jeudi 29 mars 2012

Élèves du secondaire: il faut désobéir.

Plusieurs administrations d'écoles secondaire frappent les jeunes qui tentent de tenir un débat sur la hausse des frais de scolarité, ou encore sur la grève. Abusant de droits qu'ils n'ont pas sur la liberté et sur l'intégrité des mineur-e-s, ces même administrations ont recours à une intimidation qui utilise la violence psychologique et la contrainte physique.

La plupart du temps, les élèves sont seulement sermonné-e-s ou suspendu-e-s. J'aurais pu d'ailleurs consacrer ce billet à dédramatiser cette condamnation qu'est une suspension de quelques jours, ou encore une retenue à l'école. Selon moi, une suspension équivaut cependant réellement à une peine, et non pas à une punition. Quant à la retenue, c'est aussi réellement une séquestration, au même titre que la prison. Ces pratiques sont la plupart du temps abusives et contre-productives.

Mais quelques directions qui comptent dans leurs rangs plusieurs brouets de poubelles mini-hitlériennes[1] ne se sont pas contentées des peines habituelles. Elles se servent de la terreur pour parvenir à leurs fins. Dans un cas particulier, une direction en est même venue à menacer un jeune de l'accuser au criminel, et cela avec la complicité de deux flics. J'imagine mal l'angoisse qu'a pu ressentir l'élève en question, qui n'avait pourtant fait que créer une page Facebook pour discuter de la grève.

Ce qu'on impose aux mineur-e-s, ces humains à qui on n'accorde aucun droit, n'est que le fantasme de ce qu'on veut imposer aux adultes: une société de dépendance épurée, homogène, totalitaire, déprimante, réglée à la seconde près. On pense parfois que tout se joue aux élections; d'autres pensent que tout se joue dans la rue, pendant des manifs: moi je pense que l'école est pour beaucoup dans la game du pouvoir. C'est un modèle expérimental à la fois de la prison et du travail. On ne peut pas se battre à la place des élèves du secondaire, mais en ce qui me concerne, je les encourage à faire le nécessaire pour dégager des espaces de liberté. IL FAUT DÉSOBÉIR!

Voici le message que j'adresse aux jeunes des écoles secondaires, peu importe leur âge:

Je vous encourage à vous révolter massivement contre la tyrannie des directions de vos écoles. De vous révolter contre tout-e prof qui s'allierait à cette tyrannie. Illes vous forcent à assister à des cours souvent inutiles, vous forcent à adopter un code vestimentaire, parfois même à porter un uniforme. J'ai même entendu dire que dans certains collèges, on forçait les jeunes hommes à porter les cheveux courts. Les horaires sont réglés, les cloches vous rappellent à la classe comme la cloche rappelle les détenu-e-s à leur cellule, et on vous poursuit jusque dans la rue quand vous tentez de fuir ce lieu qui meurtrit la liberté et vous enferme dans un carcan de conformisme abject.

L'école ne vous émancipe pas! C'est vous-mêmes qui le pouvez, par vos propres moyens, avec votre curiosité, votre soif de savoir, votre soif de liberté. La polyvalente ou le collège ne sont que des obstacles à votre apprentissage réel. Le compromis que vous faites en vous rendant chaque matin à l'école (vous acceptez de vivre une situation d'esclavage en échange d'une alphabétisation de qualité souvent médiocre) ne peut plus tenir.

Nous, les jeunes-vieux, nous n'avons pas su nous révolter pendant que nous endurions le calvaire que vous vivez maintenant. Si nous l'avions fait, vous n'auriez peut-être pas, aujourd'hui, à traverser cette épreuve de marde. Nous ne l'avons pas fait parce que peu d'entre nous ont fait l'effort intellectuel de comprendre ce qui se passait. Maintenant que nous avons fini l'école secondaire, souvent depuis plusieurs années (bientôt neuf ans dans mon cas), nous ne pouvons que nous sentir responsables de ce qui vous arrive. Nous vous devons en quelque sorte quelque chose.

Je vous enjoins de vous libérer de cette dictature. Vous pouvez le faire tous et toutes ensembles. Les directions pourront toujours suspendre quelques individus, elles ne pourront jamais suspendre tout le monde en même temps. Vous pouvez utiliser l'anonymat sur Internet pour éviter d'être retracé-e-s par les usurpateurs qui vous punissent.

Vous pouvez prouver que le monde peut changer et évoluer sans autorité. Faites-le et nous allons vous soutenir. Faites-le et vous allez vous en souvenir toute votre vie.

Des hostie de vieux cons vous diront que vous n'avez pas l'esprit critique nécessaire pour mener à bien une lutte politique ou sociale. Ce sont des gens séniles. Ne les écoutez pas. Si déjà vous êtes en mesure de comprendre ce texte avec votre raison et vos émotions, eh bien vous avez ce qu'il faut pour tout transformer.



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[1] Insulte empruntée à Claude Gauvreau.

mercredi 28 mars 2012

blocage du port de Montréal

Ce matin, un groupe de plus de 700 étudiant-e-s est descendu sur la rue Pie-X à Hochelaga jusqu'à un accès du Port de Montréal, qu'il a bloqué pendant plus d'une heure, avec le soutien de quelques travailleurs/euses. Un peu plus tard, le groupe est parti vers l'Est afin d'appuyer des manifestant-e-s qui avaient décidé de bloquer la voie ferrée. C'est à ce moment que l'escouade antiémeute s'est déployée. Alors qu'il n'y avait eu aucune violence ni même une résistance particulièrement active de la part des manifestant-e-s, les policiers/ères ont abusé du poivre de cayenne sur une une foule de jeunes, dont quelques mineur-e-s, en plus d'en frapper plusieurs autres à la tête, dont un étudiant qui devait peser moins de 57 kilos et qui voulait simplement parlementer.

Les manifestant-e-s ont ensuite décidé de prendre la rue Ontario et de crier des slogans appuyant les travailleurs/euses en conflit. Les manifestant-e-s ont ensuite paradé devant les bureaux du ministère de l'éducation, du loisir et du sport avant de descendre sur Notre-Dame. La marche s'est terminée au Parc Émilie-Gamelin, devant l'UQÀM.

