vendredi 31 décembre 2010

Au tour de la Tunisie.

Ce pays, je l'affectionne beaucoup. Il est dirigé depuis une éternité par le tyran Ben Ali. La Tunisie est parfois menacée par l'intégrisme religieux (sans doute moins qu'ailleurs) mais les gens y sont très accueillants. Et il y a comme quelque chose qui bouille dans sa jeunesse. Une profonde intelligence et un désir de révolte.

Il est presque impossible de parler de politique avec ces gens-là. La terreur est répandue car la répression est sauvage.

Ces derniers temps, la Tunisie vit une agitation intense. Je ne sais pas encore comment exactement s'oriente l'opposition, mais j'ose espérer qu'elle mènera vers l'expulsion de la tyrannie et que les miséreux/euses ne se laisseront pas séduire par d'autres avenues tout aussi nauséabondes que le parlementarisme de façade actuel.

Mon soutien à ce peuple qui veut vivre librement, dignement et en paix.

mercredi 29 décembre 2010

La psychose de la droite 2 - la presse libérale et Khadir

Le nombre d'articles qui a suivi la rumeur est incroyable. Démêler tout ça serait une recherche passionnante mais laborieuse. Nous allons donc nous en tenir à l'essentiel du bêtisier.

Après le commentaire insipide de Duhaime à la télé et dans le journal, plusieurs éditorialistes y sont également allés de leur charge personnelle. C'est d'ailleurs assez étonnant parce que généralement, les sujets traités par Duhaime, on s'en câlisse. Mais pas cette fois.

Le 17 décembre, on "accuse" Khadir de boycott. Le titre est étonnant mais l'acharnement ne fait que commencer. Apparemment inciter à la responsabilité est un nouveau crime passible de poursuites judiciaires. Mais les attaques fusent surtout à partir du 20 décembre.

Vincent Marissal écrit: "Le danger avec ces mouvements, c’est que l’on sait où ça commence, mais on ne sait pas toujours où ça finit. Je présume que le député de Mercier se contentera, pour ête cohérent, de vin de dépanneur pour les Fêtes puisque la SAQ vend quelques bouteilles de vin israëliens[1]."

Ce genre de critique est assez courant à l'égard de Khadir. C'est totalement ignorant de la dynamique d'un boycott et/ou de ce qu'on appelle choisir des cibles réalistes avec les moyens du bord. Et c'est ce pourquoi je crois sincèrement que ce genre d'attaques est de mauvaise foi. Sur le plan stratégique, même si c'est questionnable, le PAJU avait plus de chances de faire céder un petit commerçant dont les ventes de produits israéliens représentent un montant non-significatif qu'une chaîne avec des succursales partout. Le PAJU et ses allié-e-s n'ont en fait pas du tout les reins assez solides pour entâmer une campagne de boycott national de la SAQ. Attaquer leur cohérence à l'aide d'un tel argument est donc légèrement vain et s'apparente selon moi à du sophisme.

C'est très voisin de l'argument qui est sorti dans les jours suivants et qui a été répété à nous en rendre malades. Dans le Devoir, on publiait une courte lettre qui le résumait bien: "Cependant, pour donner encore plus d'envergure à votre campagne pour la justice, je vous suggérerais d'en appeler aussi au boycottage des quelques commerces dans le comté de Mercier qui vendent des produits chinois, la Chine étant un autre pays où le bilan des droits humains est un mégadésastre. "

En bref, cela consiste à dire que si on lutte contre une injustice, il faut impérativement être partout à la fois et combattre toutes les injustices semblables. Sinon, on "souffre de trouble obsessionnel". C'est une des choses qu'on reproche à Khadir afin de le dépeindre comme quelque chose qui s'apparente à un malade mental: "L'antisionisme obsessionnel de M. Khadir l'a poussé à aller manifester [...]" disait Lysianne Gagnon le 21 décembre. Apparemment quelques voix sans pores[2] ont pris des notes parce que l'éditorial de la Gazette parle aussi d'obsession en termes très méprisants.

Mais oui, après tout, pourquoi pas. On ne peut pas être que d'un seul combat. Il faut tous les mener à la fois. Pourquoi ne le dit-on pas plus souvent? Quand les militantes de PETA montreront leurs seins la prochaine fois, je leur demandrai avec sagesse: "Mais qu'en est-il donc du trafic d'enfants?" Anonymous attaque la scientologie mais ne s'occupe pas du déversement de déchets nucléaires dans la Volga. C'est pas parce que les gens du collectif en ont rien à foutre: c'est parce que ce n'est pas dans leur champ de compétence.

C'est une évidence qu'un seul individu ou un collectif de taille réduite ne peut pas s'attaquer à tous les problèmes du monde en même temps. Il n'est pas obsédé pour autant. Encore une fois, cet argument est faible. D'autant plus que Khadir s'est souvent attaqué à la théocratie iranienne et que QS, dans un effort désespéré pour rétablir les faits, a publié un communiqué à ce sujet.

On a aussi fait un parallèle entre la cause des Palestiniens et celle des Tibétains opprimés par les Chinois. Je rajoute un parallèle supplémentaire: les Tibétains, comme les Palestiniens, sont victimes de théocrates radicaux, en l'occurence cet homophobe de Dalaï Lama.

Le reste des attaques tombe dans une dangereuse paranoïa qui entre bien dans le paradigme Occident vs barbares. Lysianne Gagnon parle de fanatisme, ce qui est complètement hallucinant. Même après la publication de la lettre de Khadir (il a aussi eu la chance de s'expliquer à l'émission de Dumont, qui a consacré un impressionnant dix minutes à ce "scandale"), elle le répète dans la Presse, juste en-dessous du texte du premier. Par-dessus le marché avec une justification assez pauvre. Elle se défend aussi d'avoir accusé Khadir d'antisémitisme. Et pourtant, son premier texte est sans équivoque quand elle cite un certain M. Durand: "Quand allez-vous badigeonner ses vitrines d'une étoile jaune?". C'est à peine subtil et pas plus honnête. Et elle pense s'en tirer facilement. La conne.

Mathieu Bock-Côté, ce sociologue que je n'ai jamais rien entendu dire de sociologique, est aussi entré dans le bal, sans étonnement à l'émission de Dumont. Ses divagations, reprises à l'intérieur de son article publié dans la Presse, sont totalement surréalistes. Il recrée ainsi une nouvelle famille politique dont on a parlé à quelques reprises dans l'histoire du monde: l'ultragauche[3]. Ce terme est bien choisi parce qu'il fait peur. Ce n'est pas l'extrême-gauche. Ce n'est pas la gauche radicale. C'est l'ultragauche. De quessé que Bock-Côté avait derrière la tête quand il a associé un modéré comme Khadir à ça, fouillez-moi, j'en ai aucune idée. Chose certaine: il le rapproche des groupes révolutionnaires, alors que le député de QS est vraiment très, très réfo. Mais l'essentiel de l'argumentaire de Bock-Côté réside dans sa paranoïa vis-à-vis de ce qu'il perçoit comme un dégoût total de l'Occident répandu dans la gauche. "Même athée ou libertaire, l'ultragauche est bien disposée envers toutes les luttes qu'elle s'imagine en contradiction avec l'Empire." Cela suffit donc à faire de nous[4] des allié-e-s naturel-le-s de l'islamisme! Ce genre de dualité est répandu chez la droite nationaliste...

Mais la palme du sophisme le plus abject revient incontestablement à Joseph Facal.

"Des gens d'affaires éminents, comme Laurent Beaudoin, de chez Bombardier, et Jacques Ménard, de la BMO, soutiennent une collecte de fonds pour financer des activités parascolaires au goût des jeunes de ces écoles [...] Pendant que ces capitalistes infâmes et sans conscience sociale faisaient leur part, le député Amir Khadir faisait la sienne pour mettre de l'avant sa conception très particulière du «progressisme». Il manifestait devant le 4062, Saint-Denis, en compagnie de ses copains du Parti communiste du Canada."

L'autre jour, imaginez-vous donc que j'ai aidé une vieille dame à traverser la rue. Que faisait alors Joseph Facal? Il nouait sa cravate! Et le lendemain, j'ai donné 1$ à un musicien dans le métro. Que faisait alors Joseph Facal? Il prenait son petit-déjeûner!

***

D'une manière globale, on peut affirmer sans craintes que la couverture de la manifestation du PAJU a été incroyablement disproportionnée. Les chroniqueurs/euses ont tout simplement été coupables d'acharnement médiatique à la limite de la diffamation. Et illes ont agi de manière franchement psychotique. Je ne voterais pas pour QS, et cependant je suis frappé émotionnellement par tout le tapage que font les langues sales. Il est en fait une preuve de plus que la voie parlementaire n'est pas facilement accessible à ceux et celles qui désirent le changement. Le pouvoir politique est réellement la sphère des bien-pensants corrompus portant cravate, malette et faisant langue de tout bois. Les gardes du corps du politically correctness, hystériques comme des dindes picossant tout ce qui bouge, sont une armée de chroniqueurs/euses serviles et confortables. Participer à ce cirque nous condamnerait à devenir comme eux et c'est selon moi ce qu'il faut retenir de toute cette histoire.

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[1] Notez les erreurs d'orthographe et de frappe au passage. La faute dans "israélien" me fait penser aux très nombreuses personnes qui sévissent sur le Net et qui traitent tout le monde d'ignards. Ou des gens qui se veulent des grands défenseurs de la démocracie. Des fois, quand on s'intéresse peu à un sujet, on ne retient pas aisément l'orthographe d'un mot qui est relié à lui. Mais bon, attaquer la forme, c'est un peu injuste.

[2] Expression poétique reprise à Gauvreau et que je préfère cette fois à "crétins".

"Des voix sans pores
Me disent que je mourrai
Enflammé dans la carbonisation.

Ce n'est pas vrai.
Je suis dieu pour mes sourires secrets
Et en vérité je suis noble, franc et plein de liberté! [...]"

[3] Qu'est-ce que l'ultragauche? Historiquement, on peut peut-être parler des mouvements conseillistes à la Rosa Luxembourg. Mais récemment, le même terme a été utilisé, essentiellement par la police française, pour décrire certaines cellules "d'anarcho-autonomes" et/ou révolutionnaires, et/ou d'autre monde avec un nom qu'ils n'ont pas eux-mêmes revendiqué et qui est galvaudé à l'extrême. Mais en bref, quand on parle d'ultragauche aujourd'hui, c'est généralement pour parler d'une sous-catégorie de "terroristes" et faire ben peur. En ce qui concerne mon entourage, je crois être le seul de ma connaissance à avoir déjà revendiqué une appartenance à "l'ultragauche", et c'était à peu près par accident, même si en effet, j'étais à l'époque très, très proche des idées du communisme de conseils.

[4] Le sociologue nous place dans le même groupe.

mardi 28 décembre 2010

La psychose de la droite 1 - Duhaime et Khadir

Aux alentours du 13 décembre, on apprend qu'Amir Khadir est devenu le politicien le plus populaire du Québec. La réaction est immédiate: quatre jours plus tard, Éric Duhaime déclenche une nouvelle controverse autour des actions du député: il utilise largement la victimisation d'un marchand de chaussures afin de qualifier les actions de Khadir de "radicales". Dans le même article, il écrit ceci: "Khadir multiplie les interventions pour dénoncer la seule démocratie du Moyen-Orient sans jamais une seule fois condamner les organisations terroristes islamistes, ni les tyrannies du monde arabe." Ce qui est par ailleurs faux. Mais Duhaime est un mauvais journaliste, alors il ne vérifie pas. Et pourtant, même moi, qui suis un pouilleux d'anarchiste extrémiste, je vérifie avant d'accuser quelqu'un de quelque chose. Au minimum sur un moteur de recherche, wikipédia et des hébergeurs de vidéos, qui sont des sites accessibles à tout le monde.

