mercredi 31 mars 2010

Paraît qu'il y a des hausses de tarifs.

J'ai lu ça dans la Presse tout à l'heure. Ça m'a accroché, alors je suis parti avec la première page.

dimanche 28 mars 2010

Manifestation contre les hausses de tarifs

Il est très important de participer à cette manifestation qui aura lieu le premier avril. Si vous êtes en colère contre ce gouvernement qui met en péril nos services sociaux les plus essentiels, vous devez être présent-e-s. Plus de 20 000 étudiant-e-s seront en grève ce jour-là pour défendre les intérêts des plus défavorisé-e-s, avec le soutien de la coalition contre la tarification et la privatisation des services publics.

Marcher ce jour-là est capital, car beaucoup dépend de la réussite de cette manifestation. C'est là que nous pourrons établir un rapport de force face au gouvernement. C'est là que nous montrerons ou non que nous sommes nombreux/euses non seulement à être en désaccord (parce que ça, c'est un lieu commun), mais que notre désaccord ne se limite pas à chiâler devant la tv.

Des rumeurs courent sur le budget: ça va faire mal. Or, les coupures dans les services et les hausses de tarifs ne permettront pas de "créer davantage de richesse", ou de contrer l'effet du vieillissement de la population. Elles ne feront que causer davantage de misère.

Jeudi le premier avril, on se retrouve donc tous et toutes à Montréal, au Square Philips, à 13h00.

Si vous souhaitez rejoindre le contingent anticapitaliste, regroupez-vous plutôt au Carré Berri, à 12h00.

samedi 20 mars 2010

La manifestation du Front Commun

Nous étions environ vingt-cinq mille à parader dans les rues du centre-ville, cet après-midi, afin de défendre le secteur public (?) contre les attaques de Jean Charest et de son gouvernement. La manifestation s'est déroulée dans le calme, tel que prévu par les organisateurs/trices syndicaux.

Je dois avouer que je n'ai pas pu m'empêcher de trouver l'exercice humiliant.

Les banderolles des petits syndicats n'étaient pas les bienvenues: il fallait, comme me l'a dit une membre du service d'ordre, tenir un discours "unitaire"... unir tout le monde sous une même bannière et une même couleur (le vert pomme). Les gens qui portaient autre chose que la couleur officielle étaient interpellés: on leur demandait de replier gentiment leurs torchons. Dans l'ordre et la discipline.

Sept-huit anarchistes ont été pris à partie par trois dossards oranges: ils/elles attendaient sur un coin de rue avec leurs drapeaux rouge et noir que la marche démarre. Ce n'était pas une attitude permise: il fallait que les organisations appuyant le Front Commun restent à l'arrière du cortège. Ici, c'était la place des syndiqué-e-s de l'Estrie. "On est pas le premier mai." Un camarade a par accident bloqué l'objectif de mon appareil-photo avec son drapeau à ce moment-là. Cela a eu l'effet heureux de ne cacher que les militant-e-s.

Les gens sont pris pour des cons dans ces manifs de camp de vacances, ces protestations de garderies, durant lesquelles des haut-parleurs crachent des tounes pastichant Passe-Partout. Et dire qu'on s'étonne après que la foule ait l'intelligence d'un enfant de cinq ans.

Je trouve que c'était une mauvaise idée d'imposer une esthétique, avec UNE pancarte et UN drapeau: la manifestation donnait l'impression de n'être qu'un festival corporatiste ordinaire. Normal: c'était un festival corporatiste ordinaire. Mais on aurait pu au moins tenter de le camoufler en distribuant autre chose que des affiches toutes pareilles. Mauvaises relations publiques.

Je me suis fait un peu piéger dans le fatras des idées pas claires énoncées avant la manif: comme d'autres j'ai été le pantin d'un pouvoir syndical en négo. Et non pas un citoyen inquiet de voir les services publics se faire restructurer par la mafia entreprenariale et ministérielle.