Les agissements violents de la police ont fait au moins deux blessés légers, et plusieurs autres personnes ont été intoxiquées par le gaz au poivre.

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Je trouve que la couverture médiatique de ce genre d'évènements devient de plus en plus absurde. En plus de banaliser honteusement les abus policiers, on en vient à réduire l'action à ses conséquences sur la circulation automobile. C'est dégoûtant.

jeudi 22 mars 2012

Lettre d'insultes

Je ne suis pas parvenu à faire suivre cette lettre d'insultes à Stéphane Gendron, auteur de violentes menaces faites récemment à l'égard d'étudiant-e-s « puant-e-s ». Je vous l'offre, pour rire.

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Cher M. Stéphane Gendron,
comme plusieurs autres étudiant-e-s en grève, j'ai été sidéré de lire votre déclaration violente et nauséabonde, relayée par les médias de masse au cours des dernier jours. J'ai ressenti, au moment de prendre connaissance de vos propos, une grande colère. Je me suis demandé combien de gens, vous considérant comme une autorité en la matière, verraient dans votre déclaration une sorte d'approbation des actes de violence qu'ils pourraient poser éventuellement à l'égard des activistes étudiant-e-s. Je me suis demandé, avec plus d'inquiétude que de colère cette fois, combien de policiers/ères vous lisent, et à quel point le comportement de certain-e-s d'entre eux pourrait être modulé par une telle incitation à la violence contre des citoyen-ne-s dérangeant-e-s mais tout à fait paisibles.
On sait que les policiers/ères, se distinguant d'autres corps de métier par leur agressif sentiment d'appartenance, ne figurent pas parmi les individus les plus difficiles à influencer par un appel à la violence, au racisme ou à d'autres formes de discrimination.
Le fait que vous ayez pu rester prisonnier du trafic aussi longtemps - peut-être devriez-vous songer à prendre le transport en commun la prochaine fois au lieu de contribuer à l'engorgement - sans pouvoir consacrer ces longues heures à trouver des phrases plus poétiques que « Câlisse on veut aller travailler bande d'esties de puants sales » est selon moi signe d'une absence totale de génie. Eh quoi ? Pas une seule figure de style ? Même pas les habituelles allusions sexuelles, typiques du rôle de gros épais que vous jouez à la télé ?
Notez que j'ai réfléchi longtemps avant de vous envoyer ce message, hésitant entre une lettre soupesée et diplomate, dans laquelle je vous aurais expliqué pourquoi les étudiant-e-s avaient sans doute commis ce geste irréparable, et une pure lettre d'insulte. J'aurais pu essayer de vous faire ressentir, par empathie, le désespoir de plusieurs jeunes face à la situation globale de notre système d'éducation postsecondaire.
Mais plusieurs choses m'ont découragé de tenter de vous convaincre. Tout d'abord, le fait que vos ayez choisi de dénoncer si violemment un mode d'action auquel vous avez vous-mêmes eu recours il y a quelques temps, avec toute l'impunité du monde, me laisse croire que vous êtes un individu irrationnel. Ensuite, vos décisions absurdes et dignes d'une junte militaire, comme celle de déclarer un couvre-feu pour les jeunes à partir de 22h30 il y a quelques années, remet votre récente déclaration en perspectives. Cela dit, inutile de revenir si loin dans le passé : votre suggestion de faire appel à l'armée pour « bastonner » des étudiant-e-s sans armes est en soi un argument suffisant pour vous placer dans la catégorie des fiers héritiers intellectuels de Göring.
Voilà donc le dilemme auquel je fais face : tenter de dialoguer avec un mini-tyran tel que vous est-il une perte de temps ? Je ne suis pas idiot. Votre brutalité verbale vous disqualifie en tant qu'individu sensé. Les gens comme vous, en fait, qui ne veulent s'exprimer que par la force ne comprennent hélas qu'une seule et même chose : la force.
Vous rendre la pareille en vous insultant vertement m'apparaît donc, sans être particulièrement serviable pour la cause, bien plus pédagogique.
Peut-être qu'un flot de lettres vous fera un jour comprendre que vous traversez depuis longtemps une phase de négation presque schizophrène ; que l'État de droit dont vous rêvez n'est en fait qu'un autre État policier et que vous n'êtes, au fond, qu'un petit Napoléon sur son cheval de bois, brandissant une cravache ridicule en hurlant.
Je vous souhaite tout le bien du monde, et surtout de vous trouver enfin une bonne place dans un hôpital psychiatrique.
Au revoir,
c'est signé.

mercredi 21 mars 2012

Manif demain, 13h00, Montréal, Place du Canada.

C'est à la Station Bonaventure. Si vous n'avez pas l'habitude des manifs, sachez que lors d'un rassemblement de cette taille, on attend généralement entre 40 minutes et une heure et demie avant de se mettre à marcher. Donc vous pouvez arriver en retard.

Quelques personnes ont montré, à mon grand étonnement, des inquiétudes face à la présence de la police lors de cette manifestation. Rappelons que c'est une manifestation nationale et que les chances pour qu'une répression massive ait lieu sont presque nulles.

Je comprends tout à fait qu'on n'y aille pas pour des raisons politiques, à cause de l'éloignement, ou d'un empêchement, mais la peur de la répression n'est absolument pas une bonne excuse. Hier, plusieurs étudiant-e-s se sont réuni-e-s devant les bureaux de Bachand, sur Côte-des-Neiges[1], et malgré la présence de plus de vingt policiers/ères plutôt agressifs/ives et méprisant-e-s, il n'y a pas eu d'affrontement. Idem au 600, rue Fullum.

Il y a aussi le fait qu'il est à peu près impossible de brutaliser une foule de plus de 8 000 personnes au Québec. Et demain, nous serons certainement plus que 50 000 (je m'attends à ce que nous soyons peut-être même au-dessus de 100 000). Donc il faut selon balayer cette menace du revers de la main. Venez donc.

