, il me semble que c'est ça que j'appelle une crise: être une machine et aller travailler. Être une machine et étudier des trucs moches. Être une machine et être obligé-e d'être une hostie de machine.
Ce que nous avons vécu l'an dernier, ce n'était pas une crise. C'était sortir de la crise. Pour quelques mois.
_______________
[1] Carl Monette, de Radio-X Montréal, sur la manif du 26 février: "Moi j'taurais passé la gratte là-dedans hier."
Les observateurs/trices ont appelé cette ça une crise sociale.
Maintenant, les autorités font tout pour écraser ce qui reste de créativité et de contestation. En ajoutant les arrestations de ce soir, on en arrive à peut-être un total de 500 (je dois cette estimation à une gentille personne) depuis le Sommet sur l'Enculation. On mesure depuis l'étendue de notre défaite. Il y a des mécanismes plus imposants que le seul PLQ qui se sont mis en marche pour nous vaincre ; une vague réellement mondiale de conservatisme et d'autoritarisme, et un facteur souvent mis de côté, qui est la perte de légitimité des pouvoirs civils face au pouvoir policier (exemple: Marc Parent vs Guy Hébert). Nous reviendrons peut-être là-dessus prochainement.
Ce soir, le mouvement a été écrasé comme jamais. Il n'y avait aucun prétexte pour arrêter tout ce monde-là. Et pourtant, ça ne fera pas scandale. La police a attendu patiemment d'avoir la légitimité et l'assentiment - ou du moins, l'indifférence - de la population avant d'appliquer "à la lettre" le règlement municipal P-6, qui interdit pratiquement toute manifestation non-autorisée préalablement. Ces arrestations, elles sont carrément souhaitées par une masse de crétin-e-s. Les faiseurs/euses d'opinion tout d'abord, qui relaient entre autres les plaintes des pauvres "commerçant-e-s" (on parle ici des propriétaires des grands hôtels) quand illes n'appellent pas directement à la violence[1], et une bonne partie des braves et honnêtes payeurs/euses de taxes, à qui c'est déjà arrivé au moins une fois d'être pogné-e-s dix minutes dans le trafic ou qui haïssent d'une haine de larbin tout ce qui pousse à gauche d'Éric Duhaime.
Mais ce n'est pas tout: le SPVM ne s'est pas contenté de prendre des manifestant-e-s en souricière, arrêtant gratuitement des gens absolument sans aucune agressivité. Il a nettoyé les rues environnantes, forçant des gens à rentrer dans des commerces, bloquant des portes et séquestrant quasiment des citoyen-ne-s épouvanté-e-s. Il a déclaré tout être humain persona non grata dans les rues d'une partie du centre-ville. Et cela, sans provocation ni méfait. Dans l'indifférence.
Notre défaite la plus manifeste, c'est celle-là. Je regarde l'avant-2012, et je me rends compte qu'on avait plus de droits à cette époque qu'aujourd'hui. Nous l'aurons payée cher, cette période de bourgeonnement que le gouvernement a qualifiée de crise.
Je suis triste et déjà nostalgique de cette ère qui n'a duré que quelques mois et pendant laquelle je me suis senti en même temps libre et menacé. Je la compare à l'épouvantable grisaille de 2013. Nous marchons à nouveau en rang, et gare à celui ou celle dont le jupon trop floconneux dépasserait! Le gouvernement parlait de crise. Eh bien moi, il me semble que c'est ça que j'appelle une crise: être une machine et aller travailler. Être une machine et étudier des trucs moches. Être une machine et être obligé-e d'être une hostie de machine.
Ce que nous avons vécu l'an dernier, ce n'était pas une crise. C'était sortir de la crise. Pour quelques mois.
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[1] Carl Monette, de Radio-X Montréal, sur la manif du 26 février: "Moi j'taurais passé la gratte là-dedans hier."
Libellules :
brutalité policière,
grève étudiante,
manifestation
mercredi 20 mars 2013
Les délires homophobes de Radio-Pirate.
Pendant que des manifestant-e-s qui n'ont rien fait de mal se font arrêter sous les applaudissements des chroniqueurs/euses et commerçant-e-s qui s'inquiètent pour le chiffre d'affaires des grands hôtels, la campagne de publicité du gouvernement contre l'homophobie provoque des réactions d'une violence verbale inouïe. La droite n'a aucun problème avec les dépenses en répression et un État qui investit massivement dans le viol de nos droits et libertés, mais elle refuse que «ses taxes» servent à financer la lutte contre la discrimination.