Cette ignorance absurde en dit long sur la faible intelligence du personnage d'Éric Duhaime, son absence d'esprit méthodologique et sa curiosité manquante. Son ton alarmiste lui-même nous laisse penser qu'il appartient à cette large classe d'individus fermés, paranos et peureux qui forment la fange la plus conservatrice et autoritaire de toute société. C'est à s'étonner qu'il ait pu se trouver un emploi dans un quotidien tellement il est médiocre. Des fois d'ailleurs je me demande si je n'aurais pas mieux fait moi-même d'être de droite. Au milieu de cette bande de demeuré-e-s, même moi qui suis un peu bête, j'aurais pu passer pour un christie de génie[1].

Il y a une autre possibilité sur les erreurs factuelles commises par Duhaime: qu'elles soient volontaires et conscientes. J'ai déjà parlé de cette tendance que les manipulateurs/trices ont à matraquer un mensonge évident afin de contrer une vérité nuancée et aussi évidente. Pour qu'un mensonge passe, on n'a qu'à le répéter sur toutes les tribunes incessamment. Pas argumenté ni prouvé? Pas grave. Il y aura toujours au minimum une forte minorité pour le croire, puisque la méfiance ne fait pas partie de l'éducation (il paraît que ça change un peu avec la réforme).

Mais je ne vais pas accuser Duhaime de mauvaise foi. Émettons l'hypothèse qu'il est simplement mal informé, qu'il ne fait rien pour que ça change et qu'il ne se rétracte pas maintenant tout simplement parce qu'il est trop orgueilleux pour reconnaître son erreur. Ce qui est fréquent chez beaucoup de gens (dont moi-même je l'avoue) et systématique chez lui.

Duhaime accuse aussi Khadir et ses ami-e-s de terroriser le proprio de la boutique Le Marcheur. Il parle d'intimidation. Dans l'imaginaire de la droite québécoise - c'est le cas également chez Kelly-Gagnon, qui répète sans arrêt que "les hommes d'affaires sont la classe la plus opprimée du Québec" - les citoyen-ne-s sont terrorisé-e-s et intimidé-e-s quotidiennement par les actions des ultragauchistes, voire pris-es en otage par les méchants syndicats en grève qui les privent de sorties de ski. Pour la droite québécoise, la moindre perturbation est un crime affreux contre les libertés (de consommation). C'est le syndrome du "why are you closed", c'est-à-dire qu'on vit tellement dans une bulle individualisée que le moindre accroc à notre petite routine devient un drame personnel atroce. Plus largement, les gens ne sont pas intimidé-e-s parce qu'on les fouille ou qu'on leur envoie des lettres violentes, qu'on les bouscule ou qu'on les menace, ils sont intimidé-e-s parce qu'on leur distribue pacifiquement des tracts et/ou qu'on bloque un commerce (ce qui est du reste assez rare). Les gens ne sont pas terrorisés parce qu'une personne louche se promène avec un gun dans la rue ou les observent de manière insistante alors qu'ils préparent le souper dans leur cuisine: il leur suffit d'un groupe de pacifistes par ailleurs modéré devant leur commerce pour leur donner le syndrome du choc post-traumatique.

Cette sympathie profonde est à l'occasion gommée, en revanche, quand il est temps de parler des conséquences à long terme d'une arrestation injustifiée ou d'un mauvais quart d'heure passé en Afghanistan dans la peau d'un soldat. Dans un autre article, Duhaime a notamment suggéré que les travailleurs/euses syndiqué-e-s avaient payé des sommes astronomiques pour que les manifestant-e-s "fassent du saccage" au G20. Selon lui, les activistes du G20 sont donc largement des criminel-le-s: la preuve, c'est qu'illes sont allé-e-s en prison. Notons cependant que s'il ne mentionne pas que ce sont nos impôts qui ont payé la plus grosse partie de la facture du G20, il admet tout de même que la répression fut exagérée, comme un ou deux autres droitistes.

C'est une des contradictions profondes d'une grande partie de la droite libertarienne: si vous êtes agressé physiquement par l'État, vous êtes un-e criminel-le (et une lavette si vous vous plaignez). Si vous êtes gêné-e dans votre pouvoir de surconsommation par des impôts, taxes et actions politiques, vous êtes quasiment victime d'un génocide. Duhaime, sur ce plan, a multiplié ses interventions, pétant entre autres sa coche parce que les épiceries ont fini par appliquer son divin concept d'utilisateur-payeur.

Mais je m'étends, je m'étends. Pourtant il y a encore tellement à dire. Je vais donc revenir sur le sujet dans mon prochain billet, qui traitera de la participation des autres journalistes mainstream à l'actuelle psychose entourant les derniers actes prétendument subversifs d'Amir Khadir.
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[1] Mon blogue serait dix fois plus lu, j'aurais sans aucun doute publié les lettres d'opinion que j'ai envoyées à tout hasard dans quelques journaux et je n'aurais pas été en prison au G20. Peut-être même que j'aurais de l'argent!

mardi 21 décembre 2010

La religion au Québec: la représentation des femmes.

Alors que les Musulman-e-s en tout formaient seulement 1.5% de la population en 2001, la proportion de femmes à l'intérieur de cette confession n'était que de 45%, contre 51% pour les femmes dans le Catholicisme. Cette différence est sans doute largement attribuable à la composition majoritairement masculine des immigrant-e-s des pays arabes. Par ailleurs, les membres des religions très pratiquées par les immigrant-e-s sont majoritairement des hommes.

Fait plus étonnant: un plus grand nombre d'hommes s'étaient émancipés de la religion en 2001: ils formaient alors 55% des personnes ayant déclaré n'avoir aucune attache à une religion. Ce large groupe occupait alors un poids assez stable de 5,8% de la population québécoise.

Source.

jeudi 16 décembre 2010

La carte Opus des policiers...

...fait s'allumer la lumière jaune lorsqu'ils traversent au tourniquet.

mardi 7 décembre 2010

Les manifs: un peu de gestion de crise.

La manifestation du six décembre a été plus que tranquille. Quelques agitateurs/trices sont parvenu-e-s à plusieurs reprises à réchauffer un peu la foule: mais leurs gestes restèrent isolés. Des activistes ont aussi tenté de pénétrer dans la salle de conférence, sans succès: l'escouade antiémeute les attendaient à l'intérieur.

Mais pendant une dizaine de minutes, la soupe était proche de l'ébullition. Nous étions devant la barrière du Hilton et nous frappions dessus joyeusement pendant que des balles de neige fusaient vers les flics (et vers nous: j'ai dû en recevoir trois en arrière de la tête) et que les slogans devenaient de plus en plus drôles.

J'allais me dire: "ça y est, c'est parti", mais au même moment, j'ai commencé à me sentir poussé dans le dos. Je me suis retourné pour me rendre compte qu'une foule très dense s'était formée entre la rue et notre petit groupe. Impossible, ou presque, de bouger. En sautillant un peu, j'ai aussi remarqué qu'une rangée de policiers (certes clairsemée) en armure bloquait la rue à l'ouest et qu'aucun groupe ne s'était formé à cet endroit-là pour empêcher une charge par le flanc.

J'ai donc pensé, à la lumière de cet évènement qui aurait pu mal tourner, que proposer ici une discussion sur les situations d'urgence dans les manifs serait utile, surtout avec ce qui s'en vient. Le but n'est pas d'inciter à l'émeute ou quoi que ce soit "d'illégal", mais d'informer et/ou de débattre sur des situations dans lesquelles des groupes peuvent se retrouver de bon ou mal gré. Par ailleurs, comme le prouve l'exemple du G20 de Toronto, toutes les situations présentées ici surviennent souvent dans le cadre de manifestations légales.

Dans un rassemblement

Se tenir devant l'escouade antiémeute ne représente en rien une offense à la loi, ni même une action subversive. 95% du temps, les antiémeutes ne sont utiles qu'en tant que force dissuasive. Quand les choses vont bien, et/ou qu'un obstacle physique vous sépare des policiers (les forçant à ralentir leur marche, comme une barrière style nid-de-poule-en-réparation par exemple), il n'y a pas de crainte à avoir.

Dans une situation où un rassemblement assiège une place ou reste immobile, il faut cependant s'assurer impérativement de plusieurs choses.

1. Des voies d'évacuation sont accessibles:

Quand le rassemblement devient plus houleux, il est important de permettre en tout temps à tout individu de quitter les lieux. Ne bloquez donc pas, par votre présence, les accès de manière étanche. Des blessé-e-s, des incommodé-e-s, des déshydraté-e-s, des gens intoxiqués, il y en a toujours à évacuer, même quand il y a pas de violence.

2. La foule n'est pas trop dense:

Il suffit d'une grenade lacrymogène ou d'un peu de poivre de cayenne pour semer la panique au milieu d'une assemblée. Si la foule est trop dense, c'est l'intoxication garantie pour ceux et celles qui sont au premier rang. La panique étant particulièrement contagieuse dans ces circonstances, les risques de blessures par piétinement sont aussi très élevés. Beaucoup d'activistes ont le réflexe de se masser densément devant une rangée de flics afin de briser la force de charge de celle-ci voire de la pousser (une action qui ne se solde pas toujours par un décret "d'attrouppement illégal"), mais je me questionne sincèrement sur la pertinence de se constituer un mur de quinze personnes d'épaisseur. Et c'est sans compter le fait que je n'ai jamais vu une rangée de flics se briser après qu'on ait poussé dessus de cette manière. Lors de "poussées", j'ai surtout vu du monde revenir en arrière avec une clavicule pétée.

Quand une grenade de lacrymos éclate, les gens qui sont à proximité ont tendance à courir pour s'éloigner du périmètre contaminé. Les gens qui ne se sentent pas en danger restent sur place. C'est une grave erreur: en restant immobiles, ils empêchent les victimes potentielles de se mettre à l'abri. C'est donc une affaire de civisme et de solidarité que de s'éloigner lentement pour dégager de l'espace quand le gaz se répand, même si vous ne risquez pas a priori d'être atteint-e. Par ailleurs, les lacrymos ne se répandent pas à la vitesse de la lumière. Si vous êtes déjà à trois ou quatre mètres de la grenade, NE PRENEZ PAS LE RISQUE DE VOUS METTRE À COURIR. Vous allez augmenter la panique et peut-être bousculer quelqu'un.

Bref, quand vous voyez qu'un attroupement s'est formé contre une rangée de flics, je vous conseille de rester en retrait et ne pas vous joindre à la masse. Vous pouvez jouer un autre rôle. N'oubliez pas, aussi, que contrairement aux forces policières, l'avantage d'une masse manifestante est sa mobilité et sa versatilité.

3. Tous les angles sont couverts:

Ce comportement est presque systématiquement adopté lors des rassemblements. À Montebello (en 2007) par exemple, le front nord (la 323, je crois) était gardé efficacement par un regroupement de syndicalistes, de personnes plus âgées et de quelques modéré-e-s. C'est à cet endroit que les fameux agents provocateurs avaient débattu passionément avec les jeunes anars et David Coles[1]. Mais le 6 décembre, ce n'était pas le cas. En fait, aucun angle n'était couvert. Dans une situation semblable, je suggère à quiconque s'en rend compte de convaincre (en gueulant) une dizaine de personnes d'occuper le tronçon de rue vulnérable.