Il y a ce gars de Rue Frontenac qui m'a proposé de signer sa pétition. Je lui ai demandé comment les choses se dérouleraient à leur retour au travail, s'il y a lieu. Il m'a répondu que ce serait laid. Je lui ai demandé pourquoi ne décidaient-ils tout simplement pas de laisser faire le Journal de Montréal et de continuer avec Rue Frontenac. Il m'a dit que ce serait trop dur de commencer un nouveau journal. Trop dur. Est-ce plus facile de lutter sans salaire contre les chiens de Québécor? J'ai signé leur pétition malgré tout. Même si leurs articles sont souvent infâmes. Même si bien égoïstement, je préfèrerais pouvoir continuer de lire Rue Frontenac plutôt que de les voir retourner au stade anal dans leur feuille de chou.

Le service d'ordre de la manifestation était plus présent que jamais: il fait maintenant définitivement partie de la culture syndicale. "N'embarquez pas sur le trottoir." "Allez à l'arrière." "Attendez qu'on vous nomme avant de partir." Une policière syndicale a justifié ces mesures en disant que c'était la manifestation du Front commun. Sous-entendu: les citoyen-ne-s non-affilié-e-s sont invité-e-s à participer sous condition. Ils doivent rentrer dans le rang et fermer leur gueule.

Les leaders syndicaux n'aiment pas que le gouvernement divise les syndicats pour régner. Ils préfèrent que cette initiative leur revienne. Les organisateurs/trices avaient donc un beau plan pour la marche: ils ont divisé les gens selon leur région. Puis nous avons marché.

Et quelle marche! Après 500 mètres c'était déjà terminé. En face des bureaux d'Ultramar, une deuxième scène avait été installée, avec deux écrans géants montés sur des grues. J'ai eu le temps de faire l'aller-retour avant que la queue de la marche ne fasse un pas en avant, toujours bloquée sur la place du Canada... et attendant leur tour. À l'heure où j'écris, ils y sont peut-être toujours.

mardi 16 mars 2010

COBP - ceci n'est pas une yeule cassée

Canoë raconte:

"Le SPVM a indiqué que personne n’a été blessé lors de la manifestation, malgré les briques, les pierres et les bouteilles de bière lancées en direction des forces de l’ordre."


Et pourtant:



"personne n’a été blessé [...]"

C'est parce que les sales parasites de jeunes punks ne sont pas des personnes.

COBP - il y a de l'esprit dans les cachots.

Quelques individus, accusé-e-s au criminel, ont été isolé-e-s des autres prisonniers et prisonnières. Un jeune, inquiet, se justifie d'avoir pris part à la manifestation: "Je ne voulais qu'être un peu en rébellion."

Un témoin commente: "Et voilà que tu es un peu en prison."

COBP - la remorque enflammée

Vous avez gaspillé du bois, bande de colons.

lundi 15 mars 2010

COBP - que sont mes amis devenus

Je suis arrivé à 17h00 au métro Pie-IX. Les sales flics ont tout fermé: j'ai dû descendre à la station Joliette. Eux qui prétendaient faire leur possible pour nous permettre de manifester dans le calme... Plus hypocrite que ça tu portes une perruque et tu te fais appeler monsieur le juge.

J'ai bien suivi mes propres conseils: peut-être trop même. Mon sac à dos était beaucoup trop lourd. 1,5 L d'eau, c'est 1,5 kg...

Un journaliste a accroché un de mes camarades pendant qu'on discutait, je n'ai pas été capable de me la fermer. On verra bien ce qui sera écrit dans le journal demain.

Je suis reparti vers 17h30. Nous étions alors peut-être 300-400. Quand je suis revenu, vers 20h00, il y avait encore une dizaine de personnes près de la station de métro. J'ai repéré 8-9 grands types portant tuques et keffieh. Je m'approche pour leur demander où étaient les manifestant-e-s. Ils ont un air sardonique en me voyant venir. Au même moment, j'entends l'un d'eux parler au cellulaire: "Pis si c'est pas assez, on va vous envoyer du renfort." Des flics infiltrés, merde. J'aurais dû m'en douter: ils ont des gueules bien engraissées, des visages poupins. Je repars en leur exhibant une grimace.