Jeff Fillion, qui anime toujours à sa station de web-radio, a plongé dans un délire haineux encore plus profond. J'ai cru en premier lieu que ses déclarations dérangeantes - et dignes d'un dérangé - avaient passé inaperçues, mais elles ont finalement été ridiculisées par les animateurs de « La soirée est encore jeune » vendredi dernier.
J'aurais aimé en faire une analyse fermement dénonciatrice, mais je pense que le résumé, accompagné de plusieurs citations, suffira. Notez que je n'ai pas tout mis, même si ça peut sembler difficile à croire.
Les deux extraits sont disponibles sur RadioEGO.com. Le premier est celui qui va le plus loin dans la haine et daterait du 7 mars dernier.
Je résume les propos:
- Fillion et sa bande trouvent que deux gars qui s'embrassent, c'est dégueulasse, même si en théorie ils « n'ont rien contre l'homosexualité ».
- Il affirme qu'on parle trop d'intimidation en public, que c'est devenu une frénésie, que tout le monde a quelque chose de laquelle on peut rire et qu'on ne devrait alors pas faire grand cas de cela.
- Fillion tombe dans les stéréotypes: il parle des gays qui travaillent dans des boutiques de vêtements et qui ont des voix féminines comme étant une règle absolue.
- Lui et ses co-animateurs disent que les homosexuel-le-s sont des cas « exceptionnels » et ne représentent que 2-3% de la population. Cet argument revient à quelques reprises. « Ça reste dans la marginalité de la population », parvient à articuler un de ces singes savants.
- Il prétend à quelques reprises que « l'homosexualité n'est pas comme l'hétérosexualité », refusant de mettre sur un pied d'égalité le couple gay du couple hétéro. Il affirme d'ailleurs que les gays qui se marient veulent juste des avantages fiscaux, alors que dans son couple, c'est la famille et les « valeurs » qui sont importantes.
- Il est frustré à l'avance de devoir expliquer à sa fille ce qu'est l'homosexualité. C'est un argument qui est repris par la suite. Sous-entendu: le gouvernement viole leur liberté de choisir le moment où ils répondront enfin aux questions de leurs enfants sur l'homosexualité.
- « Les enfants ont pas à affronter des hommes avec des pinchs qui se frenchent. » Suivi d'un classique « dans mon temps, ça se passait pas de même. »
- Fillion affirme faire son coming out d'homophobe: « Chus limite! Chus juste sur le bord ! »
- « Que quelqu'un qui par choix ou parce qu'il est né de même [...] »
- Fillion ne peut pas contrôler son dégoût envers les homosexuels: « On contrôle pas ça. Ça nous écoeure. »
- Il s'attaque ensuite à Jasmin Roy. « Jasmin Roy, qui représente tout ce qui nous énerve. » « Il se sert de son homosexualité pour devenir victime de toute, là. »
- L'animateur avertit ensuite le gouvernement. « Vous allez reculer. » « Les gens vont avoir un ras-le-bol, un trop-plein. » « Laissez-nous tranquilles avec les gars qui se frenchent. »
- On lit une lettre d'auditeur pendant l'émission: « une phobie c'est une peur. Trouver que quelque chose est anormal n'est pas une peur. Une peur est souvent causée par une ignorance. Ce qui n'est pas le cas de l'homophobie. On sait c'est quoi. Et ça nous fait pas peur. De plus évolutionnellement parlant il n'est pas normal qu'une espèce développe un comportement qui ne favorise pas la survie de cette espèce. Si tout le monde était homo, l'espèce s'éteindrait en moins de 120 ans. »
- Jeff en rajoute: « J'ai un côté rationnel. [...] Quand on utilise le rationnel, ben, effectivement, on est obligés de dire que... oui on l'accepte, mais ya un boutte... ça marche pas! Rationnellement! »
Par la suite, Jeff et ses co-animateurs tombent dans une digression raciste, dans laquelle ils s'accordent pour dire qu'un mécanicien noir ou « taliban » est moins attirant qu'un mécanicien blanc. Mais ils reviennent rapidement au sujet du jour.