4. Les hauteurs sont occupées par des allié-e-s:

L'altitude comporte plusieurs avantages: meilleure visibilité, meilleure force de poussée, confort psychologique. Au printemps 2006 (il me semble), l'ASSÉ avait organisé une manifestation qui avait failli mal tourner. Les marcheurs/euses souhaitaient monter sur Sherbrooke, mais les flics considéraient que comme c'était une voie d'urgence - c'est souvent l'excuse employée - la rue ne devait pas être bloquée. Ils nous ont donc barré la route alors que nous montions sur Kimberly (ou Jeanne-Mance). Leur déploiement s'est fait dans la surprise totale, parce que nous étions à ce moment-là en bas de la pente et qu'il était impossible d'être au courant de leur présence. Quelques radicaux/ales ont alors eu la mauvaise idée de camper sur leur positions en situation foutrement défavorable, laissant par ailleurs les paniers à salade se disposer en contrebas. Plusieurs projectiles furent lancés sans succès: l'angle de lancer est abominable en bas d'une pente, la force du jet est affaiblie et il est courant qu'un-e camarade placé-e plus haut soit frappé-e par l'objet volant non-identifié. On est pas à Austerlitz non plus. Il n'y a pas de possibilité de contournement dans une rue de quinze mètres de large. Les flics eux-mêmes cherchent presque toujours à occuper les hauteurs. C'est pas pour rien.

Une position basse est intenable, et c'est dangereux d'y rester dans toute manif. En effet, il arrive assez souvent que l'Escouade charge sans provocation lors d'une manif pacifique. Et descendre une côte en courant au beau milieu d'une foule, c'est comme dangereux.

Voilà tout ce qui me passe par l'esprit ce soir. Je vous suggère de compléter ou contredire avec des commentaires pertinents qui ne proposent pas, bien entendu, de recourir à des stratégies agressives (et qui pourraient donc me mettre dans la marde en tant que blogueur).

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[1] Soit dit en passant, ce sont bel et bien les activistes anarchistes qui ont identifié et chassé les infiltrés, les enjoignant à retrouver leurs confrères. Les vieux syndicalistes, traités en héros dans les médias et présents sur la ligne ont presque tout fait foirer en tentant d'affronter les porcs, déclenchant quasiment une bagarre.

lundi 6 décembre 2010

L'étude du Conseil du Patronat - les étudiant-e-s.

Cette étude est malhonnête et démagogue. Limite diffamatoire, même, tellement elle déforme la réalité. C'est un exercice de propagande qui ne vise qu'à faire passer les idées patronales discutées en tête-à-tête avec les Libéraux, aujourd'hui à Québec.

Cette étude traite des habitudes de consommation des étudiant-e-s (dont 52% ne bénéficient pas de l'aide financière) sans mentionner, pourtant, le taux d'emploi, le nombre d'heures travaillées en moyenne, le niveau d'endettement et surtout le revenu total.

La dernière omission elle-même constitue une bavure intellectuelle d'envergure.

Les étudiants et étudiantes ne SONT PAS FINANCIÈREMENT CONFORTABLES.

"Pour 25 % des étudiants, le niveau de revenu est de moins de 12 000 $."

dimanche 5 décembre 2010

Demain ça va brasser.

Du moins, j'espère. Ça fait plusieurs années que nous sommes dociles et il faut que ça cesse. L'autobus part à 9h00 au Carré Berri et la manif, à Québec, commence à 13h00.

Nous manifestons contre le gouvernement parce qu'il nous menace:
- de doubler (ou plus) les frais de scolarité;
- d'imposer une hausse différée par programme;
- d'augmenter la part des entreprises privées dans le financement des universités;
- etc.

Comme la décision n'est pas prise et que nous ne savons pas vraiment ce qui nous pend au nez, ce ne sera pas le rassemblement le plus important de la décennie. Mais c'est important quand même.

Le gouvernement n'a rien à foutre des grèves étudiantes. Il l'a prouvé à plusieurs reprises. Ce qu'il faut, c'est perturber les activités du pouvoir sur une base quotidienne (ce qui est facile à faire pendant une grève).

samedi 4 décembre 2010

Mon conte de Noël - Saint Frère André

Cette histoire de famille n'a à ma connaissance jamais été racontée en public. Je la tiens de ma mère qui la tient de sa mère.

***

Un cabinet de docteur, un jour à la fin des années vingt ou au début des années trente. Mon arrière-grand-mère se fait examiner. Le médecin, solennel, lui annonce qu'elle ne devrait plus avoir d'enfants. Le danger pour sa santé est beaucoup trop grand.

Mais mon arrière-grand-mère est une femme très pieuse. Elle a entendu de nombreuses fois le curé appeler au respect du devoir conjugal. Elle cherche donc un deuxième avis, car elle n'est pas confortable avec le fait de n'avoir donné deux enfants. Soit à cause de la pression sociale, soit à cause de son mari, soit parce qu'elle aime les enfants. Soit parce que la contraception, c'est péché.

Elle parvient à obtenir un entretien avec le Frère André, qui à l'époque est respecté de tous et de toutes. Il est d'un âge noble. On entend parler de dizaines de miracles. Le miracle lui-même semble graviter autour de sa personne, la sagesse émaner de sa bouche. Il connaît des milliers de gens; il en a conseillé cent mille. Il a une longue expérience de la vie.

Mon arrière-grand-mère le rencontre. Elle lui demande ce qu'elle devrait faire. La réponse exacte du Saint, je ne la connais pas. Tous les témoins directs sont morts depuis longtemps, sauf peut-être une vieille tante qui était alors toute jeune. Mais voilà la phrase rapportée qui s'est transmise de bouche à oreille sur trois générations: "Ce serait dommage qu'une femme aussi jeune s'arrête aussi vite."

Quelques mois plus tard, mon arrière-grand-mère est morte en donnant naissance à ma grand-mère. Aux funérailles, il y a quelques dizaines de personnes, et parmi elles deux enfants tristes et un bébé qui ne connaîtra jamais l'amour maternel.

Moins de dix ans plus tard, le Frère André meurt à son tour. Devant sa dépouille paradent presque un million de personnes.

En quelque sorte, ma grand-mère fut comme beaucoup d'autres un enfant de Saint André Bessette. Quasi-orpheline, elle a été élevée par les bonnes soeurs après que sa mère ait suivi le conseil foireux du vieux religieux. Sans lui, elle ne serait pas née, et moi non plus. Ne suis-je donc pas moi-même un véritable miracle?

Mais comme ma grand-mère, je n'ai aucune reconnaissance pour ce vieil escroc. Même que je lui chie dans la gueule, à ce saint de comédie plate du TNM. Je souille sa crisse de soutane à la mémoire des femmes qui sont mortes à cause de lui. Voilà quelque chose que ma grand-mère, trop bien élevée, n'aurait jamais osé vouloir faire. Quoique.

lundi 22 novembre 2010

Les jeunes dynamiques de "Génération d'Idées"...

... se sont acoquiné-e-s avec la Jeune chambre de Commerce de Montréal en buvant dans la même coupe au déjeuner-conférence de Yolande James. En d'autres mots, les enfants-modèles ont rencontré la jeunesse dorée.

En passant, si vous voulez participer au Festival des disciples de l'Institut du Nouveau Monde, eh bien c'est 50$.

mardi 16 novembre 2010

La pétition, le MCNQ et le budget.

J'espère que les auteur-e-s de la célèbre pétition (le site de l'ASSNAT est encore planté) se rendent compte qu'illes sont en partie responsables du momentum. Avec les grèves étudiantes qui s'ajoutent par-dessus ça et la manif du 23 novembre, les prochains jours pourraient être cruciaux pour la contestation du pouvoir. Il faut que ça lève!

L'opposition aux corrompu-e-s et aux décisions antisociales: vl'à un vrai mouvement "grassroot".

dimanche 14 novembre 2010

Coquelicots.

Francis Dupuis-Déri est parvenu à publier un article pertinent sur le jour du Souvenir dans le Devoir. J'arrive un peu en retard, mais moi aussi, je me questionne sur la pertinence de mettre des soldat-e-s en rang et de saluer le drapeau pour l'occasion.

En mémoire des victimes, on devrait plutôt faire l'amour sur les lieux de batailles historiques et saccager des bureaux de recrutement (avec cérémonie s'il le faut).

À part de ça, j'ai répondu au célèbre poème "Au champ d'honneur" par une version de mon crû. Vous pouvez la lire sur mon blogue littéraire.

lundi 8 novembre 2010

Ce qu'on veut installer dans votre jardin.

Des puits qui fonctionnent jour et nuit, avec le bruit des explosions, l'odeur âcre du gaz naturel et le souffle brûlant des cheminées.

Qu'êtes-vous prêt-e-s à endurer pour une petite compensation financière?

La propriété, le "libre-contrat" et la loi sur les mines protègent les entreprises qui polluent notre air et détruisent notre qualité de vie, et tout ça pour quelques misérables pinottes.

dimanche 7 novembre 2010

Un article qui m'avait échappé.

Dans le journal de Québec, le 22 mai dernier.

"La police refuse de le confirmer, mais des experts en sécurité soupçonnent que les anarchistes sont sous haute surveillance au même titre qu'al-Qaïda à l'approche des sommets du G8 et du G20."

Un peu plus loin:

"Les experts s'entendent également sur le fait qu'ils [le FFFC] font probablement partie de cette minorité de trouble-fête qui se réclame de la mouvance anarchiste simplement dans le but d'infiltrer des manifestations pacifiques afin de provoquer les forces de l'ordre.

L'attaque à la bombe incendiaire d'Ottawa les a toutefois propulsés au rang des organisations anarchistes radicales et des organisations terroristes comme al-Qaïda, aux yeux du SCRS (Service canadien de renseignement de sécurité) et des corps policiers."

Quand je relis ce genre de niaiseries, la tête froide, je n'arrive plus à comprendre l'immense climat de terreur et de paranoïa qui peut régner lors d'une période donnée.

Source.

samedi 6 novembre 2010

L'identité j'men crisse.

Je considère sincèrement que de ressentir le besoin immense de s'identifier à une Nation quelconque naît d'une incapacité à se contenter d'être identifié comme simplement un individu à part entière. Le nationalisme fanatique peut-il donc avoir un lien avec l'absence de satisfaction sur le plan de la vie personnelle? Même s'il est difficile, a priori, d'établir un lien entre profil psychologique et idéologie, c'est possible qu'une telle relation existe. D'ailleurs, j'ai entendu souvent des nationalistes prétendre que si le taux de suicide était si élevé au Québec, c'était surtout parce que les jeunes Québécois se sentaient inconsciemment spoliés par le fédéralisme dans leur quête d'identité. C'est une théorie irrationnelle, malhonnête et stupide, mais séduisante - assez pour que j'y crois pendant une partie de ma jeunesse naïve.

Mais il faut croire que cet état de fait s'applique aux gens qui défendent cette idée. Si l'idée de l'indépendance ou de l'autonomie ou d'un Québec blanc et francophone d'un Océan à l'autre ou whatever disparaissait, sans doute que les nationalistes n'auraient plus de raison de vivre.

Le plus important dans la pensée nationaliste, c'est qu'elle est indépendante des conditions de vie matérielles. Falardeau disait toujours qu'il fallait attendre d'être un pays pour décider de bâtir une société de gauche ou de droite. Au XIXe siècle, les gens ont suivi Papineau sans prendre en considération que c'était un esclavagiste[1], un machiste et un hostie d'autoritaire. Encore aujourd'hui, cette facette de sa personnalité est complètement gommée.

À quel sacrifice permanent sont prêt-e-s les nationalistes pour que leur projet voit le jour? Faudra-t-il par exemple sacrifier une partie de nos libertés individuelles pour servir les libertés collectives? En parlant de concept minable, en voilà tout un. Quand j'étais péquiste, jamais je n'ai été capable de défendre la pertinence des libertés collectives qui consistent, en bref, à écraser les petit-e-s pour permettre aux grand-e-s d'occuper tout l'espace.