Je fais le tour, cherchant un indice du passage des manifestant-e-s: rien. Je croise toutefois beaucoup d'autopatrouilles. Une unité de supervision se croit tout permis et dépasse tout le monde. Deux autres autopatrouilles crachent à un piéton, encore sur le terre-plein: "Reste sur le trottoir!" Je déduis que pour rejoindre les lambeaux de manif, je dois aller dans la direction d'où proviennent les voitures. Je marche. Puis je finis par croiser un convoi escortant trois autobus de la STM, portant la mention "Spécial". En effet. À l'intérieur, quelques flics surveillent des dizaines de jeunes, l'air piteux.

Une heure plus tard, je suis enfin résigné à ne pas retrouver mes ami-e-s. Un squeegee me demande si j'aurais pas un peu de monnaie. Je regarde par terre: un petit contenant gît sur le sol, avec dedans une minuscule flaque d'eau savonneuse. Je lui tend ma bouteille de 1,5L.

jeudi 11 mars 2010

COBP et autres

lundi, 15 mars : Journée internationale contre la brutalité policière

C'est lundi le 15 mars que ça se passe. La marche commencera à 17h00, au métro Pie-IX. Un imprévu de dernière minute (tabarnak!) m'en fera manquer la majeure partie. Si ça vous dérange pas, je vous demanderais de m'en faire un résumé avec plein de détails et si possible, des photos et des vidéos. Je m'en veux vraiment de devoir manquer cette manif.

Pour des détails: cliquez ici.

mardi, 16 mars: FDD à l'UQÀM

Francis Dupuis-Déry donnera une conférence à 20h00, au J-2850 à l'UQÀM. Je vais vous avouer, j'ai pris ça en note dans ma main et je ne me souviens plus du tout sur quoi elle portera. Mais généralement c'est intéressant.

Samedi, 20 mars: Manifestation du front commun syndical.

Elle débutera à 12h00, sur la place du Canada (métro Peel ou Bonaventure) et vise à défendre les services publics - dans le cadre des actuelles négociations...

Samedi, 27 mars, heure indéterminée: communication sur le colonialisme en histoire africaine.

C'est organisé dans le cadre du colloque de l'AEPOA, qui sort de son mandat en acceptant un tel sujet. Je ne sais pas encore si cette courte communication en vaudra la peine, mais c'est certain que j'y serai. Je préciserai l'heure et le lieu plus tard.

mardi 9 mars 2010

Se protéger contre la répression.

La police peut frapper n'importe quand dans une manifestation. Les exemples de Montebello et du premier mai 2008 sont là-dessus équivoques. Avant même de déclarer la manifestation illégale et même de demander calmement aux gens sur place de se disperser, elle peut charger sur une foule constituée massivement par des citoyen-ne-s pacifiques. Comment réagir face à la violence policière? Quel matériel utiliser lors des manifestations? Ce billet va tenter d'esquisser des pistes de réponse. N'hésitez pas à commenter pour compléter ou discuter.

1. Sentir la tension

Bien qu'il arrive parfois qu'on se fasse prendre par surprise, généralement, un affrontement entre policiers et manifestant-e-s se produit après une escalade de la tension. Il est faux de croire que les policiers attendent une provocation vraiment violente pour se livrer à une répression en règle. Il faut donc rester à l'écoute et observer. La présence de l'escouade anti-émeute ne signifie pas elle-même l'imminence d'une charge. Si l'escouade se contente de protéger des lieux stratégiques (postes de police, de pompiers, édifices publics), sans bouger, il y a de fortes chances pour qu'il ne se passe rien de très grave. Observez leur équipement et leur mobilité: ces indices en disent long. Si par exemple une escouade est postée au loin, en rangs, mais ne semble pas bloquer de rue, il s'agit D'UN BATAILLON DE RÉSERVE. Ce qui implique la prévision d'un affrontement. Comme les masques à gaz impliquent l'utilisation de lacrymos.

Surveillez aussi l'attitude de vos camarades. Elle peut traduire une intention de passage à l'acte.