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[1] Les bureaux les mieux gardés que j'aie jamais vus. La SQ était là. N'oubliez pas que le même édifice comprend aussi une clinique de pédiatrie. Des dizaines de femmes enceintes et de couples avec enfants passent par le même couloir qui conduit au bureau du ministre.

mardi 20 mars 2012

Solidarité avec les travailleurs/euses d'Aveos

Les ex-employé-e-s d'Aveos ont goûté ce matin à la répression de l'État et du capital, par le biais de l'intervention du bras armé de la tyrannie: la police. Montréal aura beau dire ce qu'elle voudra contre Aveos, envoyer ses chiens écervelés contre le piquet de grève - ou de chômeurs/euses en boycott? - est une manière de trahir des travailleurs/euses spolié-e-s de leur droit de gagner leur vie dans la dignité.

La police ment en disant qu'elle n'a pas utilisé de poivre de cayenne, pas de doute là-dessus. Mais ces brutes épaisses peuvent mentir à loisir. On ne leur reprochera jamais, chez les esclaves opulents du gouvernement, de le faire. Comme matante Line ne reprocherait jamais à son cabot de déchiqueter la pantoufle du voisin.

Les gens d'affaires, policiers/ères et politicien-ne-s jouissent d'une impunité totale dans cette histoire. Fausses promesses, lois contournées avec la complicité la plus totale de l'État, et maintenant, humiliation[1] et intervention armée contre ces mêmes travailleurs/euses qui sont pourtant tout à fait dans leur bon droit.

Cet évènement, comme le budget insultant du ministre Bachand, prouve que nous ne pouvons plus mener de petites luttes corporatistes chacun-e-s de notre côté.

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[1] On leur a remis une injonction de la cour en anglais seulement!

lundi 19 mars 2012

Blocage au ministère de l'éducation (Fullum)

Je reviens d'une manifestation ayant eu pour objectif de bloquer les bureaux du ministère de l'Éducation à Montréal, au 600 rue Fullum, dès 7h00 ce matin. Pendant ce temps, d'autres manifestant-e-s maintenaient le blocage complet du Cégep Maisonneuve.

Environ une centaine de personnes sont restées pour maintenir le blocage du 600, rue Fullum, malgré les menaces de l'escouade antiémeute venue pour réprimer la foule. Comme je suis arrivé vers 10h00, je n'ai pas vu grand affrontement. Il semble bien toutefois que les étudiant-e-s aient bel et bien réussi à bloquer complètement l'édifice pendant un certain temps, puisque ce n'est qu'à mon arrivée que les employé-e-s ont pu parvenir à entrer. Quelques employé-e-s rébarbatifs et dégoûté-e-s, visiblement, par le gouvernement, ont toutefois décidé de ne pas rentrer au bureau (du moins pas tout de suite), s'attirant les applaudissements de la foule et plusieurs poignées de main.

Le blocage s'est ensuite transformé en manifestation. Nous nous sommes rendu-e-s jusqu'au Parc Émilie-Gamelin, devant l'UQÀM, avant qu'une personne nous annonce qu'elle savait où se trouvait Jean Charest. Nous avons donc continué de marcher vers le centre-ville, feintant à quelques reprises pour tromper l'escouade anti-émeute qui tentait d'anticiper nos mouvements. Quand nous sommes arrivé-e-s à destination, nous n'étions malheureusement plus que trente à cinquante. Un manifestant a alors fait une déclaration au mégaphone, reliant la lutte étudiante au Plan Nord, qui vise à "crosser les Innus" à grands frais, alors que l'argent investi (80 milliards?), pourrait être transféré en éducation ou bien tout simplement pas dépensé.

Plusieurs liens ont été donc faits avec les luttes sociales et démocratiques actuelles, que ce soit la lutte contre la corruption, la brutalité policière et les gaz de schiste. Malgré la petite taille de la manifestation, le discours était donc varié et dynamique.

dimanche 18 mars 2012

Que fait cette méchante radicale cagoulée?

COBP, 15 mars 2012.



Pourquoi la jeune femme cagoulée est-elle donc penchée sur ce citoyen ordinaire? Sûrement essaie-t-elle de l'agresser. Quand tu portes un masque, c'est nécessairement parce que tu veux commettre un crime, non?

4min10.

samedi 17 mars 2012

Staline le pacifiste.


Mon premier meme.

Gérald Tremblay, autoritaire zélé.

Au tour de Gérald Tremblay de menacer les populations les plus vulnérables en évoquant la possibilité de forcer les organisateurs/trices à chercher un permis pour manifester et à fournir un itinéraire. Sur le plan rationnel, il y a une grande confusion dans ce qui justifieraient de telles mesures. On nous dit tout d'abord que c'est essentiel pour assurer une meilleure fluidité dans la circulation. Ensuite, ça devient une question de sécurité. Ben oui, quoi! Un automobiliste pourrait perdre patience et foncer sur les manifestant-e-s[1]! Mais la justification la plus évidente, niée par le SPVM, est trahie par le maire de Montréal.

Il s'agit de pacifier.

Mais ça ne fonctionnera pas. Violer les droits des manifestant-e-s, les empêcher de protéger leur identité, ça va simplement mettre le feu aux poudres. Les flics ont rompu en premier le fameux contrat social dont on nous parle tout le temps avec grandiloquence. Les populations visées par le contrôle ne se sentent plus obligées de le respecter.

Quand les autorités changent de stratégie, les manifestant-e-s eux aussi s'adaptent. Par aucun moyen les forces policières ne pourront empêcher les gens de perturber la vie insipide des citadin-e-s pour exprimer leur colère.

Seules des mesures réelles en vue d'atténuer les abus policiers peuvent empêcher les « débordements ». C'est l'unique moyen d'apaiser (temporairement) la colère.

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[1] Illes l'auraient bien cherché, dirait-on chez les autoritaires des mass médias avec la même rhétorique qui sert à défendre des violeurs prétendument provoqués par des tenues trop affriolantes.

André Poulin, cet autoritaire qui ne comprend pas.