La liberté, ce n'est pas la force des identitaires. Il a fallu, par exemple, que les flics soient racistes lors du G20 pour que les nationalistes condamnent la répression torontoise. Avant ça, c'était le silence radio, ou presque. Quant à la solidarité face aux peuples opprimés, elle est foutrement limitée. Les nationalistes solidaires critiquent la domination chinoise sur le Tibet, mais pas la théocratie bouddhiste[2]. Illes critiquent Israël, mais pas la domination ultraconservatrice de l'Islam sur le peuple palestinien. Bref, illes ne sont pas opposé-e-s à la dictature, mais seulement à la dictature d'un-e étranger/ère sur le peuple local.

Notons aussi que lors de la dernière conférence du PQ à laquelle je suis allé (à l'hiver 2006, je crois, à la demande spéciale d'un ami de Victo), je me suis fait huer pour avoir posé la question suivante à Louis Bernard: "Si nous souhaitons voir reconnu le droit à tout peuple d'accéder à l'indépendance, reconnaissons-nous ce droit aux nations autochtones?" J'ai pensé que, contrairement à mon intuition, il aurait pu s'agir d'une réaction isolée, mais on m'a avisé l'autre jour que mon intuition est fondée. Les nationaleux ne veulent pas qu'on touche à l'intégrité territoriale du Québec, telle que décrite par l'ONU. Toute parcelle de l'Empire québécois doit rester inaliénable, même dans les régions jamais habitées par un seul christie de Tremblay.

Il y a aussi cette impression ridicule qu'ont les identitaires de faire partie d'un groupe non pas basé sur des affinités, mais bien sur une appartenance fictive. Ne croyez pas que je nie l'existence des peuples: c'est évident que sociologiquement et culturellement, il existe des groupes distincts. Cependant, les Nations sont bel et bien des entités basées sur l'imaginaire, de même que le Contrat Social que personne n'a jamais signé et qui nous lie prétendument aux structures de domination actuelles.

D'ailleurs, qu'on ne vienne pas prétendre que je fais partie du même large groupe que François Legault et/ou Guy A. Lepage, du monde avec qui je ne partage rien et que j'ai rencontré genre une fois dans ma vie. Ces gens-là ne seraient jamais mes ami-e-s, j'habiterais jamais avec eux; comme la plupart du monde, je choisis mes fréquentations selon les affinités sur le plan personnel, et non pas selon mon niveau de fierté nationale.

Ce qui concerne les Québécois-es concerne aussi les autres peuples. Les règles discriminatoires des réserves mohawks sur le plan marital sont tout aussi nauséabondes que les idées du MLNQ. Et puis j'ai été ulcéré d'entendre, pendant un cours de langue, une jeune musulmane se vanter qu'elle ne fréquentait que des arabes[3].

Cette fixation sur le leader m'écoeure aussi: et c'est la pierre angulaire de l'identité nationale. Les nationalistes aiment leur chef: illes en ont besoin pour garder confiance, conservant toujours dans leurs effets personnels quelque icône de leur maître-sse bien-aimé-e. Quand le/la chef-fe ne fait pas l'affaire, c'est la débandade et l'anxiété. Ce phénomène de servilité fait que des gens pourtant allumés comme Julie Legault vont déclarer sur les ondes de Radio-Canada qu'il nous faudrait un "nouveau René Lévesque". Maudit que je déteste ce type, surtout depuis qu'il est mort.

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[1] Et ne venez pas bullshitter en employant l'argument que "Papineau était un homme de son temps". Son propre père était antiesclavagiste et quelques femmes (propriétaires) avaient encore à l'époque le droit de voter. Papineau était incontestablement un retardé.
Et si tous les "hommes de son temps" étaient des retardés, eh bien je ne vois pas pourquoi on leur rendrait un culte.
[2]"Using one's hand, that is sexual misconduct.'' (le Dalai Lama)
[3] Nb: la jeune femme en question a plus de 20 ans et elle a un accent arabe. Pourtant, elle est inscrite au cours d'Arabe I, et je l'ai clairement entendue prononcer assalam Aalaèkoum en détachant toutes les syllabes, ce qui suggère que malgré sa fierté passé date, elle n'a jamais été capable d'apprendre seulement le mot "bonjour" dans la langue de ses ancêtres.

mardi 2 novembre 2010

L'Anarchist Writers' Bloc.

Ne manquez pas, ce vendredi à 20h00 au DIRA:



Comme vous le devinez, je fais partie de ce collectif multilingue (français, anglais, langues autochtones, etc.) d'une vingtaine d'auteur-e-s qui publiera au printemps sa première anthologie, avec, j'ai de bonnes raisons de le croire, une de mes nouvelles littéraires à l'intérieur.

Au départ, je n'étais pas tout à fait convaincu, mais après avoir lu une bonne partie des textes soumis, je suis persuadé que la publication sera excellente et originale.

L'entrée est gratuite, mais nous vendrons la bière, la bouffe et le dessert (ma tarte aux pommes produite en quantité industrielle).

samedi 30 octobre 2010

Balle de plastique

Voici ce qu'une infirmière nous a dit lors de ma formation de médic de rue précédant le G20.

"Les balles de plastiques doivent théoriquement être envoyées au niveau du sol et les manifestant-e-s atteints aux jambes seulement après rebond par le projectile. Mais plus la tension monte dans une manifestation, plus les policiers et policières prennent des libertés et choisissent plutôt le tir direct en visant à des endroits plus sensibles. C'est à ce moment-là que le projectile peut devenir mortel. Par exemple, si la balle de plastique vous atteint à la gorge, celle-ci risque d'enfler et d'obstruer les voies respiratoires jusqu'à l'asphyxie totale."

Merci à S.

samedi 23 octobre 2010

J'aime le féminisme (3)

Les hommes bénéficient aussi grandement et continuellement des résultats des luttes féministes. Dans mon introduction, j'ai parlé un peu de l'ostracisme vécu par les homosexuel-le-s; leur émancipation est totalement reliée à la déconstruction de l'identité et des rôles sexuels. Les féministes s'attaquent au patriarcat conservateur: quand celui-ci s'affaiblit, tout le monde y gagne au change et la liberté augmente. Si les femmes sont maintenant plus nombreuses à devenir médecins ou à travailler en construction, le nombre d'hommes enseignants et infirmiers augmente aussi (avec hélas un peu moins de succès) sans que ceux-ci soient ouvertement accusés de moumounerie.

Le patriarcat est une des autorités les plus répressives et présentes qu'il puisse exister. Dans certains pays musulmans intégristes, il légitime la violence faite aux femmes, et ici, loin d'être disparu, il permet encore à de vieux juges séniles de parvenir à des décisions absurdes basées sur des caractéristiques généralement attribuées aux femmes et aux hommes. Or, la différenciation amène l'injustice d'un côté comme de l'autre. Prouver un viol, un cas d'agression ou de harcèlement acharné est difficile. Une femme (donc la vaste majorité des victimes), en plus de ne disposer que de très peu de preuves, peut faire face à un establishment complaisant envers les agresseurs. Quant à la minorité d'hommes qui sont victimes de violence sexuelle, le risque est encore plus grand qu'ils ne se fassent pas prendre au sérieux ou qu'ils subissent la moquerie dans leur entourage.

Et il y a dans la jonction de la culture machiste et de la loi un drôle de rapport: plus les hommes travaillent et moins ils s'occupent des enfants, moins ils auront de chances en cas de séparation d'obtenir la garde et plus ils auront de chances de verser une "lourde" pension alimentaire; mais plus les femmes sont émancipées, et plus la femme, autonome, sera en mesure de se passer du soutien éternel de son ex. Ce n'est pas ici une question de partialité dans la loi ou dans l'esprit d'un quelconque magistrat; si la conjointe hypothèque son autonomie financière pour s'occuper de la famille, c'est juste logique qu'elle obtienne la garde ainsi qu'une pension. Le contraire est aussi vrai. Et ces conclusions me semblent s'appliquer également pour les couples homosexuels.

J'ai lu, il y a quelques années, un texte qui apparaissait dans une revue féministe - je n'arrive plus à me souvenir s'il s'agissait d'un numéro spécial de La vie en rose ou si ça venait d'ailleurs - et qui dénonçait l'image que la femme conserve dans la culture: celle d'un être naturellement innocent et naïf. Cette tendance qui se reflète dans la culture populaire et dans les médias ne sert pas la femme parce qu'on la décrit comme un être irresponsable de ses actes, condamnée à rester mineure toute sa vie. L'exemple de l'histoire de Karla Homolka l'illustre très bien: le tribunal pardonne, le film excuse, la société prend pitié. Je ne sais pas si vous vous souvenez de cette femme qui avait survécu à un pacte de suicide familial très glauque: les gens avaient été autant horrifiés par le crime lui-même que par le fait que cette pauvre victime soit menottée à son lit d'hôpital. Je pense bien entendu que menotter quelqu'un qui est à moitié mort n'est pas très productif. Mais je crois que les gens n'ont pas attendu de connaître le fin mot de l'histoire avant de juger. Ils se sont fiés sur des idées reçues: la femme est aisément manipulable et donc irresponsable de ses propres actes. Autrement dit: c'est une conne. Voilà pourquoi le texte féministe dénonçait ce trait culturel qui tend à excuser les femmes de tout. Parce que son corollaire est beaucoup plus discriminatoire: on a en effet tendance à penser que si derrière chaque grand homme il y a une femme, derrière chaque grande femme il y a cependant une pipe. Bref, une femme qui a fait quelque chose de grand doit certainement sa réussite à des faveurs, et non pas à son talent.

La disparition de ce paradigme serait donc un gain pour l'homme autant que pour la femme. C'est heureusement un des phénomènes sexistes qui s'écroule le plus rapidement. Merci aux luttes féministes des 40 dernières années.

Le divorce, libéralisé à la fin des années soixante, est aussi un gain très important pour l'homme en partie parce que survivre à une rupture devient dès lors plus facile, et pourtant il a été arraché au clergé et au gouvernement grâce aux féministes. Idem pour l'avortement: si c'est en fin de compte le choix de la femme d'interrompre la grossesse, il n'en reste pas moins que son accessibilité bénéficie autant aux ménages (comprenant au moins une femme) qu'aux femmes seules.

Les congés parentaux sont des gains de féministes, et pourtant ils bénéficient de plus en plus aux hommes; les garderies sur les milieux de travail et/ou d'étude aussi mais il y a tout de même un bon nombre de pères monoparentaux... la liste s'allonge éternellement. La campagne de pubs controversée de la FFQ montre que la lutte féministe n'est pas isolée: les mères de soldats ne sont pas les seules à souffrir de la guerre et les jeunes femmes ne sont pas les seules à souffrir de la pauvreté. Le combat antimilitariste et progressiste des féministes bénéficie à tout le monde, peu importe le genre.

Plusieurs pensent que la lutte féministe vise à créer un système de deux poids, deux mesures[1]. Si c'était réellement le cas, les féministes feraient comme les flics: elles agiraient en corporation, tentant de renverser individuellement les jugements des tribunaux, aussitôt qu'une femme quelconque serait accusée de quoi que ce soit.

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[1]Je ne pense pas que ce soit réellement le cas, même si quelques "féministes" isolées rencontrées au cours de ma vie (entre autres à l'ASSÉ...) tenaient ce genre de discours rétrograde, différencialiste et conservateur.

jeudi 21 octobre 2010

J'aime le féminisme (partie 2)

Beaucoup jugent le féminisme dépassé en raison du fait que les femmes "sont maintenant égales aux hommes". Or, la lutte féministe québécoise est toujours pertinente parce que les femmes ne sont toujours pas égales, même dans notre société prétendument avancée, qualifiée par Patric Jean comme un paradis pour la gent féminine.

Et ça, c'est abondamment documenté par les chiffres et les faits. Les répéter encore et encore, c'est faire exactement ce que les féministes font inlassablement à chaque jour: mais les mythes ont la vie dure. Alors voilà quelques données.