2. Restez avec le groupe le plus imposant

Il est préférable de ne pas former de petits groupes, mais de rester avec la masse la plus importante. Les petits groupes sont plus vulnérables et leur multiplication peut signifier la dispersion de la manifestation. De même, ne permettez pas à la manifestation de se diviser en deux grands groupes distincts, (un à la tête, un à la queue) comme c'est souvent le cas. La police en profite souvent pour couper définitivement la manif en deux et réprimer séparément les deux foules. La manifestation doit préférablement rester une masse relativement compacte, qui s'étend cependant toujours sur au moins un carefour à la fois.

3. Ne vous fiez pas au service d'ordre

Le service d'ordre d'une manifestation est souvent formé par des brutes sans formation qui veulent à tout prix empêcher les choses de se précipiter. Le service d'ordre de la FTQ est réputé pour être souvent allé jusqu'à violenter des jeunes. Informé par les organisateur/trices, ce comité est aussi responsable de l'exécution de leurs choix parfois discutables, faits de concert avec la police. Il peut parfois vous forcer à n'occuper qu'un côté de la rue. Fiez-vous donc à votre esprit critique, et non pas à des dossards oranges. Une police syndicale, ça reste une police.

4. Le matériel: léger et discret

L'attitude n'est pas la seule à compter quand on fait face à la répression policière. Ce que vous apportez peut vous sauver ou vous condamner. Plus que tout, vous devez adapter votre matériel à votre attitude sur place. Comptez-vous rester à l'écart de potentiels affrontements? Optez pour un petit sac à dos confortable et bien rempli. Vous vous sentez l'âme aventureuse? Voyagez léger.

Dans le premier cas, vous constituez le noyau de la manifestation. Si vous croisez des militant-e-s la yueule en sang, il faut que vous soyiez prêt-e-s à réagir. Voilà pourquoi je suggère le port du sac à dos. Ce sac peut contenir:
- une bouteille d'eau d'au moins 500 ml, préférablement 1L.
- une trousse de premiers soins;
- du jus de citron;
- du Maalox dilué à 50% (entre 50 et 100 ml, ça devrait être suffisant);
- un couvre-chef quelconque;
- un foulard, bandana, ou autre pièce de tissu.
- papier crayon.
- appareil-photo.

L'eau est absolument essentielle. Dans mon expérience, lors d'une manif violente, j'ai en moyenne utilisé entre un et deux litres d'eau. La trousse de premiers soins est facultative: généralement, il y a du personnel qualifié pour répondre aux besoins des manifestant-e-s. Mais si vous êtes prêt-e-s à trimbaler une petite trousse, je le recommande fortement. Vous ferez sans doute plus de bien en aidant des blessé-e-s qu'en mettant le feu à des poubelles.

Le jus de citron vise à protéger les voies respiratoires de l'effet du gaz lacrymogène. Distribuez-en généreusement à vos camarades et étendez-en sur votre foulard en cas de besoin, à plusieurs reprises s'il le faut. L'effet des lacrymos peut être néfaste pour la santé des poumons.

Le Maalox est un antiacide qui réduit l'effet des gaz lacrymogènes dans les yeux. L'effet n'est pas prouvé médicalement mais il est fortement documenté. Le Maalox peut être remplacé par du sérum physiologique. N'oubliez pas de diluer le Maalox, sinon c'est dégueulasse. J'utilise généralement une petite bouteille de plastique avec un goulot minuscule, qu'on peut presser pour en faire sortir le liquide. Les blessures aux yeux provoquées par le gaz lacrymogène sont les plus douloureuses et dangereuses. Sans traitement, elles peuvent immobiliser un individu pendant plusieurs minutes. Et les effets, dans des cas rares, peuvent causer des lésions permanentes à la vision. Vous pouvez aussi utiliser de l'eau pour soigner les yeux contre les lacrymos, mais dans ce cas n'ayez pas peur d'abuser. Avec vos doigts (propres et surtout pas contaminés par le gaz), écartez les paupières de la victime, penchez sa tête vers l'arrière et versez un shitload d'eau dans les yeux. Quelques gouttes ne suffisent pas: elles peuvent empirer les choses en provoquant la dissolution rapide des cristaux de gaz.

Le crayon sert à prendre en note le nom des gens arrêté-e-s, des témoins, ou le matricule de policiers (qui le donnent rarement, même si c'est leur devoir).

