dimanche 25 septembre 2011

moyens d'actions / mouvement anticorruption (1)

Quoi faire face à un gouvernement qui fait la sourde oreille face aux revendications populaires, portées ou non par des manifestant-e-s qui envahissent les rues? Dans cette série d'articles que je compte écrire, j'essaierai de me joindre au débat sur les moyens d'actions qui soutiendront la lutte contre le gouvernement corrompu. La première partie traitera de légitimité et du rôle des manifestations dans une lutte politique.

L'Équilibriste, afin de nous faire avancer, propose un plan d'action en plusieurs étapes et dont le coeur serait une grève sociale de trois jours. Il rejette en passant l'initiative d'organiser (à la va-vite, précise-t-il) des manifestations devant le bureau de Jean Charest à Montréal.

Si on jette un coup d'oeil aux principales luttes sociales des dernières années, la manifestation a cependant toujours fait partie de la lutte politique. Que ces mouvements aient été couronnés de succès ou non. Pourquoi? J'ai déjà défendu de manière très succincte l'utilité des manifestations ici même, alors que deux autres blogueurs/euses, soit Anne Archet et David Gendron, avaient mis en doute de manière tout à fait légitime le recours à ce moyen de pression. Les circonstances étaient différentes: c'était pour réagir à la marche annuelle du COBP. Je résume mes arguments:

1. Ce n'est pas parce que c'est permis que c'est nécessairement mauvais.
2. Une manifestation peut être un lieu de rencontre et de dialogue.
3. Une manifestation (même pacifique!) peut provoquer une perturbation temporaire du système, et donc peut servir de moyen de pression réel.

Ce à quoi j'ajoute une composante importante, qui est à la base de tout exercice d'établissement de pouvoir ou de renversement: la légitimation.

Le gouvernement "démocratique" typique, comme tout autre gouvernement cherchant le consentement, se nourrit presque exclusivement d'exercices de légitimation. Dans l'Ancien Régime, le roi cherchait la légitimité par son association avec une divinité, avec un ancêtre et parfois en simulant des pouvoirs thaumaturgiques[1]. Aujourd'hui, il est plutôt question d'élections, de consultations populaires et d'autres artifices. Tout ça est assimilable à des pièges à cons, bien entendu, mais ces exercices ont des effets tout à fait matériels sur l'état d'esprit des citoyen-ne-s. Combien de fois les politicien-ne-s, face au mécontentement, nous ont servi ces arguments:
"Les électeurs m'ont élu pour que je mette mon programme à exécution."
"La majorité silencieuse est de mon côté."
Et combien de fois les a-t-on cru-e-s?

Il n'est bien sûr pas question de recherche d'assentiment ici, ni de souveraineté populaire, de contrat social ou d'autre niaiserie inventée pour nous la faire fermer. Il est simplement question de recherche de légitimité. C'est en résumé le mot qu'il faut toujours avoir en tête.

Pour renverser les effets de ces exercices de légitimation, pour relâcher l'incroyable pression psychologique du pouvoir, il faut que la contestation bénéficie d'un soutien massif. Finalement, que son niveau de légitimité dépasse celui du gouvernement!

C'est cette légitimité nouvelle qui permet de passer à la vitesse supérieure. L'Équilibriste propose, consciemment ou pas, un moyen d'acquérir cette légitimité dans un billet de son blogue: "Qu’une vaste campagne visant à sensibiliser et mobiliser les faiseurs d’opinion publique (chroniqueurs, vedettes, personnalités) autour de l’organisation de la grève sociale. Car ce sont ces derniers qui auront la plus grande influence sur la masse."

Cela ressemble beaucoup, finalement, à une tentative de "révolution" par le haut. Ça m'apparaît complètement inintéressant. Au XXe siècle, la faiblesse des technologies de communication rendait difficile la transmission de messages entre citoyen-ne-s ordinaires. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Il n'est pas nécessaire de convaincre Mario Roy et Patrick Lagacé pour que les gens se mettent à penser quelque chose. Les faits nus, diffusés sur le net (ou plus traditionnellement sur des murs, dehors) et partagés massivement suffisent. Les gens se feront une idée après, avec l'aide de leur intelligence. Des gens qui n'ont pas l'impression d'être contrôlés vont plus profondément remettre les choses en question. Cette remise en question est essentielle pour que la légitimité vacille.