Tout d'abord, malgré le fait que les femmes sont depuis maintenant assez longtemps majoritaires dans les universités, celles-ci ont toujours des revenus beaucoup plus bas que les hommes, même quand elles obtiennent un diplôme universitaire. Cette constatation se répète dans toutes les classes sociales et chez tous les groupes d'âge. D'une manière générale, les femmes sont aussi plus souvent sujettes à la misère. La situation est particulièrement grave pour les femmes avec simplement un diplôme d'études secondaires: en 2007 elles gagnaient en moyenne 20 000$, alors que les hommes de la même catégorie gagnent 32 000$ en moyenne, ce qui donne un écart de plus de 33%![1]

Et le pire, c'est qu'on vient justifier cette différence par le fait que les femmes travaillent souvent moins d'heures à cause du foyer, des enfants, etc. sans voir que justement, c'est ça le point. Entre autres.

Les métiers traditionnellement associés aux femmes sont également souvent moins bien payés. Un des métiers les plus durs, celui d'infimière et d'infirmier, demande beaucoup de cours prérequis, c'est-à-dire chimie, physique, maths 436 et un DEC de trois ans au minimum. L'échelle salariale avec un DEC: 40 497 $ à 60 320 $.

Pour être policier, il faut avoir réussi maths 514 et c'est à peu près tout. Le cours dure également trois ans, mais il est suivi d'une courte session à l'École nationale de la Police.

L'échelle de salaire à la SPVM: 35 286 $ à 66 577$!
Servez pendant trois ans la GRC après 24 semaines de formation et vous recevrez, comme salaire de base: 74 000$!

Ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres. Certain-e-s diront que les flics risquent leur peau à chaque jour et que ça explique le salaire élevé... Mais c'est pas comme si les polices tombaient comme des mouches. Disons plutôt qu'ils donnent du travail au personnel médical assez souvent.

Il y a aussi la question des aînées. Sur le sujet, je pense que l'étude de Samia-Djemaa Mechakra-Tahiri est très explicative: les femmes d'âge avancé sont plus atteintes par la dépression et, lors de conflits avec le conjoint, elles s'en tirent souvent beaucoup plus affaiblies psychologiquement que les hommes. Les femmes âgées, subissant souvent encore les assauts d'un monde qu'on croirait décédé avec la Révolution Tranquille, sont directement touchées par les enjeux du féminisme actuel. La lutte féministe ne se limite d'ailleurs pas à changer l'avenir des jeunes, mais aussi de toutes les personnes vivantes.

Le féminisme est toujours pertinent parce que les droits les plus élémentaires sont menacés par un establishment rétrograde. Vous vous souvenez du projet de loi C-484? Les esprits machistes aiment pouvoir contrôler l'utérus des femmes, et cet étron légal était plus que l'esquisse d'un pas en arrière coordonné par les autoritaires du Canada. Et ce n'est pas qu'une question du statut du foetus: c'est aussi une question d'accessibilité.

L'existence des masculinistes est en soi une preuve de la pertinence des féministes, mais plus j'écris, plus je me rends compte que j'écris des lieux communs, alors je vais arrêter là. Citons simplement quelques enjeux mis de côté dans ce texte: les femmes immigrantes, la violence sexuelle et/ou conjugale, la faible représentation féminine dans les postes de cadres (en ce qui me concerne, je ne veux ni hommes ni femmes dans des postes de cadres; je veux personne), le néoconservatisme vibrant sanctifiant Saint Frère-André du haut de son Oratoire qui prend l'apparence d'un phallus râblé, etc. Ailleurs, le traitement de Rachida Dati dans la presse française et sans aucun doute surtout au sein du conseil des ministres montre bien que même les femmes d'État ne sont pas à l'abri des vieux crisses de débiles.

Et quoiqu'en pensent les chroniqueurs/euses de La Presse ou Martineau, des organismes comme la FFQ ont toujours leur pertinence dans la représentation de plusieurs femmes. La Fédération des Femmes du Québec n'est certes pas parfaite: mais de mon point de vue c'est son manque de radicalisme qui la rend moins intéressante, car en acceptant la voie du réformisme elle accepte les structures répressives et souvent sexistes d'un État patriarcal, fondé sur la hiérarchie, des normes préétablies et une certaine vision de la justice qui permet aux oppresseur-e-s de courir queue nue au soleil.

La FFQ lutte beaucoup pour les femmes victimes de violence, et de tout ce qui découle du drame que ces personnes vivent. Cet enjeu touche les femmes de toutes les idéologies politiques[2], incluant les FEMMES DE MILITAIRES. Alors quand je lis des types qui croient que le mandat de la FFQ se limite à faire deux ou trois pubs-choc tous les trois ans, je me retiens de leur pisser dessus.

***

J'ai finalement décidé de diviser ce texte en trois parties. Dans la dernière partie, je parlerai enfin des conséquences du féminisme sur la qualité de vie des hommes.

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[1] Je vous donne le lien vers l'Institut de la Statistique, mais il est probable qu'il vous faille utiliser un proxy pour entrer. Le titre du tableau c'est Revenu moyen des hommes et des femmes bénéficiaires d'un revenu selon certaines caractéristiques (sexe, âge, type de famille et scolarité), Québec, 2007.
[2] 2002: "
Plus d’un quart (29 %) des femmes canadiennes ont été agressées par un conjoint."

mardi 19 octobre 2010

J'aime le féminisme (partie 1)

Je faisais référence, dans un autre billet dédié au féminisme, au taux de suicide plus élevé chez les jeunes homosexuel-le-s que chez les autres jeunes. En effet, "de nombreuses études semblent indiquer que près de 32 pour cent des jeunes lesbiennes, gays ou bisexuels (personnes LGB) envisagent le suicide ou en font une tentative (comparativement à 7 pour cent de l’ensemble des jeunes)." Il est évident que ce n'est pas une question de confort: le sexe entre personnes du même genre est bon (très bon même, quoi que j'aie pas vraiment essayé le lesbianisme), et a priori il n'y a pas de quoi s'en faire quand on se découvre de telles attirances contre-nature. C'est donc la stigmatisation des jeunes homosexuel-les et/ou de l'homosexualité en général qui crée tant cette angoisse et ce malheur.

Je pense que cette stigmatisation est liée au patriarcat. La raison d'être du patriarcat a toujours été la fonction de pourvoyeur, de protecteur et de reproducteur de l'homme: tous en lien avec une virilité qui revêt encore aujourd'hui une importance digne des dogmes les plus stupides de la scientologie. Toute atteinte à cette virilité, et donc à l'essence de l'homme est un prétexte pour l'ostracisme. C'est tellement important, encore aujourd'hui, qu'énormément d'homosexuels adultes revendiquent cette valeur ridicule, exhibant partout leurs couilles aux dimensions généreuses. Tellement important qu'on pardonne plus aisément à une femme d'être masculine qu'à un homme de ne pas l'être, même si la femme qui ne reste pas à sa place est aussi coupable d'un crime grave. En effet, la femme qui se conduit en homme est une usurpatrice et l'homme qui se conduit en femme est l'expression d'une certaine déchéance[1].

Ces structures patriarcales pénalisent les femmes parce qu'elles les maintiennent sous un état de domination, mais aussi les hommes, dans une moindre mesure mais encore de manière inacceptable, en les forçant à adopter une culture ou un emploi qui ne les ressemble souvent pas du tout, qui fait fi de leur expérience personnelle, de leur rationalité, de leurs goûts et même parfois de leur composition biologique.

Or, le féminisme est l'arme élémentaire - il en existe peut-être d'autres - contre cet état de fait. Comme il est essentiel pour l'émancipation de la femme, il est important aussi pour la libération de l'homme.

Dans le prochain billet traitant de cette question, j'essaierai de montrer en quoi le féminisme est toujours pertinent aujourd'hui (strictement sur le plan de la défense des femmes), contrairement à ce que plusieurs chroniqueurs/euses des mass médias et masculinistes ordinaires semblent le prétendre. Et je parlerai aussi de la répercussion favorable de la lutte féministe sur la condition des hommes.

_________

[1] Dans la Bible, les traductions diverses entretiennent une grande confusion entre "efféminés" et "homosexuels". On sait en revanche que les hommes qui se livrent à des activités pas catholiques ne "recevront pas le Royaume de Dieu" (I Cor, 6, 9-10). Les Hadiths, qui sont une excellente source à conneries, attribuent à Mahomet une déclaration selon laquelle les hommes qui s'habillent en femmes et les femmes qui s'habillent en hommes sont maudit-e-s par Dieu. Je n'ai hélas pas retrouvé le passage en question, alors pardonnez l'absence de référence claire. (Sur la place des homosexuels dans l'Islam médiéval, lire Sodomie et masculinité, de Mohamed Mezziane.)

jeudi 14 octobre 2010

Le G-20 au gymnase.

Je suis très content pour tous les gens qui ont vu les charges ridicules et infâmes retenues contre eux abandonnées dans la panique par une police à cours d'arguments. J'avais plusieurs ami-e-s parmi eux et je suis soulagé de savoir qu'on leur a fiché la paix. Mais plusieurs personnes font toujours face à des accusations et les arrestations se poursuivent. Le RAGE nous a d'ailleurs informé qu'un Québécois (Y.C.) a dû se rendre à la police hier parce qu'on le soupçonne d'avoir crevé une vitre à 18 000$. Le communiqué diffusé par la CLAC[1] fait état de cinq personnes toujours en prison.

Plusieurs autres vivent aussi avec les conséquences des évènements: stress post-traumatique, annulation de départ à l'étranger et/ou annulation de stage, perte d'emploi, difficultés financières, etc. C'est aussi sans compter que les policiers/ères coupables de bavures sévères ne passeront visiblement jamais en déontologie (et pour ce que ça donnerait), parce qu'on ne croit pas les témoignages des victimes et/ou parce que ces porcs et truies se promenaient sans badge.

Ça bien entendu, les mass médias n'en parlent pas beaucoup, parce que ce sont des hosties de larves[2].

Alors fêtons raisonnablement. Nous ne venons pas de remporter une victoire: c'est seulement que les conditions de notre défaite ont été allégées.

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[1] Tiens, j'envoie un lien vers La Pointe Libertaire, ça leur fera un peu de pub.
[2] Mise à jour du 15 octobre: finalement, les médias ont daigné en parler aujourd'hui. Des articles de La Presse et du Star ont notamment adopté un point de vue moins étroit. N'empêche, je pense toujours que ce sont des larves.

mardi 12 octobre 2010

9 octobre.

J'ai de plus en plus de difficulté à suivre une AG au complet, tellement les intervenant-e-s manquent d'esprit de synthèse. Et pourtant, une dissertation sur une virgule dans une proposition d'importance secondaire ne m'affecte en rien si elle fait du sens dans son entièreté, et que les huit premières phrases ne servent pas uniquement à trouver une tournure adéquatement dolle pour un propos dont il ne faut finalement retenir que trois mots.

Enfin, c'est moi le responsable, et mon défaut le plus fatal est la ponctualité. Si j'arrivais toujours en retard (comme tout-e bon-ne activiste), ma patience ne s'effriterait pas aussi rapidement.

By the way ça y est, le Rassemblement anticapitaliste étudiant a poussé sur la terre en friche du RAGE. Bonne chance aux adhérant-e-s.

samedi 2 octobre 2010

Liberté mon caecum

J'attendais depuis longtemps que les gens de Liberté-Québec disent quelque chose sur le nationalisme, histoire de descendre plus profond. Eh bien vous savez quoi? C'est fait.

Je me contenterai de citer une phrase qui va choquer même les nationalistes mainstream, qui d'ailleurs défendent déjà des idées irrationnelles:

«La crise des accommodements raisonnables a fait la démonstration que les élites souverainistes et étatistes sont largement déconnectées de la sensibilité nationale. Il est donc devenu important pour les nationalistes, et en particulier pour ceux qui partagent des valeurs conservatrices, de repenser leurs alliances traditionnelles.»