- « Comme société, nous n'avons pas à payer à heure de grande écoute pour voir des hommes qui s'embrassent. »
Mais ça ne dure pas longtemps. Fillion décide de s'attaquer à d'autres déviances, dont le « naturalisme » (sic). « On s'entend-tu que ça, c'est de la maladie mentale. ok, on va se le dire. Je veux pas vous empêcher d'y aller, je veux pas vous crisser en prison, mais moi, si un de mes amis me dit là, que si lui il veut passer deux semaines, les semaines de la construction dans un village nudiste, avec ses enfants, ben crisse, il est pu mon chum. [...] Mon numéro de téléphone tu l'as pu, t'as pu mon e-mail, t'es pu sur mon Facebook, décrisse. »
Même si Fillion a affirmé qu'il ne recommandait pas la prison pour ces malades-là, L'extrait se termine sur cette touche:
Le pire c'est qu'il se lance entretemps dans une tirade sur la liberté, défendue selon lui par la droite et les « pirates »: « Les gens de droite, beaucoup les pirates, on veut de plus en plus de libertés individuelles. » Ben oui, c'est ça.
Dans un deuxième extrait plus récent, qui date peut-être d'hier, il s'attaque à l'homosexualité présumé du hockeyeur Josh Gorges. Tout l'extrait tourne autour de remarques homophobes à caractère sexuel. Les animateurs parodient la voix d'homosexuels stéréotypés, parlent de sodomie, se moquent de Price et suggèrent en blague que ses mauvaises performances seraient reliées à son homosexualité:
« Peut-être que Price a besoin de boules chinoises pour performer. ». Les animateurs imitent des hommes qui halètent lors d'un acte sexuel, et font des propositions parodiques qu'ils attribuent au conjoint présumé de Gorges, du style:
« Mets juste tes culottes, et mets des talons hauts. »
« Garde ton gant de hockey pour me masturber. »
« Enlève ta visière [...] Mèq t'arrives, j'vas te licher partout... »
C'est pas compliqué, en bref: les animateurs de Radio-Pirate, surtout Fillion, se livrent à des actions de harcèlement envers des personnes (nommées!) et encouragent la haine.
Jeff Fillion, qui anime toujours à sa station de web-radio, a plongé dans un délire haineux encore plus profond. J'ai cru en premier lieu que ses déclarations dérangeantes - et dignes d'un dérangé - avaient passé inaperçues, mais elles ont finalement été ridiculisées par les animateurs de « La soirée est encore jeune » vendredi dernier.
J'aurais aimé en faire une analyse fermement dénonciatrice, mais je pense que le résumé, accompagné de plusieurs citations, suffira. Notez que je n'ai pas tout mis, même si ça peut sembler difficile à croire.
Les deux extraits sont disponibles sur RadioEGO.com. Le premier est celui qui va le plus loin dans la haine et daterait du 7 mars dernier.
Je résume les propos:
- Fillion et sa bande trouvent que deux gars qui s'embrassent, c'est dégueulasse, même si en théorie ils « n'ont rien contre l'homosexualité ».
- Il affirme qu'on parle trop d'intimidation en public, que c'est devenu une frénésie, que tout le monde a quelque chose de laquelle on peut rire et qu'on ne devrait alors pas faire grand cas de cela.
- Fillion tombe dans les stéréotypes: il parle des gays qui travaillent dans des boutiques de vêtements et qui ont des voix féminines comme étant une règle absolue.
- Lui et ses co-animateurs disent que les homosexuel-le-s sont des cas « exceptionnels » et ne représentent que 2-3% de la population. Cet argument revient à quelques reprises. « Ça reste dans la marginalité de la population », parvient à articuler un de ces singes savants.
- Il prétend à quelques reprises que « l'homosexualité n'est pas comme l'hétérosexualité », refusant de mettre sur un pied d'égalité le couple gay du couple hétéro. Il affirme d'ailleurs que les gays qui se marient veulent juste des avantages fiscaux, alors que dans son couple, c'est la famille et les « valeurs » qui sont importantes.
- Il est frustré à l'avance de devoir expliquer à sa fille ce qu'est l'homosexualité. C'est un argument qui est repris par la suite. Sous-entendu: le gouvernement viole leur liberté de choisir le moment où ils répondront enfin aux questions de leurs enfants sur l'homosexualité.
