Pendant la dernière manifestation du COBP, des centaines de personnes ont été détenues dans des conditions indécentes et mises à l'amende pour des crimes en grande partie imaginaires. Des personnes impliquées à l'ASSÉ et au PCR ont également été arrêtées et accusées de crimes après des actions qui, somme toute, ne sortent pas de l'ordinaire de l'activisme réformiste (surtout en ce qui concerne l'affaire des militant-e-s de l'ASSÉ), sinon de la légitime défense.
La réaction de la population, guidée par des leaders d'opinion en général mal informés, n'a été d'aucune sympathie pour les victimes de la répression. Et même si on sent une colère sourde chez certain-e-s citoyen-ne-s, il se trouve des gens pour défendre les acteurs d'un meurtre gratuit. Amusante, n'est-ce pas, cette servilité absolue? D'autant plus que parallèlement à la baisse du crime, il y a malgré tout une augmentation du recours aux armes chez les policiers[1], largement justifiée par nos élites. À quelle nouvelle menace de violence la police doit-elle faire face? Le public ne le sait pas trop, mais on lui a montré à haïr tous les criminel-le-s. Et pour beaucoup, la violence des constables n'est pas de la vraie violence.
La vraie violence, c'est évidemment les agressions sur des personnes, les menaces, l'intimidation, etc. L'exemple de violence le plus présent dans l'imaginaire populaire est sans aucun doute la violence conjugale. Mais un autre type de violence marque davantage plusieurs langues sales: la violence contestatrice de gauche. Celle que subissent prétendument plusieurs citoyen-ne-s "pris en otage" par des grévistes qui bloquent une rue ou l'accès à un édifice, ou dont le quotidien est atteint par des actions politiques de la gauche.
En revanche, des campagnes comme "Honk a cyclist", autant dangereuses que haineuses, ne sont pas considérées comme de la violence par ces mêmes penseurs à l'esprit tordu. Pourtant, il semble y avoir des conséquences variées et très désagréables, comme en témoigne un cycliste: «Il a baissé sa vitre, s'est mis à me crier des bêtises et s'est collé contre le trottoir. Il m'a accroché avec son rétroviseur [...]»
Il y a quelques années, un anglophone d'Outremont m'a engueulé et menacé assez gratuitement juste en face d'une boulangerie dont je regardais les produits en vitrine. Quand je lui ai demandé les raisons de son pétage de coche, il m'a répondu que "tous les Québécois-es sont racistes". Or, quelques jours auparavant, toute la presse anglophone du Canada avait débuté une campagne haineuse contre les Québécois-es, suggérant presque que le racisme était congénital chez "nous". Le débile léger en question n'avait fait que répéter les arguments pauvres et idiots des chroniqueurs/euses réactionnaires du Financial Post.
Et on apprend récemment qu'un blogueur a débuté une campagne haineuse contre Kia. Je déteste l'entreprise, comme toutes les autres grosses business, mais dans ce cas-ci, l'histoire qui a déclenché le scandale est une affaire de vengeance personnelle. Comme dans toutes les autres campagnes de haine, le public a été manipulé par des gens sans vergogne afin de servir d'outils dans leurs power trips, alors même que le problème semblait déjà résolu.
On ne parle pas ici de dénoncer une série de crimes sordides, de défendre une grande cause, ou de tenter de démantibuler une autorité illégitime: il s'agit d'instrumentaliser, grâce justement à l'autorité que se confère une personnalité influente ou du moins populaire, un troupeau servile. Dans son debriefing de mission, il commente: "La contre-attaque de l’armée de trolls fut terrible." Son armée de trolls...
En effet. On apprend quelques jours plus tard que le concessionnaire en question n'a pas été que harcelé: il a tout simplement été incendié.
Alors donc: est-ce qu'une vitrine qui se casse par accident lors d'une occupation, c'est vraiment de la violence? Est-ce qu'une campagne haineuse et surtout personnelle est moins violente? Est-ce qu'on ne fait pas un peu d'extrapolation quand on dépeint la gauche comme exceptionnellement violente (au point où les anars ont une escouade dédiée à les contrôler), alors que des médias reconnus (accessoirement de droite) et des personnalités se lancent dans des campagnes haineuses dont les effets sont extrêmement épeurants?
Il y a une différence immense même entre les actes radicaux d'une poignée de militant-e-s d'extrême-gauche et ceux des mass médias ou autres imbéciles heureux. Après que Résistance Internationaliste ait fait exploser une bombe dans un bureau de l'armée à Trois-Rivières, il y a environ un an, un manifeste a été publié et les actions du groupe se sont arrêtées là. Quand les gens des collectifs Ton Père, Ton Oncle et Ton Chien ont commis divers actes de vandalisme mineurs, après publication des manifestes, les actions ont cessé, l'objectif ayant été atteint. La limite était tracée, même dans l'esprit de ces "extrémistes"! Je trouve passablement irresponsable le fait de jouer avec des explosifs comme l'ont fait RI, et je n'encouragerais certainement pas d'actions représentant un tel danger. D'un autre côté, c'était là une réponse à une série de meurtres et plusieurs décennies d'oppression dont sont responsables les Forces Canadiennes (oh scusez, je veux dire l'Armée royale).
