Une célèbre pro-hausse a dit, en entrevue à la radio, que les jeunes de milieux défavorisé-e-s du Québec étaient moins nombreux à se rendre à l'université que les jeunes de milieux favorisés, comme partout ailleurs[1]. Cependant, l'écart serait plus grand au Québec, malgré des frais de scolarité plus bas. Cela tendrait à prouver que la hausse des frais de scolarité n'a pas de conséquences négatives sur la fréquentation des universités par les jeunes issus de milieux défavorisés.
C'est cependant une demie-vérité. Les données utilisées sont en effet fragmentaires et concernent seulement les jeunes de 19 ans.
Statistiques Canada, dans son analyse des données, explique cet écart:
« Toutefois, comme on l’a signalé précédemment, 19 ans est considéré comme un jeune âge pour fréquenter l’université au Québec, puisque la plupart des jeunes de cet âge sont encore au cégep. Par conséquent, il est possible que les jeunes du dernier quartile de revenu aient pris plus de temps pour atteindre l’université que leurs homologues du premier quartile, plutôt que de choisir de ne pas y aller du tout. »
En effet, grâce aux données de 2001, Statistiques Canada a publié il y a quelques années une recherche intitulée Enquête sur la dynamique du travail et du revenu[2], dans laquelle elle montrait que 53% des jeunes de 18 à 24 ans du Québec et dont le revenu des parents était moins de 25 000$ avaient fréquenté une institution collégiale ou universitaire[3]. Ce n'est pas du tout reluisant encore mais cela remet en perspective le score assez pauvre de moins de 10% énoncé par les données analysées plus tôt.
Quant à la performance toujours étonnante de la Nouvelle-Écosse, où les frais de scolarité sont plus élevés, on l'explique de cette manière:
« L’écart relativement faible dans les taux de fréquentation de l’université entre les quartiles de revenu des familles en Nouvelle-Écosse peut s’expliquer en partie parce que les jeunes dans cette province ont accès à un grand nombre d’universités qui couvrent une petite région géographique.»
Ajoutons surtout qu'une grande partie des étudiant-e-s universitaires de la Nouvelle-Écosse viennent de l'extérieur de la province, ce qui gonfle de manière absurde les statistiques énoncées et tend à réfuter tout argument utilisant cette province comme contre-exemple à la situation du Québec[4]. Le nombre d’étudiant-e-s postsecondaires provenant de la Nouvelle-Écosse inscrit-e-s à temps plein en Nouvelle-Écosse, divisé par la population provinciale âgée de 18 à 24 ans, en 2007, était de 23%[5]! Cela nous change de la statistique habituellement utilisée par la droite, qui est plutôt de 39%!
Le reste du problème tient en bref à la même différence fondamentale entre le Québec et le reste du Canada dont nous parlons sans arrêt: les cégeps.
D'ailleurs, c'est évident que le graphique ne fait pas de sens dans l'argument énoncé par la pro-hausse en question: si on se refuse à analyser les données, on pourrait même conclure que les jeunes riches du Québec sont deux fois moins nombreux à aller à l'université que les jeunes pauvres de la Nouvelle-Écosse!
N'importe qui d'honnête sur le plan intellectuel aurait rejeté ces données, qui sont incomplètes et pas du tout fiables sur le plan comparatif, de l'aveu même des auteur-e-s de l'étude. Comparer des provinces canadiennes entre elles ne se fait pas seulement à partir de deux ou trois statistiques. Il faut cumuler de nombreuses données et les nuancer. Ce que les pro-hausse n'ont pas fait.
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C'est cependant une demie-vérité. Les données utilisées sont en effet fragmentaires et concernent seulement les jeunes de 19 ans.
Statistiques Canada, dans son analyse des données, explique cet écart:
« Toutefois, comme on l’a signalé précédemment, 19 ans est considéré comme un jeune âge pour fréquenter l’université au Québec, puisque la plupart des jeunes de cet âge sont encore au cégep. Par conséquent, il est possible que les jeunes du dernier quartile de revenu aient pris plus de temps pour atteindre l’université que leurs homologues du premier quartile, plutôt que de choisir de ne pas y aller du tout. »
En effet, grâce aux données de 2001, Statistiques Canada a publié il y a quelques années une recherche intitulée Enquête sur la dynamique du travail et du revenu[2], dans laquelle elle montrait que 53% des jeunes de 18 à 24 ans du Québec et dont le revenu des parents était moins de 25 000$ avaient fréquenté une institution collégiale ou universitaire[3]. Ce n'est pas du tout reluisant encore mais cela remet en perspective le score assez pauvre de moins de 10% énoncé par les données analysées plus tôt.
Quant à la performance toujours étonnante de la Nouvelle-Écosse, où les frais de scolarité sont plus élevés, on l'explique de cette manière:
« L’écart relativement faible dans les taux de fréquentation de l’université entre les quartiles de revenu des familles en Nouvelle-Écosse peut s’expliquer en partie parce que les jeunes dans cette province ont accès à un grand nombre d’universités qui couvrent une petite région géographique.»