5. les vêtements

Plusieurs se rendent à une manif costumé-e-s, et ce n'est pas une mauvaise idée car ça rend l'évènement plus festif et joyeux. Par contre, le maquillage peut provoquer l'adhérence de critaux de gaz lacrymo à votre peau, le masque peut bloquer votre vision, et un costume trop voyant peut faire de vous la cible privilégiée de policiers armés de fusils à balles de caoutchouc. Certain-e-s diront que les policiers n'arrêtent pas les clowns: foutaise. Utilisez donc tout costume avec prudence. Personnellement, je suggère une tenue anonyme. Si jamais la répression est forte, vous aurez alors toujours la liberté de vous enfuir dans une rue avoisinante et d'éviter ainsi de vous faire identifier par les flics.

La SPVM utilise maintenant des grenades traçantes. Ça se tire comme des lacrymos mais en explosant ça relâche de la peinture verte. J'ai failli en recevoir une en pleine tronche l'an dernier. Faites gaffe.

Note: Si vous portez des verres de contact alors que des grenades lacrymogènes ont été tirées, RETIREZ-LES!

Arrangez-vous aussi pour ne pas être embarassé-e-s. Si vous comptez servir d'avant-garde à la manif, n'apportez pas de sac. Si vous en avez un, ne laissez rien pendre. Idem pour le foulard ou les cheveux. Lors d'une charge, des policiers pourraient vous agripper et vous blesser. Portez aussi des godasses qui permettent la course.

6. Le masque

Le masque fait de vous une cible privilégiée de la police, et en raison de l'utilisation des balles de plastique (sans doute la menace la plus grave qui pèse sur les manifestant-e-s), vous n'êtes en sécurité nulle part. Portez-le donc avec discernement. En ce qui me concerne, je n'en porte jamais, mais j'en traîne toujours un et même plusieurs dans mon sac. Au cas où je devrais fournir des camarades. Notez qu'un chapeau ou un capuchon peut sans doute suffire à camoufler votre identité.

7. les flics under-cover

Ils se tiennent toujours en groupe de deux ou trois minimum. Ils sont reconnaissables, souvent, au contraste entre leur coupe de cheveux et leurs vêtements, à leur langage, leur ignorance, leur âge et à leur agressivité. Mais il arrive qu'ils soient vraiment plus subtils qu'à Montebello. Gardez l'oeil ouvert.

8. En cas d'arrestation ou pour en savoir plus.

Consultez le guide "Surprise, on a des droits", fourni par le COBP (mais dont le lien est mort sur leur propre site).

jeudi 4 mars 2010

Les habits neufs de l'Empereur.

Je n'ai même pas envie de réfuter cette théorie dont tout le monde parle tellement elle est idiote. Que des gauchistes, progressistes et liberals se laissent flatter dans le bon sens du poil par un pseudo-scientifique me laisse perplexe.

Je n'ai pas pu mettre la main sur l'article de Satoshi Kanazawa, et de toute façon je ne possède sans doute pas la formation scientifique pour réfuter totalement sa méthodologie et ses conclusions (la seule fois où j'ai lu des critiques de la psychologie évolutionniste, c'est à partir d'une discipline tout aussi controversée, la nouvelle neurohistoire, dont Smail est un partisan). Même le PROXY de l'UQÀM ne suffit pas à me donner accès à la revue; il faudrait que j'attende son arrivée en bibliothèque. Pour le moment, ne sont disponibles que quelques articles faisant état de cette recherche: tous m'ont équitablement fait gerber, dont l'article du Times qui est néanmoins plus complet.

Grossièrement, l'auteur prétend que la nature humaine tend à rendre les gens conservateurs et à les garder dans la stupidité. La nature humaine les rendrait aussi purement monogames. Il va chercher dans le fin fond des temps l'explication de la différence réelle observée entre le QI des enfants "très conservateurs" et "très libéraux"[1]: les humains du Paléolithique vivaient dans une société relativement fixe sur le plan du savoir, et leur intérêt individuel restait encore de reproduire leurs propres gènes, et non pas d'aider des étrangers, comme le ferait tout bon progressiste. L'évolution aurait fait tout humain respectant sa nature humaine comme ceci: un conservateur paranoïaque, monogame et croyant en Dieu. Toute personne s'éloignant de ces caractéristiques fondamentales (genre Bill Clinton) serait donc en train de s'affranchir de la Nature!