Dans le cas des campagnes haineuses, les méfaits à l'origine des répliques sont soit imaginaires, soit aussi légers qu'un larcin tout à fait commun. Et surtout, elles sont pilotées par des personnes qui ont un grand pouvoir de diffusion, pas simplement des individus tout à fait anonymes qui cherchent à dénoncer quelque chose ou tenter qu'une quelconque pratique cesse[2]. Enfin, les propagateurs de la haine n'ont absolument aucun contrôle sur le résultat. C'est un cercle qui peut s'agrandir à l'infini parce qu'au lieu d'être centré sur le droit des victimes, il cherche à tout prix des coupables à punir et à ostraciser.
La réponse à ce genre de dangers publics? Je ne crois pas du tout à la création d'un éventuel GAD (Guet des Activités Douchebags) qui aurait pour mission de surveiller un certain meneur et ses trolls.
______
[1] Le "paramilitaire" Yves Francoeur répond que si la criminalité globale est en baisse, le taux de crimes violents est cependant en hausse au Québec. Mais une fois qu'on décortique un peu plus les données, on se rend compte que les cas d'agressions graves (comme les meurtres et tentatives de meurtres, qui nécessiteraient selon la police une intervention plus féroce et donc l'utilisation d'armes) ne sont pas en hausse, au contraire: «Montréal et ses environs ont enregistré 49 meurtres pour l'année 2010. Dans les années antérieures, le nombre d'homicides pouvait atteindre 90 et plus, note Marc Ouimet. C'est une diminution de plus de 50 % depuis les 20 dernières années», observe-t-il.» En bref, les policiers ne sortent pas leurs armes pour régler une affaire de violence conjugale, mais des menottes. C'est donc d'autant plus paradoxal qu'un double-meurtre comme celui de Hamel et Limoges conduise non pas à faire tomber les oppresseurs en disgrâce, mais bien leur permette de porter plus d'armes.
[2] Donc c'est évident que je suis en faveur d'une dénonciation large de tout ce qui peut être injuste. C'est évident que je suis en faveur de la plupart des actions directes posées par les mouvements sociaux (avec de notables exceptions), même si j'ai horreur des dérapages. Il y a cependant une différence de méthode entre séduire des idiot-e-s et provoquer la réflexion.
jeudi 1 septembre 2011
Mission: terroriser un vendeur de char.
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Rien à voir avec l'affaire Gecina, mon cher!
RépondreSupprimerEn effet. J'y ai repensé, et je considère que de vouloir protéger la population contre un délateur, c'est pas du tout la même chose que de faire brûler un crosseur.
RépondreSupprimer"Gabriel Roy a néanmoins laissé sur son site Internet le numéro de téléphone du concessionnaire et l'adresse courriel du directeur de ventes, des informations destinées à ses sympathisants, qu'il appelle son « armée de trolls »."
RépondreSupprimerSon erreur est là. Pas avant! Il avait raison de protester contre la retenue de son dépôt! Pour le reste, à ce que je sache, monsieur Roy n'a incité personne à la violence. Et faudra attendre de voir qui a incendié ce concessionnaire.
Si jamais Benoît Gecina cesse ses actions, je retirerai mon billet et s'il ne publie plus sa photo sur Fesse-bouc, je retirerai sa photo.
Bon, au moins, même si tu n'es pas d'accord avec moi, tu fais cette distinction! Très bien.
RépondreSupprimerMais je ne suis pas certain qu'il ait demandé à ses lecteurs de faire brûler ce concessionnaire.
Ceci dit, tu apportes des éléments très intéressants dans ce billet, comme d'habitude!
RépondreSupprimerSi j'avais eu affaire au même problème, j'aurais aussi réagi assez férocement. Ce n'est donc pas du tout contre ça que j'en ai. La dénonciation, et à la limite ce que certain-e-s considèrent comme de la "diffamation", c'est évidemment nécessaire et j'encourage ça.
RépondreSupprimerJ'aurais dû le préciser dans le texte. J'en ai essentiellement contre l'incitation et l'instrumentalisation.
Tout de même, on s'entend que le "honk a cyclist" (qui part sur des faussetés) et l'acharnement de la presse anglophone contre les Québécois sont foutrement ridicules.
RépondreSupprimer"J'aurais dû le préciser dans le texte. J'en ai essentiellement contre l'incitation et l'instrumentalisation. "
Mouain, mais tu l'as bien expliqué dans le reste de ton texte, alors...
http://www.sq.gouv.qc.ca/prevenir-la-criminalite/programmes/bon-voisin-bon-oeil-prevenir-criminalite.jsp
RépondreSupprimerJe n'ai pas tant de problèmes avec cette initiative, mais il semble que certains, dont Môssieu Gecina, vont beaucoup plus loin que ça.