Les chroniqueurs/euses populaires, qui ont pour la plupart fait leur carrière en exploitant des lieux communs, ne sont pas des gens audacieux[2]. Je renonce à tenter de les convaincre, c'est inutile. Je pense qu'il faut seulement les mettre devant le fait accompli. Après, il faut pas s'inquiéter, ils vont suivre si c'est dans leur intérêt.

Ce ne sont par ailleurs pas des journalistes héroïques qui ont déclenché la révolte tunisienne, mais un gars qui s'est crissé en feu. Cette action désespérée a traduit un sentiment partagé par tous et toutes. Toutefois, la situation était différente, puisque le régime était déjà en crise de légitimité bien avant l'auto-immolation en question.

Comment donc parvenir à faire s'écrouler la légitimité déjà entamée du gouvernement de Jean Charest? Eh bien la première étape c'est... bien évidemment la manifestation et les pétitions! Le nombre évalué par les médias est lui-même secondaire. Ça, c'est pour le marketing.

Ce qui compte réellement, c'est l'expérience personnelle. Et voilà un aspect du combat qui est souvent mis de côté par les macro-activistes[3]. Il faut que les gens sentent INDIVIDUELLEMENT que malgré leurs efforts, ils n'ont pas été écoutés! Voilà pourquoi il faut selon moi réduire au maximum l'importance des grand-e-s porte-paroles du peuple et permettre au plus grand nombre d'agir. La manifestation est une action qui le permet en partie. 20 000 personnes qui manifestent, ça ne cause pas qu'un article dans La Presse: ce sont 20 000 expériences personnelles.

(À suivre)

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[1] Ça veut dire guérir du monde par magie.
[2] À part peut-être du monde comme Foglia.
[3] J'ai décidé de définir ainsi les activistes ou analystes qui n'ont pas de vision à petite échelle.

samedi 24 septembre 2011

Le mouvement du 24 septembre.

Le rassemblement d'aujourd'hui était finalement de taille modeste (le Journal de Québec parle de "quelques centaines" mais c'est complètement faux comme d'habitude - l'expression "quelques milliers" serait plus adéquate) mais incomparablement sympathique. Les organisateurs/trices, apparemment sans expérience (et c'est pas qu'un défaut) ont bien fait leur travail.

Il y avait un service d'ordre, mais il était quasi-absent, de même que la police. La foule était plutôt hétérogène: petites familles, jeunes, vieux et (hélas) beaucoup de militant-e-s nationalistes qui brandissaient des drapeaux derrière la scène, comme pour récupérer l'évènement. L'ambiance était festive et tranquille. Les discours ont été plutôt nombreux. Je déplore peut-être un peu l'absence de fil conducteur entre les déclarations des orateurs/trices: le lien entre leurs propos et la corruption du gouvernement était souvent très diffus. La radicalité de plusieurs monologues (par exemple celui de Dan Bigras) était également inversement proportionnelle aux moyens d'actions suggérés. Par exemple, on a à plusieurs reprises non pas exigé le départ consensuel de Charest, mais bien sa destitution directe par le peuple.

Néanmoins, cet élan d'optimisme a fait du bien et distribué beaucoup d'énergie, à défaut de faire peur aux principaux intéressés, c'est-à-dire les mafiosi qui nous gouvernent. L'équipe d'organisation a décidé de ne pas mener la foule comme des moutons, ce qu'on voit systématiquement à la grande marche corporatiste du 1er mai. Ça, c'est tout en leur honneur. Les invité-e-s ont également été bien choisi-e-s. Je dois avouer que j'ai toujours eu beaucoup de respect pour Armand Vaillancourt, malgré ses appels constants à la patrie[1], dont la fureur antiautoritaire trahit pourtant quotidiennement la substance. Dan Bigras est un autre homme vieillissant d'une espèce rare: celle qui aime les jeunes. Marie-Ève Rancourt, ce volcan, est le morceau qui nous reste de l'esprit de Seattle et du Sommet de Québec. Quant à François Yo Gourd, cette incarnation du fantastique et de l'absurde, eh bien il a fait comme d'habitude, c'est-à-dire du gros n'importe quoi plein de franchise et d'esprit.