De telles conclusions me semblent sans liens avec la source du départ. Cette étude a des visées universalistes: et pourtant elle se base sur les résultats obtenus dans des écoles états-uniennes seulement. Or, on connaît très bien le climat éducationnel aux États-Unis. Chez eux c'est peut-être bien le conservatisme qui rend idiot, pas la nature humaine qui rend conservateur. Il est plausible que les conservateurs/trices du Québec ne soient pas moins intelligent-e-s que nos progressistes. Même si a priori j'en doute.

Et cette étude ne prouve en rien que systématiquement tous les conservateurs/trices sont des idiot-e-s, comme elle ne prouve pas que les progressistes et athées sont systématiquement des gens intelligents.

Puis aller chercher des tas de causes dans la préhistoire est ridicule et basé sur rien. C'est aussi minable que d'affirmer que les Dinosaures sont en fait les dragons du Moyen Âge. De toute façon, une bonne partie des comportements des humains du Paléolithique nous est encore totalement inconnue.

Croire dans les conclusions de cette étude, sans la critiquer, c'est soit de la mauvaise foi, soit s'enfoncer dans une dangereuse dérive du positivisme scientifique. Ce n'est pas parce que c'est écrit dans une étude scientifique que c'est vrai. Certain-e-s gauchistes brandissent l'article de Kanazawa comme si c'était l'étendard de la vérité. ENFIN, on a prouvé que les progressistes étaient plus intelligents. Ipso facto, ces derniers ont raison sur toute la ligne.

Même l'Antagoniste tombe dans le panneau: au lieu de tenter de contredire l'étude que personne n'a lue (et dont peut-être les conclusions ont été modifiées par les journalistes pour les rendre plus choquantes), il dit ceci: "Si l’on définit l’intelligence par la capacité d’un individu à se soucier du sort des plus défavorisés, il faut conclure que celle-ci est libertarienne" avant par ailleurs de traiter les gauchistes d'eugénistes. Sous-entendu: "peut-être que les conservateurs sont cons, mais MOI je suis libertarien, alors ça compte pas."[2]

N'oubliez pas qu'il y a cent ans, les scientifiques étaient tous unanimes sur l'infériorité raciale des Noirs, et dans les années 90, on était persuadé-e-s d'avoir découvert LE gène de l'homosexualité. Les idées scientifiques ne sont pas immuables. La vérité non plus. Que nos camarades progressistes arrêtent donc de se bidonner et fassent preuve d'esprit critique. On ne pourra peut-être rien tirer de nouveau et de fiable de cet artice du Social Psychology Quarterly.[3]

Vous vous souvenez de cette histoire d'Anderson qu'on nous racontait quand on était gamin-e-s? Ça racontait la légende de prétendus tisserands qui avaient fait croire à l'empereur qu'ils avaient préparé pour lui des habits qui ne pouvaient pas être vus par les niais. Pendant que l'empereur se baladait nu, flatté par un entourage complaisant, les tisserands s'enfuirent avec l'argent de Sa majesté.

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[1] Une large étude démontre que les enfants états-uniens démontrant des convictions fortement conservatrices ont en moyenne un QI de 95, alors que chez les enfants fortement libéraux, ce résultat est de 106.
[2] Ce faisant il me prouve une deuxième fois qu'il ne sait pas lire, puisque tous les compte-rendus de l'article de Kanazawa mentionnent que si les gens intelligents aiment à se décrire comme étant des liberals, ils n'en reste pas moins qu'ils sont réticents à réduire l'écart entre riches et pauvres.
[3] Cela ne vaut pas pour toutes les études scientifiques, sur lesquelles il faut toujours garder un doute raisonnable. Ce doute raisonnable, et non la foi en tout ce qui sort des publications universitaires, fait d'ailleurs partie de la méthode scientifique.

lundi 1 mars 2010

Minute moomin


"Tant que tu porteras une admiration excessive pour quelqu'un, tu ne seras jamais libre."
- Snufkin