André Poulin, homme d'affaires admiré et directeur d'un groupe de commerçants, a appelé à une répression plus sévère des « émeutiers/ères » lors des manifestations comme celle de la journée internationale opposée à la brutalité policière. Sans même comprendre que justement, cette répression qui le fait bander est responsable des troubles sociaux, et que ceux-ci ne cesseront pas tant que la police procédera à des fouilles abusives, du profilage social, politique et racial, qu'elle arrêtera du monde pour rien, qu'elle blessera des jeunes et qu'elle assassinera du monde.

Poulin ne comprend pas. Comme plusieurs, il dénonce la lenteur de l'action de la police, qui a selon lui laissé les jeunes démolir les vitrines sans agir de manière proactive. Il veut des peines plus sévères pour des offenses qui sont, au bout du compte assez mineures. Il se plaint des pertes de revenus des commerces du centre-ville, comme BCBG et Future Shop. L'homme d'affaires qui s'inquiétait avec un humanisme dégoulinant de paternalisme patronal du chômage des pauvres gens a bien évidemment les priorités à la bonne place. Pendant que les jeunes sont opprimés, pendant que certain-e-s Noir-e-s sont contrôlé-e-s plusieurs fois par jour, pendant que les itinérant-e-s meurent comme des chiens sur le trottoir et dans le métro, l'entrepreneur opulent verse quelques larmes sur une seule soirée qui ne fut pas tout à fait aussi profitable que les autres pour les petit-e-s et grand-e-s patron-ne-s du centre-ville.

André Poulin ne comprend pas, finalement, que la présence des forces de l'ordre est un gage de désastre. Que des hommes armés dans les rues, peu importe l'idéal qu'ils peuvent servir, ne seront jamais que la cause d'oppressions, de viols, de meurtres.

Plus d'ordre entraîne plus de désordre. Il faut bien rétablir l'équilibre, non?

mercredi 14 mars 2012

Puisqu'il le faut...

Me sentant interpellé par les encouragements des journalistes à ne pas encourager les « casseurs extrémistes », j'ai décidé d'adopter de nouveaux moyens de pression pour ne pas choquer les médias.


S'il-te-plaît, Line Beauchamp, annule la hausse des frais de scolarité[1].

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[1] Lol, la tête que doit faire la ministre attendrie par la photo de chaton. Elle tiendra pas deux jours.

Mise à jour.

mardi 13 mars 2012

cercle vicieux "pacifiste"

Les médias ont tellement tapé dans les militant-e-s "violent-e-s" qui créent de la "perturbation" et du "grabuge" que les étudiant-e-s eux-mêmes, traumatisé-e-s par ce qu'on dit d'eux dans les médias de masse, en viennent de plus en plus à affronter physiquement des jeunes qu'on qualifie souvent d'extrémistes ou de vandales.

Il y a maintenant des réactions ironiquement très violentes quand des manifestant-e-s un peu plus radicaux posent des actions de désobéissance civile qui menacent, selon les certain-e-s, l'ordre public. Selon moi, ces réactions d'affrontement ne servent en rien à limiter le possible déclenchement de répression brutale des policiers/ères. Au contraire, on sait bien qu'une simple bagarre (heureusement la plupart du temps évitée) peut donner un prétexte à la police pour déclarer la manifestation illégale. Ça s'est déjà vu, incluant pendant la manif du premier mai 2008.

Les gens qui empêchent de manière violente d'autres manifestant-e-s de poser des actes plus radicaux sont selon moi des hostie d'épais-se-s, qu'illes se prétendent pacifistes ou non. Illes ne comprennent tout d'abord pas que plus d'ordre provoque systématiquement plus de désordre. Ensuite, je trouve ironique qu'illes puissent oser frapper ou pousser d'autres manifestant-e-s qui ne s'attaquent pourtant pas à eux, tout en répondant aux coups de matraques policières par des signes de Peace. Je peux comprendre la stratégie médiatique ici, mais ça reste complètement con et toute opération de relations publiques ne vaut pas un bras cassé; un moment donné, il faut aussi différencier ses ennemi-e-s de ses ami-e-s, comprendre qui représente une menace et qui n'en représente pas pour soi-même.

Je suis moi-même non-violent, comme, par ailleurs, le sont une bonne proportion des anarchistes du « Black Block ». Tout dépend bien sûr de ce qu'on entend par le mot « violence ». Je ne suis pas non plus un adepte des graffitis. Pas parce que je suis contre, mais parce que les canettes de peinture, ça pue. Je n'ai pas l'habitude de briser des trucs non plus. Notez aussi, avant de tout mettre sur le dos des anars, que ce sont souvent des anars, justement, qui vous soignent quand la police fait joujou avec vous.

Mais ça ne m'empêche pas de respecter la diversité des tactiques. Premièrement parce que les manifestant-e-s qui s'attaquent à du matériel ne s'attaquent pas à moi, ni à des innocent-e-s, d'ailleurs. Mais je m'abstiens aussi par intelligence. Les gens qui en attaquent d'autres physiquement ne connaissent tout simplement pas les conséquences atroces qu'un affrontement entre manifestant-e-s peut déclencher. Elles peuvent être en soi plus graves que la répression policière.

Au G-20 de Toronto, des syndicalistes modéré-e-s formaient des chaînes pour empêcher les plus radicaux et radicales d'affronter les rangées de flics. Il n'y a pas eu de contact physique. Si vous êtes contre le fait de casser des voitures de flics, faites de même, tiens. Vous le faites bien devant les flics, qui sont pourtant bien plus dangereux! Ou tentez de vous exprimer oralement. Les anars ne demandent que ça, s'expliquer.

J'ai aussi des doutes sur la cohérence de plusieurs manifestant-e-s pacifistes. Pendant la manifestation silencieuse du 12 mars dernier, des « pacifistes » ont ordonné à plusieurs reprises à d'autres manifestant-e-s de se taire, même quand leurs chuchotements étaient couverts par le bruit de leurs propres pas. Certain-e-s étaient tellement fanatiques dans leur consigne de silence qu'illes lançaient des « chut » à des passant-e-s qui parlaient au téléphone et marchaient sur le trottoir.