Si ça reste de même, je continue d'aller à leurs rassemblements.

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[1] Cette idée dégueulasse, comme dirait Renaud.

Manif contre Charest

Elle se tiendra demain à 14h00 devant les bureaux de Charest au centre-ville de Montréal (770 Sherbrooke Ouest).

Le mouvement est certes réformiste, mais ses critiques en valent d'autres.

Les revendications sont énumérées dans le communiqué:

"Nous exigeons du premier ministre du Québec:
  1. de mettre sur pied une commission d'enquête sur la collusion et la corruption dans l'industrie de la construction;
  2. de mettre sur pied une commission chargée d'effectuer une réelle réforme des institutions démocratiques et du financement des partis politiques;
  3. de déclencher des élections générales;
  4. de démissionner."

Je préférerais changer le point 3. par "nous laisser déclarer l'anarchie". Les citoyen-ne-s à l'origine du communiqué n'ont pas l'air de comprendre que le problème est systémique. D'un autre côté, voilà qui rend l'initiative très sympathique:

"Le Mouvement du 24 septembre est un collectif citoyen non partisan s’étant formé de manière spontanée. Ce collectif ne possède pas de chef, ni de hiérarchie spécifique."

Pas mal, non? Maintenant, je ne sais pas du tout si ça risque de virer corpo d'être récupéré par des gens sans vergogne. On verra bien. Pour l'instant, rejoindre ce pôle de contestation me semble plus que nécessaire.

vendredi 23 septembre 2011

Club des ex et financement des universités.

Il est disponible en rediffusion sur le site de Radio-Canada.

Un ennui de programmation nous coupe le contenu à partir de la dixième minute environ. Ça recommence seulement au moment où les étudiant-e-s ont réussi à s'imposer, vers 24min50.

mercredi 21 septembre 2011

Loi et ordre conservateurs / Paola Ortiz

Leur loi omnibus encourageant la répression, ils peuvent bien se la fourrer dans leurs culs de tyrans. Ça marchera pas. La misère est la principale cause du crime. Les Conservateurs l'augmentent; peu importe la réponse policière, ça règlera jamais le problème.

Et j'ajouterais aussi qu'il manque des boulons dans la tête de M. Boisvenu. Il ne veut pas que les victimes soient protégées, il veut juste se venger. Sa fureur zélée est telle qu'il ne sait peut-être même pas qu'il se fait manipuler.

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Ah oui, j'oubliais: des groupes communautaires appellent à l'action immédiate pour dénoncer la déportation de Paola Ortiz. Il est entre autres suggéré d'envoyer des lettres ou de téléphoner aux ministres responsables de son expulsion.

Nous avons jusqu'à vendredi pour empêcher cette citoyenne de Pointe-Saint-Charles de se faire renvoyer au Mexique avec ses deux enfants!

Je ne suis pas très optimiste de nature, mais tout de même, ça fait partie des petits combats qu'il faut mener pour rendre cette prison sociale plus habitable. De plus, je juge bien humblement que Mme Ortiz, ainsi que sa famille, ont eu leur lot de souffrances.

mardi 13 septembre 2011

Abus de pouvoir ordinaire (II)

Vous vous souvenez de ce vidéo? Eh bien elle tourne dans les mass médias maintenant depuis plusieurs jours. Je ne sais pas quel fil ont remonté les journalistes pour arriver à cette histoire, mais bon. Apparemment, l'individu ayant filmé la scène a été reçu en entrevue. Peut-être est-ce lui qui a avisé les journaux.

Lagacé a pris un gros cinq minutes de son temps pour écrire un article sur le sujet. Bon, en fait, je ne sais pas vraiment combien de temps ça lui a pris pour rédiger ça, je sais juste que ça me prend cinq minutes écrire quelque chose d'une qualité aussi minable.