En bref:
1. Même s'ils ne sont élus à aucun palier de gouvernement à ce moment-là, les séparatistes sont responsables de la crise des accommodements raisonnables;
2. Le nationalisme ne passe surtout pas par l'État.

Tout le monde en blogue: quessé ça?

Voilà quelques mois, le site web Toutlemondeenblogue.com a averti les participant-e-s que sous le petit logo du réseau-palmarès, apparaîtrait une publicité pour la région de Québec. Les blogueur/euses membres devaient ainsi pouvoir "sauver le monde" (ce sont les mots exacts de la corporation!) pour des raisons obscures, genre rapporter de l'argent aux administrateurs ou à Canoe. Quand j'ai lu ce message, j'ai été tellement dégoûté que j'ai effacé immédiatement le code de la mise en page de mon blog.

Mais quand même, je peux comprendre que beaucoup aient décidé de conserver leur marqueur. Cette publicité était somme toute presque innocente et participer à ce palmarès comporte beaucoup d'avantages. Meilleure diffusion, meilleur réseautage, accès à des statistiques complètes, etc.

Sauf que le marqueur renvoie aujourd'hui tous les clics vers un site d'enchères poche! Tout le monde en blogue a donc finalement réussi à faire des blogs affiliés de simples outils publicitaires. Merci aux webmestres.

vendredi 24 septembre 2010

Communiqué de l'ASSÉ

"Sur l'appel de l'Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante (ASSÉ) et d'autres associations étudiantes de la région de Montréal, plus d'une cinquantaine d'étudiants ainsi que d'étudiantes occupent présentement le bureau de comté de la ministre de l'Éducation Line Beauchamp, à quelques jours de l'annonce faite par celle-ci que la journée traitant sur l'université de la rencontre des partenaires de l'éducation abordera « la performance et le financement des universités québécoises ». Rappelons qu'une nouvelle hausse des frais de scolarité a été annoncée dans le dernier budget du Québec et que cette consultation n'a pour objectif que de baliser cette hausse."

Source.

Bien joué.

mercredi 22 septembre 2010

Une affaire de représentation.

"Prends conseil auprès de l'ignorant comme auprès du sage."
- Ptahhotep.

J'aurais voulu, suite à la publication par Renart Léveillé d'un billet portant sur le vote électronique, disserter avec profondeur sur la démocratie représentative, expliquant ce pourquoi je suis contre ce concept pourri, répressif et dysfonctionnel. Mais comme le sujet mériterait en fait un essai de 5000 pages, je ne vais pas m'étendre et je vais me limiter à défendre plus clairement ma position sur les tests de citoyenneté, de connaissances culturelles et politiques - appelez ça comme vous voudrez - dont plusieurs rêvent.

Beaucoup de gens (par exemple Raël) souhaitent exclure de l'exercice démocratique des gens qui selon eux, n'ont pas les capacités ou les connaissances requises pour y participer. Comment déterminer les méritant-e-s des ostracisé-e-s? Très simple. Par le biais d'un petit examen dont les questions porteraient sur les enjeux de la politique actuelle. Un échec à cet examen facile vous ôterait la possibilité de voter.

Sans surprises, j'ai commenté l'idée en disant que c'était complètement discriminatoire. Ôter le droit de voter à des gens sans éducation[1] politique me paraît révoltant pour de nombreuses raisons.

L'élitisme

La stupidité ou le manque de connaissances est-il un prétexte suffisant pour prétendre que quelqu'un n'est pas digne de défendre ses intérêts devant l'État par voie de scrutin? Est-ce suffisant pour dire que toutes ses aspirations ne sont que du vent?

Une classe de citoyen-ne-s de seconde zone, privée du droit de vote, ne peut pas défendre ses intérêts elle-même. Elle doit compter sur une autre classe pour le faire. C'est ce qui arrive avec les mineur-e-s. Ce sont leurs parents qui s'occupent de modeler la société qu'ils subissent. Cet état de fait est rarement contesté étant donné qu'on considère généralement que les parents savent eux-mêmes mieux que leurs enfants ce qui est bon pour eux.

Or, connaître la politique ne vous rendra pas spontanément altruiste. Ce qui fait que si ce ne sont que les gens "informés" qui se voient remettre le droit de vote, ceux-ci penseront a priori essentiellement à favoriser dans l'urne les aspirations de leur propre communauté d'intérêts[2].

Résultat: puisque ne pouvant compter sur les intellocrates pour les protéger, il sera impossible, par voie démocratique, aux non-politisé-e-s de défendre leurs propres intérêts. Et pourtant, illes en ont à défendre, des intérêts. Je pense que les personnes atteintes d'une maladie chronique ou devant occuper deux emplois pour arriver à la fin du mois en connaissent bien plus sur leur propre condition que les bollé-e-s capables de réciter le nom de tous les avocat-e-s impliqué-e-s dans une commission-spectacle quelconque. Et si un parti promettait une mesure pour les aider? Faudrait-il encore purger de ces nécessiteux/euses ceux et celles qui ne connaissent pas René Lévesque avant de les laisser s'exprimer?

Le caractère d'une démocratie représentative, c'est qu'elle doit REPRÉSENTER tout le monde, même les plus caves.

Et d'une manière plus globale, l'élitisme est un concept tout simplement irrecevable. Car il n'est pas adapté à la réalité. Les gens ont tous des capacités différentes et il est ridicule d'en faire abstraction en formant une caste de dirigeant-e-s qui seraient plus éclairé-e-s que les autres. Regardez d'ailleurs ce qui se passe avec les dépassements de coûts pour les projets d'envergure pharaonique de l'État québécois. C'est bien un signe que les dirigeant-e-s éclairé-e-s ne savent rien. Et il en serait de même pour une hypothétique caste d'électeurs/trices éclairé-e-s, dont le savoir serait concentré autour du cirque politique mais dont l'ignorance du reste pourrait rester abyssale.

Ce n'est pas pour rien que Socrate disait: "Le sage sait qu'il ne sait rien." Voilà une leçon d'humilité pour nos camarades démocrates éclairé-e-s.

La dictature

Je considère que nous ne vivons pas sous un régime démocratique, mais bien polyarchique. Il fonctionne donc grâce à l'imbriquement de plusieurs pouvoirs. Le peuple, les électeurs/trices, les intellos, les journalistes, l'appareil judiciaire et répressif, le capital et la classe politique se disputent ce pouvoir et l'exercent parfois en collaborant, parfois en créant des rapports de force. Quand un des pouvoirs devient plus puissant que les autres, le régime change. Il passe de polyarchique (pouvoir d'un grand nombre) à oligarchique (pouvoir d'un petit nombre) ou à ploutocratique (pouvoir des riches), à des degrés divers.

Dans la polyarchie actuelle[3], le capital, les forces répressives et la classe politique se partagent l'essentiel du pouvoir. Plusieurs individus ou groupes, au contraire, ne participent pas du tout au pouvoir et ne sont pas consulté-e-s. Par exemple: les marginaux/ales, les minoritaires et les mineur-e-s. Ceux-là vivent donc sous la dictature, puisqu'illes n'ont pas de contrôle sur leur environnement ni souvent même sur eux-mêmes.

Si nous décidions de limiter le droit de vote en fonction de la capacité des gens à répondre à un questionnaire, la dictature (qu'elle soit éclairée ou pas) serait élargie à ces gens-là aussi. Car ils vivraient totalement dans la dépendance des décisions d'un autre groupe. Précisons que le droit d'avoir le contrôle sur sa propre vie, par le biais d'une participation minimum au scrutin ou par le biais de l'anarchie, est bien plus difficilement aliénable que le permis de conduire: il n'y a donc pas, selon moi, de comparaison possible[4].

Bref, on ne peut se prétendre démocrate si on pense qu'une caste précise - de citoyen-ne-s d'ailleurs souvent tout à fait sains d'esprit - ne doit pas participer à l'exercice du pouvoir.

La triste réalité et le potentiel destructeur d'une question

Les gens qui font la promotion d'un droit de vote conditionnel s'imaginent certainement que toutes les classes sociales et les genres seront également représentées. Or, ce n'est pas le cas. Il est au contraire fortement probable que les hommes et les riches soient surreprésenté-e-s. En effet, les hommes s'intéressent encore davantage à la politique (même s'ils s'instruisent maintenant moins que les femmes!), et les pauvres ont tendance à être moins éduqué-e-s.

De plus, les questions elles-mêmes seraient inévitablement problématiques. Renart croit s'en sauver en proposant que ces questions soient basées sur des faits. Les faits sont incontestables, donc non-orientés, argue-t-il. Or, le choix dans les faits peut être biaisé. Je donne un exemple, suggéré d'ailleurs implicitement par Renart lui-même.

Disons qu'on vous pose cette question avant que vous alliez voter:

En quoi consiste la Commission Bastarache?
a) À enquêter sur la nomination des juges au cours des derniers mandats du Parti Libéral du Québec.
b) À réduire le fardeau fiscal des Québécois-es.
c) À rétablir la peine de mort.

Vous ne trouvez pas ça biaisé? Et si on posait cette question au lieu de la première:

Sous le mandat de quel parti politique a eu lieu la fermeture de la Gaspésia?
a) Sous le PLQ.
b) Sous le PQ.
c) Sous l'Union nationale.

Vous me voyez venir? Ces questions ne sont pas neutres, et pourtant elles exposent des faits réels. Tout d'abord parce qu'elles peuvent influencer le vote. Et ça, c'est self explanatory, comme a dit une policière en sortant des gants de travail de mon sac à dos pendant le G20.

Ensuite parce que les faits sont orientés intrinsèquement dès qu'on les sélectionne pour les présenter. On pourrait piéger plusieurs partisan-e-s péquistes en posant des questions qui touchent davantage les partisan-e-s libéraux/ales, ou le contraire. Ou encore piéger un groupe social particulier. Les jeunes sans expérience, par exemple, en posant une question toute niaiseuse sur le droit du travail, du genre "Les grèves sont-elles légales au Québec" ou que sais-je. Peu tomberaient dans le piège, bien entendu. Mais peu, c'est encore trop.

Conclusion

Je suis toujours étonné quand des progressistes de gauche proposent des solutions qui me semblent, à moi, fortement discriminatoires, paternalistes, autoritaires et/ou misanthropes. On me répondrait dans certains milieux qu'après tout, ce sont des sociaux-démocrates qui ont assassiné Rosa Luxembourg.

Il ne faut pas, contrairement aux sociaux-démocrates fanatiques qui ont purgé le monde des contestataires, céder à des tentations discriminatoires. Parce que c'est une manière d'abdiquer devant le genre humain. On arrivera jamais à rien changer si on cède aussi rapidement par lâcheté. Par ailleurs, la polyarchie élitiste ou la démocratie des gens informé-e-s, ça ne peut être qu'un régime de moutons bien blancs et bêlants. Car un électorat choisi à l'aide d'un questionnaire, même si celui-ci est basé sur des faits vérifiables et en apparence évidents, peut être formaté. Formaté à l'intérieur d'un modèle standardisé de citoyen-ne idéal possédant des connaissances conformes aux attentes de l'État.

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[1] Ne pas confondre "éducation" avec "instruction". Moi par exemple, je parle plusieurs langues modernes et j'ai une maîtrise. Cela fait donc de moi quelqu'un de bien instruit. En revanche, je mange souvent avec mes mains et je lèche mes doigts après avoir terminé, même devant des invité-e-s. Je suis donc mal éduqué. De mon point de vue, l'instruction est strictement académique, alors que l'éducation est un concept plus flexible, en lien avec la croissance personnelle et/ou sociale.