Cette procession n'était pas une action symbolique, mais une forme de censure immense du bruit, une mise en scène absurde de totalitarisme consenti, une négation de la liberté et du chaos nécessaires à la création comme à l'échange. La foule était en cela plus docile qu'un troupeau de bétail à l'abattoir, plus tranquille qu'une escadrille d'écoliers/ères qui sortent de l'école en rangs. Comment peut-on revendiquer le pacifisme dans l'homogénéité imposée, et le silence absolu? Si c'est ça le pacifisme, eh bien le stalinisme aussi c'est du pacifisme.

Où ils ont fait un désert, ils disent qu'ils ont donné la paix.
- Tacite.

Retour sur le cabaret.

Il semblerait que plusieurs féministes se soient mises en colère suite au cabaret anarchiste du 9 mars dernier au DIRA, et ce pour plusieurs raisons tout à fait légitimes. En gros, les critiques qui ont été faites concernent l'absence de parité dans les numéros (environ 4 femmes contre environ le double d'hommes), le non-respect du thème de la soirée ainsi qu'un numéro en question présenté par deux personnes (un homme et une femme) qui a mis tout le monde très inconfortable. Malheureusement, je n'ai pas parlé aux personnes ayant émis les critiques. Les commentaires négatifs me sont parvenus par des intermédiaires. Donc si vous faites partie des auteur-e-s de la critique en question, eh bien dites-le.

Sur une note positive, cela dit, les performances des trois femmes en solo - trois membres de l'AWB, par ailleurs - on été très belles. La chanteuse de Die Satchko a, je trouve, un très grand talent[1]. De plus, sa chanson sur les sorcières rappelait inévitablement le célèbre groupe féministe, que ce soit volontaire ou non. Une des autres femmes a parlé des Mujeres Libres et elle a déclamé un très beau poème, traduit de l'espagnol au français simultanément, écrit par une des militantes de l'organisation espagnole. La dernière participante a lu un texte, délicieux et très vindicatif d'une auteure féministe.

Une des performances a aussi consisté à permettre à tous et à toutes de prendre des livres au hasard dans la section féministe de la bibliothèque libertaire et de citer des passages choisis spontanément.

D'autres performances, exécutées par des hommes, avaient le féminisme pour sujet central. Deux ou trois numéros seulement sont sortis du thème (dont le mien)[2]. Et c'est normal! C'est une soirée à micro ouvert. Les gens arrivent avec ce qu'ils ont à offrir. Le thème de la soirée est habituellement une trame de fond qui sert à inspirer, pas à contrôler.

Le comité d'organisation n'a aucun contrôle sur le nombre de performances faites par des femmes ou des hommes. Il prend ce qui vient. J'admets qu'habituellement, le mode d'inscription sur la liste de numéros m'apparaît plus clair.

Quant au (dernier?) numéro, je partage totalement la colère de plusieurs personnes présentes à la soirée. Je trouve que la relation qu'entretenaient le musicien et la musicienne n'apparaissait pas du tout égalitaire. Pour faire une histoire courte, l'homme a imposé toutes ses décisions sans consulter sa co-interprète, même si celle-ci semblait parfois en désaccord avec lui.

Je suis évidemment relativement déçu par la tournure des événements. Le 8 mars dernier a déjà été une épreuve suffisamment désagréable pour les féministes récupérées par certains éléments du mouvement étudiant ou nationaliste. Le cabaret aurait dû être une occasion pour les féministes d'affirmer leur présence de manière plus libre. Ce fut certainement le cas, mais ce ne fut pas parfait.

À la décharge du comité d'organisation du cabaret, eh bien... il n'y pouvait rien. Aurait-on pu mieux se préparer? Eh bien je pense que non. Déjà, je trouve qu'il y avait trop d'organisation. Si on se prépare mieux, ce sera plus une soirée à micro ouvert.

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[1] Comme le reste du groupe, d'ailleurs. Je vous conseille fortement de vous tenir au courant de leurs concerts.
[2] Notez que les trois-quarts de mon numéro a été constitué par la lecture de deux textes écrits par une femme. Ces textes ne concernaient pas directement le féminisme, mais le désir. Toutefois, cela remet en perspectives la question de la présence des femmes au Cabaret et du rôle de certains numéros produits par des hommes, qui ont été en grande partie une simple courroie de transmission pour des paroles de femmes.

dimanche 11 mars 2012

femmes et "printemps arabe"

Les intégristes musulmans de Tunisie sont, depuis plusieurs années, hyperactifs. Depuis longtemps déjà, ils intimident les femmes ne portant pas le voile ou sortant à des heures "déraisonnables" le soir. Ça s'est empiré depuis la révolution, qui a entre autres permis aux rats intégristes en exil de revenir au pays. Mais quand j'y suis allé en 2005, il paraît que ça avait déjà commencé à changer. Parce que les intégristes fourmillaient dans les rues malgré le départ de certains leaders de en-Nahda qu'on décrit souvent aujourd'hui, ironiquement, comme des modérés. Malgré tout, une vaste majorité des femmes aperçues (dehors) à Tunis ne portaient pas le hidjab.

Les salafistes de Tunisie ont récemment pris d'assaut la fac de Lettres de Tunis parce que celle-ci ne tolère pas le niqab, avec des sabres et des couteaux.

Pendant ce temps en Égypte, on menace de remplacer le Conseil de la Femme par un "conseil de la famille", histoire de cantonner les femmes à leur rôle de mère et de ménagère. Même si les militantes féministes n'ont pas disparu de l'avant-scène - bien au contraire - la situation se dégrade dangereusement.

samedi 10 mars 2012

La perturbation... perturbe.

S'il n'en tenait qu'à Claude Trudel, qui appuie néanmoins le travail du SPVM, nous n'aurions qu'à continuer de se faire péter la yeule dans des manifs pour amener le gouvernement à la table de négociations.

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J'enjoins mes semblables à ne PAS bloquer de cliniques médicales, même totalement privées, même par accident. La rumeur court que des patient-e-s n'ont pas pu se rendre à leur rendez-vous, le 7 mars dernier. Je sais pas pourquoi, mais j'aimerais recevoir des éclaircissements. Ont-illes simplement été bloqué-e-s sur la route en voiture, ou refoulé-e-s par les flics? Dans quels cas on ne peut pas faire grand-chose.