L'auteur du blogue Catharsis répond à ce billet par une charge très insolente. Un texte à lire.

Je souhaite un prompt rétablissement aux flics qui ont dû souffrir d'un terrible choc nerveux après avoir violé une fois de plus les droits de la personne.

Le centre communautaire Adrianna

Il a brûlé...

Si vous avez des solutions au problème de la relocalisation du centre, gênez-vous pas pour proposer...

dimanche 11 septembre 2011

Appel de textes pour le prochain recueil

Note: ceci est une copie conforme du texte qu'on peut trouver sur le blogue Catharsis.

Au mois de mai 2011, SUBVERSIONS, le premier recueil de fiction du Bloc des auteur-e-s anarchistes de Montréal, a laissé déferler ses mots sur le monde. À partir de là, deux choix : lire ce tome 1 ou écrire pour le tome 2!
Claviers, plumes, crayons et dactylos libertaires, vous avez jusqu'au 31 octobre 2011 pour rédiger une fiction d'un maximum de 2500 mots, à paraître dans le deuxième
recueil SUBVERSIONS.
Fondé lors du 11e Salon du livre anarchiste de Montréal en 2010, le Bloc désire promouvoir les théories et les pratiques de l'anarchisme à travers la littérature.
En tant qu'auteur.e.s anarchistes, nous luttons pour une société égalitaire, verte, libre et autogérée, par la démocratie directe et l'action directe. La littérature anarchiste participe à cette lutte. Si vous ou vos textes de fiction prennent part à cette révolution, soumettez-nous vos écrits à l'adresse suivante : awb@daemonflower.com.
Bien que nous préférons un envoi électronique, vous pouvez soumettre votre
manuscrit par la poste à l'adresse suivante: Bloc des auteur-e-s anarchistes a/s
Librairie Insoumise, 2033 St-Laurent, Montréal (QC), H2X 2T3
Cette fois-ci, en plus de l'anglais et du français, les textes peuvent être rédigés en
espagnol et en italien.
Pour plus de détails sur l'écriture, la sélection et l'envoi des textes, visitez le site Web
du Bloc (http://awb.daemonflower.com) ou communiquez avec nous au
awb@daemonflower.com.
Le volubile possible est à nos portes! Ne reste qu'à l'écrire...

samedi 10 septembre 2011

L'Égypte se ferme un peu plus.

Impossible d'ici peu d'acheter un visa en arrivant à l'aéroport. À partir de ce moment-là, il faudra s'adresser au Consulat dans le pays d'origine pour pouvoir ensuite avoir le droit d'entrer en Égypte. Le gouvernement va donc réguler les entrées.

Abus de pouvoir ordinaire (07/09/2011)

Voici une courte séquence vidéo tournée le 7 septembre dernier et trouvée sur le blogue de Pwel.

dimanche 4 septembre 2011

L'Ancien Régime.

Le procès de Moubarak recommence demain. Plusieurs révolutionnaires réclament ardemment la peine de mort pour l'ex-leader. Celui-ci a en effet mené une répression populaire tout à fait impressionnante et sanglante qui fit, pendant l'hiver, plus de 800 morts et des milliers de blessé-e-s.

De l'aveu même d'un jeune Égyptien ce matin à la radio de SRC, le régime n'a pourtant pas totalement changé. Le peuple, oui. Mais jusqu'à quel point?

Devant cette formidable répression, les meurtres, les disparitions, la torture, une seule réponse permet un changement en profondeur. C'est d'agir avec plus d'humanité que ceux qui ont précédé. Je ne suis peut-être pas en mesure de comprendre en profondeur la colère du peuple égyptien: je n'ai pas perdu un frère ou une soeur au cours des six derniers mois et je n'ai été que légèrement atteint par la brutalité de mon État à moi. Mais ce dont je me rends compte, c'est du manque absolu de lucidité de beaucoup d'Égyptien-ne-s qui, souhaitant pourtant sincèrement que les choses ne soient plus jamais les mêmes, s'apprêtent à appuyer consciemment le remplacement d'un régime par un autre qui est exactement pareil. Les justifications seulement seront transformées (mais pour combien de temps?). L'armée dans les rues protège la population contre les criminels évadés qui ont volé des armes dans les postes de police. Un genre de milice surveille les étudiant-e-s des collèges pendant la période d'examens, avec une vigilance paranoïaque: on suspecte en effet les partisans du Raïs déchu de vouloir perturber. Plus récemment, on a décidé de ramener une vieille loi des années cinquante pour punir les anciens corrupteurs. Cette loi se nomme "la loi sur la trahison"[1].