[2]Même si les élections ne décident que de l'idéologie dominante des représentant-e-s (et encore), et qu'au bout du compte, c'est toujours le milieu des affaires qui garde le gros bout du bâton, la victoire d'un parti peut être plus dévastatrice que celle d'un autre.

[3] Je reviendrai une autre fois plus en profondeur sur cette notion de polyarchie.

[4] Si vous conduisez imprudemment, vous êtes un véritable danger à vous tout-e seul-e. Individuellement. Donc même si je suis par principes contre le permis de conduire, je comprends qu'on puisse le refuser à quelques personnes. En revanche, il n'y a que collectivement qu'un droit de vote peut devenir dangereux. Le refuser sur des bases individuelles pour les mêmes raisons que le permis de conduire est donc absurde. Bref, l'analogie est mauvaise.

lundi 20 septembre 2010

L'Upop.

Ce nouvel organisme a pour but de faire la promotion de la pensée critique et de rendre le savoir plus accessible. Il n'est pas exempt de partenariat paragouvernemental (l'UNESCO et la BAnQ y participent) mais l'initiative semble plus qu'intéressante. D'ailleurs, la présence d'une connaissance de confiance dans un des vidéos de promotion m'a convaincu de ne pas me méfier.

Les séances, qui auront lieu en divers endroits très typiques (Bar Populaire, Café de la Cinémathèque, etc.), traiteront de sujets extrêmement variés. Par exemple, le 23 septembre se donnera le premier cours sur les dynamiques du désir. La prof: Marie-Pier Boucher. Et ce soir, Louis Samson commencera déjà à nous faire entrer dans une réflexion sur le septième art au café de la Cinémathèque.

Le reste du programme est ambitieux: 12 séances sont déjà prévues pour le mois d'octobre. Faut espérer que ça pogne.

jeudi 16 septembre 2010

Verger: le temps file.

Nous avons jusqu'à vendredi le 24 septembre pour cueillir des pommes dans les arbres. Après, il va falloir se contenter des pommes qui gisent par terre et/ou trouver d'autres débouchés pour les pommes cueillies. Ramasser, c'est pas vraiment moins payant, mais c'est moins le fun et il faut être à genoux dans l'herbe mouillée.

Il nous reste donc une semaine pour faire ce genre de cueillette.

dimanche 12 septembre 2010

Verger: annonce.

En parlant de pommes et de poires: mes parents ont besoin d'aide pour cueillir et ramasser les pommes de leur verger. J'aime bien contribuer quand je peux mais la tâche est trop grande pour quatre à cinq personnes.

La cueillette de pommes ne paie pas yâble (le débouché le plus sûr est le jus Premium, et les grandes entreprises agroalimentaires sont des sales voleuses) mais mes parents sont ouverts à n'importe quoi, ce qui signifie qu'on pourrait organiser des équipes de travail tout à fait autonomes et sans hiérarchie. De plus, si on réussit à trouver une formule de transport très économique (l'autobus Montréal-Rougemont coûte 24$ aller-retour), on peut parvenir à se payer au-dessus du salaire minimum assez facilement.

Une autre option serait de proposer une corvée collective afin de financer un projet quelconque (je sais pas, la défense des arrêté-e-s du G20 par exemple), ou d'acheter les pommes et poires nous-mêmes et de trouver un débouché moins salement capitaliste.

En tout cas, je lance ça de même. Mon cerveau s'emballe un peu quand j'y pense. Le verger ne nous appartiendrait pas, il faudrait accepter le concept de l'investissement de base (genre que les proprios sont endettés et doivent payer les intérêts de leur dette avec une partie de la production - donc on resterait lié-e-s au concept de propriété et on devrait vendre les corbeilles de 800 L aux pomiculteurs/trices), il faudrait accepter de recevoir l'argent de Lassonde et d'Oasis, ce genre de choses. Mais c'est plus la curiosité que le besoin d'argent qui me pousse à proposer ceci. Les cafés-coop de Montréal fonctionnent déjà bien sur un mode d'organisation horizontal, et je me demande comment on se débrouillerait sur une terre. Et puis ce serait dommage de gaspiller 320 000 L de pommes.

Mise à jour: si vous êtes intéressé-e-s mais que vous avez pas envie de laisser vos coordonnées dans la boîte de commentaires, contactez-moi par courriel à l'adresse notée dans la boîte de commentaires.

vendredi 10 septembre 2010

Chroniques du capitalisme, chapitre 1.

Ce matin, je choisis sur ma table une poire qui vient du verger de mes parents et que j'ai cueillie moi-même dans l'arbre. Et, après l'avoir dévorée un peu rapidement, je me demande soudain avec beaucoup de sérieux si je n'ai pas pu, par inadvertance, croquer dans l'étiquette que j'ai oublié d'enlever.

vendredi 3 septembre 2010

gaz de schiste: message aux gens du coin.

Vous allez attendre le rapport du BAPE et poursuivre en justice les compagnies gazières en cas de dommages? Compter sur le PQ pour vous défendre? Vous avez pas rapport. C'est pas avec un avocat qu'on remplit un trou, c'est avec une pelle.

mercredi 1 septembre 2010

Liberté mon trou.

Le site web de Liberté-Québec n'était pas fonctionnel jusqu'à tout de suite (peut-être à cause de la bande passante surchauffée) et j'ai failli m'étouffer de rire à la première lecture du premier texte sur lequel je suis tombé en cliquant sur l'onglet "défier l'establishment médiatique".

En effet, le texte commence par une citation de Kory Teneycke, vice-président au développement de Quebecor!

Visiblement, les pro-liberté du nouveau réseau considèrent que d'appuyer la convergence à la Péladeau, c'est une action courageuse et anticonformiste.

Mais je sais par expérience que la droite ne définit pas certains termes de la même façon que le commun du mortel.

Ainsi:
Résister = collaborer
et
Liberté = fascisme.

Mise à jour: désolé pour ceux et celles qui pensaient pouvoir profiter gratuitement du buffet de l'hôtel Gouverneur lors de la journée de rassemblement, mais l'inscription c'est 25$. Compris les pauvres?

Liberté mon cul.

Les libertariens et minarchistes croient que si on se contente de couper dans les dépenses de l'État et de déréglementer, les gens vivront libres, car le gouvernement aura cessé de se mêler de nos affaires.

Or, c'est complètement absurde. Et ce serait tout à fait irresponsable que de l'espérer comme le font stupidement ces fous et folles qui sont séduit-e-s par ce mouvement de débiles mentaux irrationnels qui cachent souvent très mal leurs tendances ultraconservatrices et xénophobes à la Glenn Beck.

Quand l'État dérèglemente, l'environnement et la qualité de vie sont les premières victimes d'un long processus de dégradation sociale. Pensons à l'exemple albertain: le gouvernement a permis aux compagnies d'exploiter les sables bitumineux en leur ôtant presque toute restriction, content de bénéficier de cette nouvelle manne noire. Résultat: les rivières ont été contaminées par les métaux lourds. Dans un climat économique marqué par l'arrivée au Québec d'hommes à cravates intéressés par le schiste qui dort dans nos sous-sols, la règlementation est un enjeu immédiat et critique pour la sauvegarde de nos milieux de vie.

Pensons aussi à l'exemple du SPVM. Selon la logique libertarienne, une coupure de budget dans les forces répressives devrait réduire la répression et donc, le gouvernement devrait être moins porté à mettre le nez dans nos affaires, non? Or, il se trouve que la police s'en sort très bien en s'autoprivatisant: elle vend maintenant ses services à des propriétaires.

La notion de propriété s'applique mal à la réalité parce que les individus ne sont pas des planètes éloignées les unes des autres. Si vous chiez sur une pelouse, le fait qu'elle vous appartienne n'empêchera pas la pluie de la balayer chez le voisin. Voilà d'ailleurs pourquoi de plus en plus de collectivités gèrent la qualité de leur eau par bassin versant.

Se contenter de déréglementer l'économie et la société en général ne peut que conduire à l'empoisonnement de nos vies par l'irresponsabilité des grandes entreprises pour qui même la survie passe après le profit. Serons-nous plus libres une fois que boire un verre d'eau du robinet nous donnera le cancer?

Plusieurs disent que la nature a horreur du vide. C'est vrai dans certains cas: si la coercition de l'État tombe, dans les circonstances actuelles, elle ne sera remplacée que par la coercition corporatiste. Du moins, c'est ce en quoi les libertariens et autres crapules de Liberté Québec aspirent: ils dénoncent la dictature de l'État et vénèrent la dictature du capital. Je ne sais pas ce que ça évoque chez vous, mais moi ça me fait penser au discours stalinien. Le fait de promettre la liberté et profiter de la naïveté du commun pour installer une oligarchie assassine d'accaparateurs, c'est pas une nouveauté.

Il n'y a pas mille façons de devenir libres: il faut faire tomber l'État ET le capitalisme. Il faut faire tomber tous les pouvoirs et bien se garder d'en laisser un seul nous opprimer.

samedi 28 août 2010

la signification de "marron".

Je n'ai jamais pensé m'exprimer clairement sur le sujet. Un "marron", c'était à l'origine le terme employé pour désigner un esclave noir fugitif ou quelque chose comme ça. J'ai donc choisi le nom "Mouton marron" parce que c'est rempli de connotations doubles.

Même si ça sonne pas joli.

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Merci à une amie du bacc pour m'avoir rappelé l'importance de noter l'existence des marrons.

[Édition du 6 novembre 2010] Je tiens aussi à spécifier que je ne suis PAS identitaire. Les identitaires ne placent rien au-dessus des intérêts de la Nation: moi je chie dedans. Je place donc mon cul au-dessus des intérêts de la Nation.

En fait, le terme marron, en québécois courant, renvoie à une réalité différente du terme "brun", souvent associé au fascisme. Merci à des lecteurs/trices de France de m'avoir mis la puce à l'oreille.

mercredi 25 août 2010

La Presse et le G20

Les chroniqueurs/euses de la Presse lancent souvent des idées au hasard sans jamais chercher à vérifier. Je suis toujours étonné de lire des inepties déclarées de manière plus catégorique que dans les blogues (et tweets?) les plus amateurs. J'en comprends que les articles sont un simple prétexte à la pub qui remplit les pages des quotidiens. J'en comprends aussi que les éditorialistes ne font même pas l'effort de lire les autres articles du journal dans lequel ils écrivent leurs niaiseries.

Hier, Mario Roy donnait son étonnante opinion de la répression judiciaire de nos ami-e-s qui ont dû comparaître inutilement à Toronto le 23 août: il croit que malgré la culpabilité évidente des arrêté-e-s, les charges devraient être abandonnées. "Il y a des occasions où il faut savoir marcher sur ses principes, en effet, y compris celui de la justice." Ce serait donc justice de conserver les charges contre des gens innocents? Mario Roy ne le précise pas: il n'énonce pas l'idée pourtant évidente que sans doute 95% des accusé-e-s n'ont pas commis la moindre infraction pendant la fin de semaine du G20, et que la minorité de "coupables" qui se sont fait pogner ne méritent pas des accusations aussi graves de complot en vue de commettre un acte criminel. Mais s'illes ont été arrêté-e-s, c'est nécessairement parce qu'illes l'ont cherché, n'est-ce pas, M. Roy?

Le vieil éditorialiste sénile commente aussi un texte qui, à l'origine publié dans Le Devoir, a fait le tour du milieu anarchiste québécois (et même français dans une certaine mesure): "De fait, on trouvera dans Le Devoir de ce matin, sur une demi-page, un exemple de la prose extraordinairement convenue et banale à laquelle le courant anarchiste en est réduit." Or, on pourrait lui reprocher la même chose. "La police joue le jeu des anars"[1], "les gens masqués ont quelque chose à cacher", sont des idioties qui ont tellement été répétées qu'elles ont l'effet de simples jappements.