J'enjoins aussi mes camarades à ne PAS bloquer le pont. Le pont n'est pas responsable de la hausse des frais de scolarité (quoi qu'en dise A., pour rire). Ce n'est pas une question de relations publiques. C'est simplement que tant qu'à faire une action d'éclat, vaut mieux ne pas gaspiller d'énergies sur le pont.

Cela dit, je trouve que plusieurs personnes et chroniqueurs/euses exagèrent. Les voitures - du reste polluantes - de Montréal et de la banlieue n'ont absolument pas besoin de manifestations étudiantes pour créer de l'embouteillage. Elles le font déjà très bien toutes seules.

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J'ai décidé de ne pas parler de Francis Grenier, le jeune blessé à l'oeil le 7 mars dernier, parce que j'avais peur qu'à force de dénoncer les porcs qui sont responsables de sa blessure (et des nombreuses autres blessures occasionnées par les fameuses grenades sonores), on en viendrait à le transformer en simple instrument de lutte. Je ne sais pas si ce serait vraiment lui rendre service. Il est devenu en quelques heures un des symboles les plus importants de la lutte contre le gouvernement brutal de Jean Charest.

Espérons qu'il ne devienne pas un des nombreux et futurs éclopés psychologiques de la grève étudiante[1].

Toutefois, voici à quoi cette histoire me fait penser: à l'Égypte. Une coupure sévère à l'oeil est une blessure typique des manifestant-e-s qui décident de résister à une opération de répression étatique. En mai dernier, quand je suis parti travailler là-bas, des centaines de jeunes portaient toujours des bandages sur un oeil. Dans les journaux, on parlait beaucoup des aveugles de la révolution, les malchanceux (plus rarement les malchanceuses) qui avaient perdu un oeil, puis l'autre... dans deux manifestations successives. Une blessure à l'oeil, c'est une blessure de manifestant-e. Et j'oserais dire, en quelque sorte, une blessure de héros.

Francis Grenier n'est que le premier blessé du genre ce printemps. Il y a eu d'autres blessé-e-s. Et pas des blessé-e-s comme l'infâme policier Ian Lafrenière, qui aurait reçu une balle de neige en arrière de la tête et qui deux minutes après, parle aux médias comme si de rien n'était.

Si la répression se poursuit, les chances augmentent pour que le Québec soit peuplé de jeunes borgnes.

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[1] Si j'étais le porte-parole de la CLASSE, une des premières choses que je ferais après la grève, c'est m'isoler complètement et puis aller visiter un psy, au moins pour m'assurer que tout est correct. Mais si j'avais été la CLASSE, j'aurais envoyé au front plusieurs porte-paroles, afin que la responsabilité retombe sur les épaules de l'organisation plutôt que sur un ou deux individus.

vendredi 9 mars 2012

Cabaret anarchiste, ce soir.

Claude Legault à Paul Arcand.

Extrait de l'entrevue donnée à Claude Legault par Paul Arcand, à partir de 5min15.

Lien« P.A: Est-ce que tu as rencontré les policiers?
C.L.: Ah, j'ai parlé avec les policiers hier, oui. J'ai parlé avec euh, avec des policiers hier, j'ai parlé avec euh, Ian Lafrenière, j'ai... oui oui, j'ai parlé avec eux-autres.
P.A.: Et eux, y deufg...
C.L.: Y me connaissent aussi, y savent très bien, y connaissent mon tempérament aussi, y savent très bien que... c'est pas ce que je voulais dire. Euuuuh... Mais, bon, même même le journaliste qui, qui a fait le le le truc m'a appelé hier soir [...]. »

Je ne veux pas taper sur Legault, qui continue d'appuyer le mouvement de contestation malgré ses positions tièdes sur les moyens d'action et sa faible analyse des manifestations, infiltrées paraît-il par des casseurs.

Mais qu'est-ce que Lafrenière, porte-parole aux médias pour le SPVM, vient faire dans cette histoire? L'affaire Legault serait-elle plus une affaire de relations publiques de la police qu'une affaire d'incitation au vandalisme? Les faveurs qu'il a obtenues du SPVM grâce à sa série 19-2 (qui selon moi était complaisante avec la police) étaient-elles en jeu? Legault parle comme si la police était un peu comme sa famille. "Y me connaissent aussi." Un père qu'il aurait déçu. Mais qui pardonne.

jeudi 8 mars 2012

Même si l'UQÀM le nie.

OUI il y a une activité appelée « Nuit de la création illimitée » qui aura lieu à l'UQÀM le 12 mars prochain.

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On sait maintenant que les clôtures de métal dressées debout et posées sommairement, ça fonctionne pas.

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En fait, on le sait depuis le Sommet de Québec.

Toutes mes pensées vont aux blessé-e-s et arrêté-e-s de la manifestation d'aujourd'hui. Sauf Ian Lafrenière. Lui, il peut bien sécher, l'hostie.

mardi 6 mars 2012

Appel aux actions contre le gouvernement.

Je suis relativement jaloux de l'action de Greenpeace, qui a occupé les bureaux de Charest pour défendre, par ailleurs, une cause tout à fait juste. Je trouve que c'est tout à fait le genre d'évènement qui peuvent faire plier un gouvernement.

Ce sont des actions du même genre que je propose d'accomplir au cours des prochaines semaines. Nous devrions (et je ne sais pas si l'idée a été lancée jusqu'à maintenant - je l'espère) tenir une journée d'occupation ou de blocage des bureaux de député-e-s libéraux. De tous leurs bureaux simultanément.

Nous devrions aussi menacer le gouvernement refuser massivement de payer nos frais de scolarité à l'automne s'il maintient la hausse.

Ok, je sais, c'est pas réaliste.

samedi 3 mars 2012

Nécessaire désobéissance.

Voici le texte complet envoyé à La Presse suite à la parution de l'article de Robert E. Boyd, le 17 février dernier, le lendemain du blocage de la tour de la Bourse. La rédaction du quotidien, après m'avoir fait poireauter pendant trois jours, a fini par m'avertir qu'elle lirait mon texte. Après, plus de nouvelles. Je crois que le texte n'a pas été publié en raison des attaques personnelles assez sévères qu'il contient.