Et maintenant, c'est l'histoire des appels à la peine de mort pour Moubarak qui défraie les manchettes. C'est au tour du peuple d'avoir à la bouche le goût du sang.

La peine de mort est une aberration: c'est l'arme des ignorant-e-s. Son utilisation dans une seule situation rend légitime la plupart des autres.

Or, le gouvernement de Moubarak était justement un tel régime de surveillance et de peur, qui appelait sans cesse à la mort. En appelant à l'exécution et à la purge, les Égyptien-ne-s concerné-e-s ne font que prouver à quel point illes ont bien assimilé les méthodes de l'ancien régime. Illes ont organisé une contestation sans figure dominante[2], centrée sur une organisation parfois complètement dépourvue de chefs, presque exemplaire. Et pourtant plusieurs attendent aujourd'hui bêtement, la gueule ouverte comme des oisillons quêtant de la nourriture à leur génitrice, que les autorités qui les ont autrefois condamnés punissent tout aussi bêtement le vieux tyran. En refusant de voir que ce sont les institutions coercitives qui ont permis à Moubarak de blesser tant de monde, en refusant de voir que c'est le pouvoir dans sa globalité qui est responsable de leurs souffrances, une partie du peuple condamne l'Égypte à retourner dans le même cycle de servitude et de contraintes.

Le peuple n'a rien à attendre de la peine de mort, ni des grands procès pompeux. Il n'a rien à attendre des grandes institutions. C'est seulement en changeant sa vie quotidienne en profondeur[3], en modifiant son rapport à l'autorité, à la peur et à l'obéissance qu'il deviendra fort et qu'il se mettra à l'abri des grandes crapules.

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[1] Voilà ce que dit Al-Ahram là-dessus: «Le but de cette loi n° 344 de 1952, modifiée par la loi n° 173 de l’année 1953, a établi plusieurs sanctions : privation du condamné de la fonction publique, de l’adhésion au Parlement, du droit de vote, de l’affiliation aux partis politiques pour au moins 5 ans. Les sanctions peuvent aboutir à la privation de la nationalité égyptienne. Selon cette loi, le tribunal de traîtrise est composé d’une majorité de militaires et d’un petit nombre de magistrats. [...] Baheyeddine Hassan, directeur du Centre du Caire pour les études des droits de l’homme, assure que la loi sur la traîtrise qui fut appliquée dans les années 1950 a mené à l’absence de la démocratie en politique. "Elle a contribué ainsi à l’abolition des partis politiques et à la nationalisation de la presse, des syndicats et des ONG. Elle commencera par les responsables de l’ancien régime et finira par punir les jeunes de la révolution du 25 janvier ".»
[2] Notez l'utilisation du singulier. Il y eut cependant énormément de personnalités publiques qui ont été considérées comme des meneurs, notamment des leaders religieux.
[3] Nidal Tahrir a bien expliqué bien comment l'organisation contestataire peut être un outil réellement révolutionnaire: « nous allons essayer de faire en sorte que les comités qui ont été formés pour protéger et sécuriser les rues, deviennent plus fort et de les transformer par la suite en véritables conseils populaires. »

samedi 3 septembre 2011

Le gouvernement révolutionnaire autoproclamé d'Égypte donne toujours dans la répression. Le blogueur Maikel Nabil est en prison depuis le printemps pour avoir simplement critiqué les militaires, à la tête du pays depuis la chute de Moubarak. Les généraux planqués semblent avoir oublié avec quelle aide ils ont été installés au pouvoir.

