jeudi 19 avril 2012

Une assemblée démocratique.


Comme le journal La Presse a préféré publier les niaiseries de François Desrochers sans soumettre celle-ci à ma critique, eh bien je publie la version longue (la version envoyée ne faisait que 480 mots) de ma lettre ouverte envoyée au journal hier.  Ce texte est volontairement nuancé et modéré afin de plaire au format de La Presse.

Notons que j'ai entamé ce processus de rédaction de lettres ouvertes sous les pressions répétées de modéré-e-s, qui suggèrent d'enterrer les mass médias de lettres ouvertes et de commentaires.  Je réponds ainsi, de même, aux pressions de mes collègues universitaires qui me trouvent trop chiâleux, (dont l'une a déjà travaillé pour L'Actualité: je la salue), et qui me demandent naïvement si je prends le temps d'écrire pour répondre aux "présumés" mensonges colportés dans les médias.

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Une lettre d'opinion assez étonnante, publiée le 18 avril, traite d'une assemblée générale de grève à l'Association Facultaire Étudiante de Sciences Humaines de l'UQAM.  J'ai assisté à la même assemblée et je n'ai pas du tout eu la même expérience que l'auteur de la lettre.

Notons tout d'abord que l'AFESH n'était pas obligée de tenir une assemblée de reconduction de grève.  La dernière proposition votée sur le sujet exigeait que l'association étudiante reconduise automatiquement la grève jusqu'à ce qu'elle reçoive une offre de la part du gouvernement.  Comme dans d'autres associations étudiantes, il aurait été possible de statuer, simplement, que le décret augmentant le plafond de prêts et instaurant le remboursement proportionnel aux revenus ne constituait pas une « offre ».

Dans les faits, il aurait été tout à fait possible que la grève cesse ce lundi, si les étudiant-e-s en avaient pris la décision (avec un vote à majorité simple).  Je crois donc qu'il faut, en premier lieu, rejeter les arguments qui prétendraient que cette grève est « forcée » ou « antidémocratique ».  Notre association étudiante a jusqu'à maintenant, il me semble, respecté ses mandats.

Dans les assemblées de l'AFESH-UQAM, le décorum est un peu forcé.  Les applaudissements, huées et même parfois les rires sont dénoncés.  La « pression » est restreinte au minimum.  Cela n'a pas empêché, lundi, les partisan-e-s de l'arrêt de la grève de défier systématiquement ce décorum en hurlant et en applaudissant à tout rompre après chaque intervention favorable à leur cause.  Malgré leur nombre passablement réduit, ils et elles ont été plus bruyant-e-s et dérangeant-e-s que des centaines de partisan-e-s de la grève, gueulant manière totalement irrespectueuse.

Ajoutons aussi que certaines accusations ont été totalement farfelues.  Une intervenante a entre autres sous-entendu que le fait de porter le carré rouge était une preuve d'appui tacite à la violence, et que des grévistes avaient tenté de faire « dérailler » le métro.  Son intervention, incontestablement diffamatoire, fut-elle suivie d'une vague de huées ?  Pas du tout.  Quelques murmures d'objection, tout au plus, suivis d'appels au décorum.  Moi-même, qui suis en faveur de la grève, j'ai appelé à ce qu'on la laisse terminer.

L'auteur de la précédente lettre a affirmé que personne n'a parlé des «faits» avant d'énoncer des arguments assez convenus en faveur de la hausse.  C'est totalement mensonger.  Des opposant-e-s à la grève ont en effet parlé du « coût » de l'éducation. Mais peut-on reprocher aux membres de l'AFESH de ne pas s'être sentis concernés par des arguments fallacieux?

L'assemblée générale a débuté par un point d'information, pendant lequel des invité-e-s devaient diffuser de l'information sur les perspectives de lutte.  Des étudiant-e-s ont tenté de les museler en arguant que ces invité-e-s n'étaient bien entendu pas impartiaux.  Un vote s'est donc tenu sur la question : et c'est avec le consentement de l'assemblée que les invité-e-s se sont exprimé-e-s.

Le vote de grève ne s'est tenu que quelques heures plus tard.  Entretemps, j'ai pu assister au départ de plusieurs étudiant-e-s portant le carré vert : ce n'était certainement pas l'intimidation, mais l'impatience qui a motivé leur départ.  À ma connaissance, personne n'a été intimidé ou menacé pendant le vote.  Une de mes collègues a d'ailleurs pris une position différente de la mienne, sans que je ne ressente de tension par la suite.

Je ne nie pas qu'il puisse exister plusieurs cas d'intimidation dans des assemblées, ou en périphérie des consultations.  Il serait d'ailleurs temps que les partisan-e-s de la hausse reconnaissent que cette intimidation va dans les deux sens, et que ni vote secret, ni référendum ne peuvent la contrer efficacement, mais seulement un dialogue rationnel.  Vous souhaitez que nous condamnions la violence? Faites donc le premier pas.

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