L'article contient les mêmes informations que celles contenues dans ce billet: Le moralisateur de la Tour de la Bourse.

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Dans un texte d'opinion intitulé « non à la désobéissance civile », un avocat travaillant au centre-ville de Montréal s'est plaint de n'avoir pas pu, hier, se rendre au travail. Des activistes de tous les milieux bloquaient en effet hermétiquement la Tour de la Bourse ‒ dans laquelle se trouve le prestigieux cabinet d'avocats qui l'emploie ‒ afin de dénoncer les diverses hausses de tarifs imposées par le gouvernement provincial.
Sur un ton plutôt moralisateur, il affirme que les étudiants et étudiantes devraient accepter de faire des sacrifices et apprendre à « revendiquer des droits d'une manière civilisée ». Il se dit aussi très déçu que les forces policières aient été aussi lentes à réagir. Mais surtout, il accuse les manifestants et manifestantes d'avoir violé « la liberté de travail et le droit d'accès à une propriété privée des personnes qui assument honnêtement un lourd fardeau fiscal ».
Je comprends tout à fait la colère des travailleurs et travailleuses honnêtes qui ont dû rebrousser chemin devant la ligne de protestataires. Cela dit, je trouve un peu ironique que cette plainte vienne d'un avocat de la firme Dunton Rainville. Une firme à laquelle, selon Rue Frontenac, la ville de Laval aurait sans soumission préalable accordé entre 2007 et 2009 des contrats totalisant une somme de trois millions et demie de dollars[1]. Une firme qui aussi, rappelons-le, a été impliquée de près ou de loin dans le scandale des compteurs d'eau[2] à Montréal.
Mais ma lettre ouverte ne vise pas du tout à remettre en question l'intégrité de l'honnête travailleur qui a publié le coup-de-gueule précédent. Seulement, je suis étonné de la teneur des arguments employés. Quel « fardeau » portent donc les employé-e-s de la firme Dunton Rainville, une entreprise financée de manière plus ou moins transparente par l'argent des citoyens et citoyennes ? Les politiques douteuses de corporations sans scrupules et de dirigeants complaisants ne sont-elles donc pas, à bien plus forte mesure, responsables de la faillite sociale que de nécessaires investissements publics en éducation et en santé ?
Bien entendu. Pour les raisons susnommées, et dans le contexte actuel, une proportion plus ou moins large des cadres travaillant à la Tour de la Bourse ajoutent donc plus de poids au « fardeau » collectif qu'ils n'en enlèvent.
Les manifestants et manifestantes ayant participé au blocage d'hier (notons que la majorité d'entre eux provenaient de syndicats et d'organismes sociaux, et non pas du milieu étudiant) n'ont donc pas visé cet immeuble pour rien. Ils ne s'en sont pas pris à un CLSC ou à une usine peuplée de travailleurs et travailleuses ordinaires, mais bien à un symbole de la collusion entre le milieu des affaires et le gouvernement, un problème qui coûte bien plus cher à la société, annuellement, que des « frais de scolarité beaucoup trop bas », liés selon l'auteur au déficit public actuel.
Ce dernier accuse en outre les étudiants et étudiantes de ne pas avoir consacré assez d'énergie à constituer un « argumentaire convaincant ». C'est ignorer, justement, les efforts des différentes associations étudiantes et instituts de recherche qui ont passé les deux dernières années à publier un grand nombre d'études visant à démonter de manière rigoureuse les clichés éculés que l'auteur du texte contribue malheureusement à répandre.
L'avocat à l'origine du débat actuel, dont le confort est peut-être, qui sait, en partie lié à des contrats signés avec le gouvernement, est bien placé pour comprendre que l'argent qui sert à le payer est une ressource rare qui pourrait bien être affectée ailleurs par la collectivité. Devant les excès de ses patrons, collègues, associé-e-s et administration contractuelles (il devrait les dénoncer au lieu de les dépeindre comme des victimes « prises en otage »), des actions de dénonciation et de perturbation sont tout à fait nécessaires et légitimes.

[1] de Pierrebourg, Fabrice. « Laval: au moins 80 M$ obtenus sans soumission en trois ans pour un « club fermé » d'entreprises. » Rue Frontenac, Dimanche, 30 mai 2010. En ligne: http://exruefrontenac.com/nouvelles-generales/politiquemunicipale/23402-laval-contrats-sans-soumission (page consultée le 17 février 2012).
[2] Lévesque, Kathleen. « Compteurs d'eau - la firme-conseil de Montréal est encore associée à l'entrepreneur. » Le Devoir, 10 avril 2009. En ligne: http://www.ledevoir.com/politique/villes-et-regions/244913/compteurs-d-eau-la-firme-conseil-de-montreal-est-encore-associee-a-l-entrepreneur (page consultée le 17 février 2012).

vendredi 2 mars 2012

À Radio-X: il y en a eu, des blessé-e-s et des fractures.

Hier, Gabriel Nadeau-Dubois, de la CLASSE, a eu le malheur de se faire passer dessus par les animateurs de Radio-X au show du matin. Il se fait bombarder de questions: y-a-t-il eu des jeunes qui ont dû aller à l'hôpital suite à des blessures provoquées par les matraques policières cet hiver?

La réponse, c'est OUI. Cela dit, contrairement à la droite qui est passée maître dans la victimisation d'une population soi-disant « prise en otage » par une manifestation qui retarde les automobilistes de « deux heures », les personnes agressées par les policiers/ères n'ont pas toutes une tribune dans les mass médias.

Une personne dont nous tairons ici le nom, mais qui est tout à fait paisible et raisonnable, a subi plusieurs fractures après avoir simplement tenu son boutte devant une ligne de flics enragés, armée de ses seules mitaines. Nous la laisserons témoigner quand elle sera prête.