Mais il ne faut pas s'étonner, parce que le maintien de l'ordre par les autorités se fait pratiquement toujours aux dépens de la justice et de la liberté.

Rappelons que mis à part quelques têtes dirigeantes et partisans de l'ancien régime (plusieurs, au contraire, sont restés, dont le mégalomane Dr Hawass), les structures de domination en Égypte ont été à peine ébranlées par les quelques réformes superficielles du gouvernement de transition.

Il ne faut cependant pas sous-estimer le bouillonnement dans la population. Bien qu'elle soit loin d'atteindre tout le monde, et que beaucoup semblent se ficher complètement du départ de l'ancien leader, il y a de l'organisation.

jeudi 1 septembre 2011

Mission: terroriser un vendeur de char.

Pendant la dernière manifestation du COBP, des centaines de personnes ont été détenues dans des conditions indécentes et mises à l'amende pour des crimes en grande partie imaginaires. Des personnes impliquées à l'ASSÉ et au PCR ont également été arrêtées et accusées de crimes après des actions qui, somme toute, ne sortent pas de l'ordinaire de l'activisme réformiste (surtout en ce qui concerne l'affaire des militant-e-s de l'ASSÉ), sinon de la légitime défense.

La réaction de la population, guidée par des leaders d'opinion en général mal informés, n'a été d'aucune sympathie pour les victimes de la répression. Et même si on sent une colère sourde chez certain-e-s citoyen-ne-s, il se trouve des gens pour défendre les acteurs d'un meurtre gratuit. Amusante, n'est-ce pas, cette servilité absolue? D'autant plus que parallèlement à la baisse du crime, il y a malgré tout une augmentation du recours aux armes chez les policiers[1], largement justifiée par nos élites. À quelle nouvelle menace de violence la police doit-elle faire face? Le public ne le sait pas trop, mais on lui a montré à haïr tous les criminel-le-s. Et pour beaucoup, la violence des constables n'est pas de la vraie violence.

La vraie violence, c'est évidemment les agressions sur des personnes, les menaces, l'intimidation, etc. L'exemple de violence le plus présent dans l'imaginaire populaire est sans aucun doute la violence conjugale. Mais un autre type de violence marque davantage plusieurs langues sales: la violence contestatrice de gauche. Celle que subissent prétendument plusieurs citoyen-ne-s "pris en otage" par des grévistes qui bloquent une rue ou l'accès à un édifice, ou dont le quotidien est atteint par des actions politiques de la gauche.

En revanche, des campagnes comme "Honk a cyclist", autant dangereuses que haineuses, ne sont pas considérées comme de la violence par ces mêmes penseurs à l'esprit tordu. Pourtant, il semble y avoir des conséquences variées et très désagréables, comme en témoigne un cycliste: «Il a baissé sa vitre, s'est mis à me crier des bêtises et s'est collé contre le trottoir. Il m'a accroché avec son rétroviseur [...]»

Il y a quelques années, un anglophone d'Outremont m'a engueulé et menacé assez gratuitement juste en face d'une boulangerie dont je regardais les produits en vitrine. Quand je lui ai demandé les raisons de son pétage de coche, il m'a répondu que "tous les Québécois-es sont racistes". Or, quelques jours auparavant, toute la presse anglophone du Canada avait débuté une campagne haineuse contre les Québécois-es, suggérant presque que le racisme était congénital chez "nous". Le débile léger en question n'avait fait que répéter les arguments pauvres et idiots des chroniqueurs/euses réactionnaires du Financial Post.

Et on apprend récemment qu'un blogueur a débuté une campagne haineuse contre Kia. Je déteste l'entreprise, comme toutes les autres grosses business, mais dans ce cas-ci, l'histoire qui a déclenché le scandale est une affaire de vengeance personnelle. Comme dans toutes les autres campagnes de haine, le public a été manipulé par des gens sans vergogne afin de servir d'outils dans leurs power trips, alors même que le problème semblait déjà résolu.

On ne parle pas ici de dénoncer une série de crimes sordides, de défendre une grande cause, ou de tenter de démantibuler une autorité illégitime: il s'agit d'instrumentaliser, grâce justement à l'autorité que se confère une personnalité influente ou du moins populaire, un troupeau servile. Dans son debriefing de mission, il commente: "La contre-attaque de l’armée de trolls fut terrible." Son armée de trolls...