L'éditorialiste va au-delà du doute raisonnable: s'il pense que la police a eu tort de provoquer des gens belliqueux par des arrestations massives, il ajoute prudemment qu'ils ont aussi agi "peut-être même (mais comment peut-on vraiment connaître la vérité ?) par la brutalité et par l’abus de pouvoir." Sauf que la vérité est établie depuis longtemps là-dessus. Quelqu'un qui se fait piétiner par une charge de cavalerie n'est donc pas une preuve de brutalité? La détention illégale et les accusations farfelues ne sont pas des preuves d'abus de pouvoir? Dans une société de droit, voilà longtemps que toutes les accusations auraient été abandonnées, ne serait-ce qu'en raison de vices de procédure.

Mais Mario Roy est un éditorialiste formaté qui ne s'informe pas ailleurs qu'aux nouvelles de TVA, et visiblement seulement une fois par mois.

Marie-Claude Lortie n'est pas en reste dans le rayon des bêtises. Pas loin d'une pub de Rolex, elle échoue elle aussi lamentablement à prendre ses distances face aux évènements. Son texte, "Des deux côtés de la clôture", et aussi idiot que méprisant. Elle commence par un décidé "Depuis Seattle en 1999, on est habitués." Habitué-e-s à quoi? À regarder des images de manifestant-e-s écrapouti-e-s à partir de son salon? Visiblement, les contestataires (et flics, nuance-t-elle) sont coupables du crime le plus grave: ennuyer Sa Majesté Marie-Claude Lortie ainsi que sa cour de lobotomisé-e-s.

Paradoxalement avant de les défendre, elle y va de nombreuses pointes contre les activistes de gauche: entre autres, elle désigne Naomi Klein comme la "gourou de l'altermondialisme". Lortie n'a jamais pensé sortir de son monde autoritaire qui fonctionne avec une hiérarchie clairement définie: son cerveau fonctionne de même. Normal qu'elle décide de désigner une figure qui sort du rang (notamment en terme de ventes...) comme notre leader incontesté. Des punks de Montréal ont déjà répondu à ce genre de réactions stupides en collant une affiche sur leur chien qui disait "PDG des anarchistes". J'avais trouvé cette idée vraiment amusante et je pense qu'on n'a pas besoin d'en rajouter.

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[1] Comme si ça ne nous faisait pas chier d'aller en prison.

lundi 23 août 2010

Tribunal.

Bonne chance à nos camarades qui sont en train de comparaître à Toronto.

Les jeunes issu-e-s de la réforme

Ce n'est pas une génération perdue. Arrêtez de vous acharner sur eux, vieux cons.

Non mais c'est vrai quoi. Laissez-leur une chance. J'ai l'impression qu'on traite de plus en plus ces jeunes comme des idiot-e-s congénitaux. Je soupçonne les profs du secondaire anxieux d'avoir accumulé du mépris pour les élèves qu'ils/elles ont formé-e-s. La FECQ essaie de défendre ses futur-e-s membres et c'est tout à fait louable mais je trouve qu'elle est trop conciliante.

Plutôt que de chialer en prétendant que les jeunes de la réforme ne sont pas prêt-e-s à entrer au cégep, certain-e-s profs devraient apprendre à ne plus faire d'erreurs d'orthographe au tableau. Et je suis navré pour ceux et celles qui font réellement des efforts, mais je pense qu'ils/elles devraient également arrêter de se comporter en bullies dans les facultés universitaires au cours de leurs études, puis en corporatistes jaloux et jalouses dans les polyvalentes ensuite.

Je ne sais plus combien de fois je me suis fait picosser par des profs de français qui considéraient que ma virgule était pas au bon endroit, allant jusqu'à corriger maladivement des citations de Proust, poussé-e-s par une envie insurmontable de faire chier tout le monde et de tuer la beauté. Je sais plus combien de fois les profs de mon bacc ont dû interrompre leur cours parce qu'un-e étudiant-e en éducation ne savait pas que "Napoléon" et "Bonaparte" étaient en fait une seule personne.

Je sais pas, faites comme Pwel, tiens, et allez voir du pays. Ou lisez un peu.

Mon prof de maths, en secondaire cinq, m'avait refilé 1984. Il avait entendu parler de mes goûts par un autre prof[1] et il s'est dit que ça m'intéresserait. Jolie éclaircie dans un ciel uniformément gris d'enseignant-e-s parfaitement bien formaté-e-s. C'est d'ailleurs un fait avéré que pas mal d'originaux/ales sont marginalisé-e-s dans les salons du personnel. Ne me dites pas que c'est faux, je sais de quoi je parle.

Un-e bon-ne prof sait passer outre les exigences de coutumes pédagogiques ridicules parce que ce n'est pas un-e simple pédagogue, mais quelqu'un qui a du contenu. Mort à la dictature du cahier d'exercice.

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[1] Et pourtant, j'étais un élève au caractère effacé.

mardi 10 août 2010

Pourquoi les vieilles règles sont nulles.

Je voudrais commencer ce billet par un avertissement: faites bien attention à la manière avec laquelle vous comprendrez ce billet. Navré aussi de ne pas ajouter de notes de bas de page pour renvoyer à plein de références scientifiques.

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Rien ne nous prouve hors de tout doute que les relations hommes-femmes, dans toutes les sociétés dites primitives, penchaient nettement en faveur des hommes. Plusieurs anthropologues et historien-ne-s se ont étudié la question. Mais il y a déjà plusieurs siècles, le premier regard des Français nouvellement arrivés au Canada permit de constater que les femmes autochtones avaient un grand pouvoir sur leur propre destinée, pouvant coucher avec qui elles le souhaitaient et abordant la question du divorce avec une liberté qui ferait pâlir d'envie les trois-quarts des femmes mal prises du globe.

Apparemment, la tyrannie de l'homme sur la femme s'installe dès les premiers signes, dans une société, de l'arrivée d'un système complexe et hiérarchisé. Cette domination, selon moi, est directement liée à la masse musculaire et au profit que les hommes ont pu tirer de la division genrée des tâches. Dans des exceptions qui ne nous intéresseront pas dans ce billet, la religion, ennemie séculaire de la condition de la femme, lui a paradoxalement permis de garder un statut imposant par le biais d'idéologie spirituelle mettant l'accent sur la force de la fertilité féminine.

Les conservateurs/trices ont raison sur un point: il y a presque toujours eu des rôles genrés à travers l'histoire, et ce même dans les sociétés les plus "primitives". En revanche, ils/elles ont complètement tort quand ils/elles affirment que ces rôles sont naturels: puisque ce ne furent jamais les mêmes! Par exemple, chez plusieurs peuples d'Afrique centrale, les femmes furent pendant longtemps les principales pourvoyeuses en nourriture. Idem pour les nations semi-sédentaires de langue iroquoise. Les seuls rôles qui ne changent presque pas, c'est celui de la guerre pour l'homme, et l'éducation des enfants en bas âge pour la femme. Inutile de dire que ces rôles perdent leur sens en temps de paix, c'est-à-dire presque toujours.

Cette distribution, qui dans le contexte actuel est absolument ridicule, n'était pas nécessairement un signe de la domination absolue de l'homme sur la femme: pour reprendre mon exemple préféré, chez les Iroquois, c'était les hommes qui se battaient mais les femmes qui décidaient d'entrer en guerre.

De la même manière, l'absence de réciprocité dans la fidélité n'était pas nécessairement un signe de la domination totale de l'homme sur la femme. J'explique ce que j'entends par absence de réciprocité: c'est le fait de punir seulement l'adultère de la femme. En ce qui concerne les premières sociétés, cette pratique est on-ne-peut-plus logique: en effet, l'adultère de l'homme ne réduit pas de facto le pouvoir de reproduction de la femme, c'est-à-dire que même si l'homme peut aller voir ailleurs, sa femme légitime pouvait toujours tomber enceinte de lui à tout moment. L'inverse n'est pas vrai. L'infidélité féminine réduisait le pouvoir de reproduction de son époux légitime: si l'adultère était suffisamment fréquent, le mâle pouvait même se retrouver à élever plusieurs enfants dont il n'était pas le géniteur. Ajoutons à ça le nombre élevé de morts en couches[1].

Bref, sur le plan strictement reproductif et biologique, l'infidélité masculine avait autrefois moins de conséquences sur la transmission des gènes de sa propre femme que l'inverse. Il est aussi possible que le compromis de non-réciprocité ait été arraché aux femmes à l'intérieur de sociétés qui n'étaient que légèrement machistes.

L'évolution des sociétés devait gêner davantage la liberté sexuelle des femmes, au gré du pouvoir (sans doute) grandissant de l'homme. En Grèce antique, une femme ne peut pas empêcher son époux d'aller voir une maîtresse: la seule faute de l'homme pouvant justifier un divorce est le fait de faire entrer la maîtresse à de nombreuses reprises dans la maison conjugale, et/ou le fait de ne plus entretenir l'épouse légitime afin de payer des caprices à l'amante.

L'autre obstacle à l'infidélité féminine est paradoxalement une mesure égalitaire (entre hommes) et non généralisée arrachée sans doute après des millénaires de violence et de domination des (hommes) forts sur les faibles: la monogamie. À ce propos, plusieurs sociobiologistes croient dur comme fer que les humains sont naturellement monogames[2]. Possible, mais le fait est que la polygamie et le cocufiage sont trop répandus pour que l'ambition compétitive des individus n'ait pas à de nombreuses reprises défié ce qu'on appelle de manière erronée et biaisée la nature humaine.

En général, la fidélité féminine résiste comme valeur centrale tout d'abord parce que la femme est l'esclave du mode de reproduction, ensuite par nécessité de survie - l'homme devient l'unique pourvoyeur - et finalement, avec l'arrivée des femmes sur le marché du travail, en raison du statut social d'un couple.

La situation reste sensiblement la même à travers les époques, en bref: l'homme peut courir les jupons et la femme doit rester sage. On peut penser qu'avec l'arrivée du féminisme, cette fidélité aurait dû tomber immédiatement comme un vieux rideau souillé: or le hasard fit qu'une majorité de femmes exigèrent plutôt de leur compagnon que celui-ci restât également fidèle.

Empêcher les femmes d'aller voir ailleurs pour protéger son patrimoine génétique, c'était pitoyable[3], mais logique; les restreindre pour conserver la paix sociale et l'ordre familial, c'était compréhensible en admettant que c'était une solution brutale née dans un monde brutal; mais conserver ces contraintes dans la société actuelle[4], avec la contraception, la haute espérance de vie et l'éclatement des familles, ça ne répond à aucune nécessité. Conserver les mêmes standards dans une société postcapitaliste (dans le sens où on va avoir évacué l'ancien monde par les chiottes) serait également complètement dénué de logique. Voilà pourquoi les vieilles règles sont nulles.

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[1] Lire Histoire de l'adultère, de Bonnet et Tocqueville. Geoffrey Miller a aussi tenté de parler des conséquences évolutives de l'adultère, mais je vous conseille de ne pas boire en même temps que de lire son livre: vous risquez de vous étouffer.
[2] Pour une critique constructive des sociobiologistes, je vous conseille fortement le livre de Daniel Lord Smail, On Deep History of the Brain. Mise à jour: voilà un article intéressant sur l'histoire du couple
.
[3] De mon point de vue, les gens qui ressentent aujourd'hui une forte volonté d'autoreproduction sont mûrs pour une thérapie. C'est plus de la connerie pure qu'une inclination naturelle et biologique. Même chose pour la jalousie, quoique ce soit peut-être un peu moins stupide si elle naît d'une sensation d'abandon et de carence plutôt que d'une volonté de contrôle.
[4] Elle est tout de même restée brutale.