Mais ce n'est qu'un exemple. Des chutes extrêmement dangereuses, il y en a à chaque manifestation. Les policiers ne font absolument pas attention quand ils poussent des citoyen-ne-s. Imaginez-vous en train de pousser quelqu'un qui est de dos le plus fort que vous le pouvez. Vous pensez que vous n'allez pas faire mal à la personne que vous agressez? Ça arrive pourtant souvent. Pendant le célèbre blocage de l'Hôtel Delta (le 16 février dernier)[1], j'ai vu plusieurs manifestant-e-s pacifiques basculer cul par-dessus tête. Quant aux coups de matraques, menaces et utilisations de poivre de cayenne pas du tout méritées, elles sont innombrables. Une masse d'incrédules ne croient pas à ce genre de choses, même quand illes ont des images à l'appui. C'est toujours le même discours: il y a certainement du montage. On filme juste le moment où il y a de l'abus, mais on coupe le « crime » qui a été commis plus tôt par un-e manifestant-e de toute façon violent-e. Dans tous les cas, il y a une vague de négation qui précède l'acceptation des faits. Voilà souvent la scène qu'on s'imagine en fait. Même lors de l'épisode des faux manifestants de Montebello en 2007, pendant longtemps - et même après l'aveu de la police! - il s'en est trouvé, parmi les larbins de l'État policier, pour maintenir qu'il n'y avait pas de preuves permettant d'affirmer que les hommes en question, portant (quelle ironie) des t-shirts de Choi Radio-X, étaient des agents provocateurs.

Il faut noter que la plupart du temps, les manifestant-e-s blessé-e-s ne se plaignent pas aux mass médias. Il n'y a que rarement un compte fiable des manifestant-e-s blessé-e-s lors des manifs. Les blessures comptabilisées sont celles qui mènent à une hospitalisation immédiate et qui sont remarquées par des sources pouvant transmettre des informations aux médias. Et croyez-moi, si un policier se fait écraser l'ongle du petit orteil, les policiers vont s'en plaindre.

La plupart des blessures subies par les manifestant-e-s, selon leur degré de gravité, sont traitées soit sur place, soit le lendemain, le surlendemain ou même la semaine suivante[2], parce qu'illes reçoivent généralement des coups sur le haut du corps, sur les bras ou sur les mains. On peut pourtant dire des victimes de ces blessures, souvent relativement graves (des côtes fracturées, des doigts et bras cassés, etc.), qu'elles sont des blessé-e-s!

De plus, et c'est mon expérience qui le dit[3], les gens intoxiqué-e-s par du poivre de cayenne ou du gaz lacrymogène sont définitivement des blessé-e-s. Heureusement, les blessures causées par du gaz irritant sont généralement moins graves et temporaires. Mais la douleur est souvent plus grave et l'état de panique aussi. Les gens sont déboussolés, souffrent énormément, respirent difficilement même une fois écartés du nuage de gaz, et sont complètement aveuglés. Les effets du gaz lacrymogène peuvent persister plus de 15 minutes - mais pour être certain, j'aimerais recevoir des témoignages précis à ce sujet, surtout après les abus d'hier à Québec - ceux du poivre de cayenne plus longtemps encore. Dans le cas du poivre de cayenne, la peau reste souvent violemment irritée, voire enflée pendant 15 minutes à plus d'une heure. Et cela même après une exposition tout à fait mineure!

Pour illustrer la force de la douleur: vous avez déjà croqué du piment fort? Vous avez déjà, par inadvertance, frotté votre oeil juste après? Ça brûle. Eh ben essayez de vaporiser du piment fort dans vos yeux maintenant. C'est pas comme de l'oignon cru. La douleur qu'on ressent est mille fois plus forte. Tellement que ça brûle sur l'arcade sourcillière, sur les joues, sur les lèvres, que vous la goûtez sur votre langue et dans vos poumons.

C'est de la torture. Et certainement une blessure.

La douleur due aux lacrymos est légèrement différente. Le mot le dit: les larmes sortent. Et plus les larmes sortent, plus les lacrymos font effet: le gaz se transforme en acide au contact de l'eau. La douleur, comme suite à une exposition au poivre de cayenne, est tout simplement atroce. Une exposition légère se révèle selon moi plus bénigne qu'une exposition au poivre, mais le nuage de gaz s'étend à une bien plus grande surface. Et quand on a le malheur d'être à deux pas de la zone d'impact de la grenade, eh bien les symptômes sont graves et tenaces. De plus, comme de règle générale, les policiers ne veulent pas être eux-mêmes contaminés, les projectiles sont jetés au milieu de la foule. Les personnes affectées en premier ne sont pas les prétendu-e-s délinquant-e-s qui affrontent la police, mais les manifestant-e-s qui se trouvent derrière et qui a priori, n'ont rien fait de mal, même selon les critères policiers.

Hier, une centaine de personnes, au minimum, ont été affectées par le gaz lacrymogène utilisé massivement par les policiers protégeant l'Assemblée Nationale. Le témoignage d'une manifestante qui était au mauvais moment au mauvais endroit: « Je ne veux plus jamais que ça m'arrive. »

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[1] Anecdote à part: lors de cet évènement, j'ai remarqué qu'un des policiers présents portait, au-dessus de son matricule (pour une fois, ils ne les avaient pas tous enlevés) une épinglette en forme de fusil-mitrailleur M-16. Thug life, bitch!

[2] Vous connaissez certainement des histoires d'ami-e-s ou de proches qui ont souffert pendant plusieurs jours après s'être donné un coup de marteau sur le pouce, persuadé-e-s que ça partirait tout seul, et qui ont ensuite appris à l'hôpital que l'os était réduit en miettes.

[3] Mes faibles connaissances en premiers soins de manif m'ont amené à soutenir « l'équipe » médicale à plusieurs reprises, surtout cette année, en raison surtout de l'abus de poivre de cayenne et de l'absence de ressources chez les manifestant-e-s. Message aux organisateurs/trices: prévoyez plus de 10 médics la prochaine fois, au moins pour traiter l'irritation aux yeux, et surtout, redonnez-moi ma bouteille! Si je l'avais eue hier à Québec, j'aurais pu traiter plus de vingt personnes supplémentaires. Or, j'étais limité à un litre d'eau. Par une température de -15, je préfère et de loin le Maalox dilué. Le but n'est pas non plus de plonger les manifestant-e-s intoxiqué-e-s dans un état d'hypothermie!