Ajoutons surtout qu'une grande partie des étudiant-e-s universitaires de la Nouvelle-Écosse viennent de l'extérieur de la province, ce qui gonfle de manière absurde les statistiques énoncées et tend à réfuter tout argument utilisant cette province comme contre-exemple à la situation du Québec[4]. Le nombre d’étudiant-e-s postsecondaires provenant de la Nouvelle-Écosse inscrit-e-s à temps plein en Nouvelle-Écosse, divisé par la population provinciale âgée de 18 à 24 ans, en 2007, était de 23%[5]! Cela nous change de la statistique habituellement utilisée par la droite, qui est plutôt de 39%!
Le reste du problème tient en bref à la même différence fondamentale entre le Québec et le reste du Canada dont nous parlons sans arrêt: les cégeps.
D'ailleurs, c'est évident que le graphique ne fait pas de sens dans l'argument énoncé par la pro-hausse en question: si on se refuse à analyser les données, on pourrait même conclure que les jeunes riches du Québec sont deux fois moins nombreux à aller à l'université que les jeunes pauvres de la Nouvelle-Écosse!
N'importe qui d'honnête sur le plan intellectuel aurait rejeté ces données, qui sont incomplètes et pas du tout fiables sur le plan comparatif, de l'aveu même des auteur-e-s de l'étude. Comparer des provinces canadiennes entre elles ne se fait pas seulement à partir de deux ou trois statistiques. Il faut cumuler de nombreuses données et les nuancer. Ce que les pro-hausse n'ont pas fait.
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[1] Personne ne semble noter que ce fait à lui seul constitue un grave problème relié autant à une question de culture qu'à une question financière.[2] Je cherche encore l'étude en fichier PDF. J'imagine qu'elle comprend une comparaison par province. Mais je n'arrive pas à la trouver sur le site de Stats Can...[3] contre 87% pour les jeunes du même âge issus d'un milieu très favorisé. Cela nous ramène à une proportion de 60%, qui est semblable à l'écart entre les Néo-Écossais de 19 ans du dernier quartile et du premier. Les données sont difficilement comparables, puisque le groupe d'âge au Québec est plus large. Les quartiles utilisés dans les comparaisons ne sont pas non plus les mêmes.[4] Le Prix du Savoir, p. 62.
[5] Contre 27% pour le Québec. Mais l'étude ne spécifie pas clairement si les 27% sont composés uniquement d'étudiant-e-s originaires de la province. Elle parle simplement d'étudiant-e-s québécois. De plus, les études postsecondaires, dans le cas du Québec, ne concernent que les programmes préuniversitaires.
[5] Contre 27% pour le Québec. Mais l'étude ne spécifie pas clairement si les 27% sont composés uniquement d'étudiant-e-s originaires de la province. Elle parle simplement d'étudiant-e-s québécois. De plus, les études postsecondaires, dans le cas du Québec, ne concernent que les programmes préuniversitaires.
"[1] Personne ne semble noter que ce fait à lui seul constitue un grave problème relié autant à une question de culture qu'à une question financière."
RépondreSupprimerEn effet! Tiens, vlà une vieillerie...
http://www.latribuduverbe.com/archives/2004/11/les_frais_de_scolarite_et_le_f.html
Non, c'est plutôt celle-là...
RépondreSupprimerhttp://www.latribuduverbe.com/archives/2004/09/linstitut_economique_de_montre_1.html
"Rappelons un fait historique élémentaire. Le rapport de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme publié en 1965 avait révélé que les francophones arrivaient au 12e rang sur 14 dans l'échelle des revenus selon l'origine ethnique, avant les Italiens et les Amérindiens. Très peu de francophones avaient accès à une éducation post-secondaire à l'époque. Cette cohorte plus âgée continue d'infléchir le taux de diplomation global à la baisse. La situation change drôlement quand on découpe les chiffres sur le taux de diplomation en fonction des tranches d'âge pour observer l'évolution qu'il y a eu dans les dernières décennies. Le graphique 2 illustre ce fait. On constate que plus on monte dans les groupes d'âge, moins le nombre de détenteurs de diplômes universitaires est élevé."
RépondreSupprimer"Une célèbre pro-hausse a dit, en entrevue à la radio, que les jeunes de milieux défavorisé-e-s du Québec étaient moins nombreux à se rendre à l'université que les jeunes de milieux favorisés, comme partout ailleurs[1]."
SupprimerRaison de plus pour ne pas rechercher sciemment à aggraver le problème! Mais, justement, ne serait-ce pas leur but principal?
S'illes veulent en effet réduire l'accès universitaire aux pauvres, illes s'en défendent bien. Je crois que le mouvement anti-hausse dit lui-même surtout que la hausse affecte les jeunes des classes moyennes.
RépondreSupprimerCela dit, j'ai entendu le porte-parole de la CLASSE dire avec raison, l'autre jour, que les pauvres payent plus cher pour leurs études que les riches (si on ne compte pas la contribution des impôts), étant donné qu'illes doivent payer, en plus des frais de scolarité, des intérêts sur leur dette.
Merci pour le lien très pertinent.