En effet. On apprend quelques jours plus tard que le concessionnaire en question n'a pas été que harcelé: il a tout simplement été incendié.

Alors donc: est-ce qu'une vitrine qui se casse par accident lors d'une occupation, c'est vraiment de la violence? Est-ce qu'une campagne haineuse et surtout personnelle est moins violente? Est-ce qu'on ne fait pas un peu d'extrapolation quand on dépeint la gauche comme exceptionnellement violente (au point où les anars ont une escouade dédiée à les contrôler), alors que des médias reconnus (accessoirement de droite) et des personnalités se lancent dans des campagnes haineuses dont les effets sont extrêmement épeurants?

Il y a une différence immense même entre les actes radicaux d'une poignée de militant-e-s d'extrême-gauche et ceux des mass médias ou autres imbéciles heureux. Après que Résistance Internationaliste ait fait exploser une bombe dans un bureau de l'armée à Trois-Rivières, il y a environ un an, un manifeste a été publié et les actions du groupe se sont arrêtées là. Quand les gens des collectifs Ton Père, Ton Oncle et Ton Chien ont commis divers actes de vandalisme mineurs, après publication des manifestes, les actions ont cessé, l'objectif ayant été atteint. La limite était tracée, même dans l'esprit de ces "extrémistes"! Je trouve passablement irresponsable le fait de jouer avec des explosifs comme l'ont fait RI, et je n'encouragerais certainement pas d'actions représentant un tel danger. D'un autre côté, c'était là une réponse à une série de meurtres et plusieurs décennies d'oppression dont sont responsables les Forces Canadiennes (oh scusez, je veux dire l'Armée royale).

Dans le cas des campagnes haineuses, les méfaits à l'origine des répliques sont soit imaginaires, soit aussi légers qu'un larcin tout à fait commun. Et surtout, elles sont pilotées par des personnes qui ont un grand pouvoir de diffusion, pas simplement des individus tout à fait anonymes qui cherchent à dénoncer quelque chose ou tenter qu'une quelconque pratique cesse[2]. Enfin, les propagateurs de la haine n'ont absolument aucun contrôle sur le résultat. C'est un cercle qui peut s'agrandir à l'infini parce qu'au lieu d'être centré sur le droit des victimes, il cherche à tout prix des coupables à punir et à ostraciser.

La réponse à ce genre de dangers publics? Je ne crois pas du tout à la création d'un éventuel GAD (Guet des Activités Douchebags) qui aurait pour mission de surveiller un certain meneur et ses trolls.

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[1] Le "paramilitaire" Yves Francoeur répond que si la criminalité globale est en baisse, le taux de crimes violents est cependant en hausse au Québec. Mais une fois qu'on décortique un peu plus les données, on se rend compte que les cas d'agressions graves (
comme les meurtres et tentatives de meurtres, qui nécessiteraient selon la police une intervention plus féroce et donc l'utilisation d'armes) ne sont pas en hausse, au contraire: «Montréal et ses environs ont enregistré 49 meurtres pour l'année 2010. Dans les années antérieures, le nombre d'homicides pouvait atteindre 90 et plus, note Marc Ouimet. C'est une diminution de plus de 50 % depuis les 20 dernières années», observe-t-il.» En bref, les policiers ne sortent pas leurs armes pour régler une affaire de violence conjugale, mais des menottes. C'est donc d'autant plus paradoxal qu'un double-meurtre comme celui de Hamel et Limoges conduise non pas à faire tomber les oppresseurs en disgrâce, mais bien leur permette de porter plus d'armes.
[2] Donc c'est évident que je suis en faveur d'une dénonciation large de tout ce qui peut être injuste. C'est évident que je suis en faveur de la plupart des actions directes posées par les mouvements sociaux (avec de notables exceptions), même si j'ai horreur des dérapages. Il y a cependant une différence de méthode entre séduire des idiot-e-s et provoquer la réflexion.