- « Les enfants ont pas à affronter des hommes avec des pinchs qui se frenchent. » Suivi d'un classique « dans mon temps, ça se passait pas de même. »
- Fillion affirme faire son coming out d'homophobe: « Chus limite! Chus juste sur le bord ! »
- « Que quelqu'un qui par choix ou parce qu'il est né de même [...] »
- Fillion ne peut pas contrôler son dégoût envers les homosexuels: « On contrôle pas ça. Ça nous écoeure. »
- Il s'attaque ensuite à Jasmin Roy. « Jasmin Roy, qui représente tout ce qui nous énerve. » « Il se sert de son homosexualité pour devenir victime de toute, là. »
- L'animateur avertit ensuite le gouvernement. « Vous allez reculer. » « Les gens vont avoir un ras-le-bol, un trop-plein. » « Laissez-nous tranquilles avec les gars qui se frenchent. »
- On lit une lettre d'auditeur pendant l'émission: « une phobie c'est une peur. Trouver que quelque chose est anormal n'est pas une peur. Une peur est souvent causée par une ignorance. Ce qui n'est pas le cas de l'homophobie. On sait c'est quoi. Et ça nous fait pas peur. De plus évolutionnellement parlant il n'est pas normal qu'une espèce développe un comportement qui ne favorise pas la survie de cette espèce. Si tout le monde était homo, l'espèce s'éteindrait en moins de 120 ans. »
- Jeff en rajoute: « J'ai un côté rationnel. [...] Quand on utilise le rationnel, ben, effectivement, on est obligés de dire que... oui on l'accepte, mais ya un boutte... ça marche pas! Rationnellement! »
Par la suite, Jeff et ses co-animateurs tombent dans une digression raciste, dans laquelle ils s'accordent pour dire qu'un mécanicien noir ou « taliban » est moins attirant qu'un mécanicien blanc. Mais ils reviennent rapidement au sujet du jour.
- « Comme société, nous n'avons pas à payer à heure de grande écoute pour voir des hommes qui s'embrassent. »
Mais ça ne dure pas longtemps. Fillion décide de s'attaquer à d'autres déviances, dont le « naturalisme » (sic). « On s'entend-tu que ça, c'est de la maladie mentale. ok, on va se le dire. Je veux pas vous empêcher d'y aller, je veux pas vous crisser en prison, mais moi, si un de mes amis me dit là, que si lui il veut passer deux semaines, les semaines de la construction dans un village nudiste, avec ses enfants, ben crisse, il est pu mon chum. [...] Mon numéro de téléphone tu l'as pu, t'as pu mon e-mail, t'es pu sur mon Facebook, décrisse. »
Même si Fillion a affirmé qu'il ne recommandait pas la prison pour ces malades-là, L'extrait se termine sur cette touche:
« J'me dis ouin, c'est déviant, mais chacun ses déviances...
Mais non crisse, d'après le dessin du gouvernement [des pancartes routières] y'amènent leurs enfants!
Câlissez-moi ça en prison ce monde-là! Y'amènent leurs enfants! [...] Mais le
gouvernement, c'est la tolérance et l'ouverture. C'est tu beau hein? »
Le pire c'est qu'il se lance entretemps dans une tirade sur la liberté, défendue selon lui par la droite et les « pirates »: « Les gens de droite, beaucoup les pirates, on veut de plus en plus de libertés individuelles. » Ben oui, c'est ça.
Dans un deuxième extrait plus récent, qui date peut-être d'hier, il s'attaque à l'homosexualité présumé du hockeyeur Josh Gorges. Tout l'extrait tourne autour de remarques homophobes à caractère sexuel. Les animateurs parodient la voix d'homosexuels stéréotypés, parlent de sodomie, se moquent de Price et suggèrent en blague que ses mauvaises performances seraient reliées à son homosexualité:
« Peut-être que Price a besoin de boules chinoises pour performer. ». Les animateurs imitent des hommes qui halètent lors d'un acte sexuel, et font des propositions parodiques qu'ils attribuent au conjoint présumé de Gorges, du style:
« Mets juste tes culottes, et mets des talons hauts. »
« Garde ton gant de hockey pour me masturber. »
« Enlève ta visière [...] Mèq t'arrives, j'vas te licher partout... »
C'est pas compliqué, en bref: les animateurs de Radio-Pirate, surtout Fillion, se livrent à des actions de harcèlement envers des personnes (nommées!) et encouragent la haine.
dimanche 3 mars 2013
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